L’économie mondiale continue de faire preuve de résilience, l’inflation ayant continué de se modérer et les échanges internationaux ayant commencé à se redresser. Le recul de l’inflation stimule la croissance des revenus réels et les dépenses des ménages, même si la confiance des consommateurs n’a pas encore retrouvé son niveau d’avant la pandémie dans de nombreux pays. Les tensions continuent de s’atténuer sur les marchés du travail, bien que les taux de chômage restent généralement au niveau ou proches de leurs points historiquement bas. Les taux d’intérêt réels demeurent restrictifs, mais la baisse des rendements nominaux a suscité certains signes précoces de redressement des marchés du logement et du crédit, sensibles à l’évolution des taux d’intérêt. L’inflation globale est désormais revenue à l’objectif dans un nombre croissant d’économies avancées et d’économies de marché émergentes, en dépit de tensions persistantes dans les secteurs des services.
La croissance du PIB mondial devrait s’établir à 3.2 % cette année, et à 3.3 % en 2025 et 2026 (tableau 1.1). L’inflation faible, la croissance stable de l’emploi, des politiques monétaires moins restrictives sont autant de facteurs qui contribueront à soutenir la demande, en dépit des contraintes modérées liées au nécessaire durcissement de la politique budgétaire dans de nombreux pays. Certaines différences entre les pays persisteront sans doute à court terme, mais se dissiperont à mesure que la forte croissance aux États-Unis et au Brésil commencera à s’infléchir et que la reprise s’accélérera en Europe. Le dynamisme de la demande intérieure en Inde et en Indonésie, et les mesures de relance récemment annoncées en Chine et au Japon devraient favoriser la poursuite d’une forte croissance en Asie. Dans les pays du G20, la hausse annuelle des prix à la consommation devrait se modérer pour s’établir respectivement à 3.5 % et 2.9 % en 2025 et 2026, contre 5.4 % cette année. D’ici la fin de 2025 ou au début de 2026, l’inflation devrait revenir à l’objectif dans près de la totalité des grandes économies.
Il existe d’importants risques de divergence à la baisse par rapport aux perspectives. Les fortes tensions géopolitiques demeurent un risque à la baisse important à court terme, surtout si les conflits en pleine évolution au Moyen-Orient devaient s’intensifier et susciter des risques pour les approvisionnements de pétrole en provenance de la région. Une flambée inattendue des prix du pétrole provoquerait une forte hausse de l’inflation mondiale et mettrait à mal la confiance et la croissance, en particulier dans les pays importateurs de pétrole. Les incertitudes entourant les politiques commerciales se sont nettement accentuées ces derniers mois, aggravant les préoccupations engendrées par l’augmentation en cours du nombre des mesures de restriction des importations mises en en œuvre par les grandes économies. Une nouvelle inflation des restrictions aux échanges internationaux alourdirait les prix des importations, augmenterait les coûts de production des entreprises et ferait baisser les niveaux de vie des consommateurs. Une croissance moins forte que prévu ou des écarts par rapport à la trajectoire de désinflation régulière attendue pourraient en outre provoquer des perturbations sur les marchés financiers et susciter des turbulences dans les flux de capitaux ou les taux de change des économies de marché émergentes. Des vulnérabilités financières persistent également. Elles sont dues à un endettement élevé, à la valorisation excessive de certains actifs et à la détérioration de la qualité du crédit de certains emprunteurs, notamment sur le marché de l’immobilier commercial. Du fait de l’ampleur et de l’interdépendance croissantes des institutions financières non bancaires moins réglementées, les chocs négatifs risquent également de se diffuser rapidement à différents segments du marché.
Certains facteurs imprévisibles pourraient susciter des surprises positives. L’amélioration de la confiance des consommateurs parallèlement à un redressement plus marqué du pouvoir d’achat pourrait se traduire par un recul des taux d’épargne des ménages plus important que prévu, stimulant les dépenses, mais aussi les tensions inflationnistes. Une résolution rapide des grands conflits géopolitiques pourrait améliorer le moral des ménages et faire baisser les prix de l’énergie, en particulier étant donné la probabilité d’une offre excédentaire sur les marchés du pétrole l’année prochaine. Des chocs d’offre positifs, tels qu’une croissance plus dynamique que prévu de la population active ou un redressement plus vigoureux de l’investissement soutenu par l’amélioration des conditions de financement, favoriseraient également une croissance plus forte.
Dans ce contexte, les principales priorités de l’action publique consistent à assurer un repli continu et durable de l’inflation, à redoubler d’efforts pour établir une trajectoire budgétaire crédible qui assurera la viabilité de la dette et à mener des réformes ambitieuses pour une croissance plus élevée, durable et inclusive à moyen terme.
À mesure que l’inflation va se modérer pour converger vers les objectifs visés par les banques centrales, l’abaissement des taux directeurs devrait se poursuivre dans les économies avancées, mais le calendrier et l’ampleur de ces baisses devraient être soigneusement examinés et rester fonction des données disponibles afin que les tensions inflationnistes sous-jacentes soient durablement contenues. Si l’inflation revient au niveau des objectifs visés d’ici à 2026, comme indiqué dans les projections pour la majorité des pays, les taux d’intérêt devraient d’ici là être aux niveaux ou proches de la neutralité pour assurer une stabilisation de la croissance autour de la tendance et empêcher une baisse de l’inflation en deçà des objectifs. Au Japon, un relèvement progressif des taux d’intérêt directeurs serait approprié au cours des deux prochaines années, sous réserve que l’inflation s’établisse à 2 % environ, conformément aux projections. Les réductions de taux effectuées dans les économies avancées contribuent à renforcer la marge d’abaissement des taux directeurs dans les économies de marché émergentes. Il existe des marges de réduction des taux directeurs dans la plupart de ces pays au cours des deux prochaines années, mais le rythme des réductions devrait rester mesuré pour préserver l’ancrage des anticipations d’inflation et minimiser les risques de sortie de capitaux aux effets perturbateurs.
Des mesures budgétaires décisives s’imposent pour assurer la viabilité de la dette, préserver une marge de manœuvre permettant aux pouvoirs publics de faire face à de futurs chocs et générer des ressources qui permettront de faire face à d’importantes tensions imminentes sur les dépenses. Il est indispensable de redoubler d’efforts pour contenir et réaffecter les dépenses et accroître les recettes, en les inscrivant dans des trajectoires crédibles d’ajustement à moyen terme, adaptées aux spécificités de chaque pays, de façon à garantir une stabilisation du poids de la dette. Les efforts d’assainissement des finances publiques devraient s’intensifier tandis que les politiques monétaires seront moins restrictives, sous réserve que, conformément aux projections, la croissance soit suffisamment vigoureuse pour résister à de nouvelles difficultés budgétaires. Les priorités d’action diffèrent d’un pays à l’autre, mais une définition précise du rythme et de la nature de l’ajustement est indispensable partout pour apporter un soutien approprié aux personnes qui en ont besoin et conserver les ressources nécessaires pour répondre aux enjeux à plus long terme, comme la transition climatique et le vieillissement démographique.
Compte tenu des perspectives de croissance modeste qui se dessinent, d’ambitieuses réformes structurelles doivent s’imposer dans tous les pays pour contribuer à consolider les fondements d’une croissance économique plus vigoureuse et plus durable et à les aider à surmonter les difficultés budgétaires auxquelles ils sont confrontés. Dans l’économie médiane de l’OCDE, la croissance annuelle de la production potentielle par habitant est actuellement inférieure, selon les estimations, de 0.7 point de pourcentage, comparé aux niveaux enregistrés avant la crise financière mondiale. Dans certaines économies de marché émergentes, les baisses ont été encore plus marquées. Les réformes visant à renforcer l’éducation et le développement des compétences et à réduire les contraintes qui, sur les marchés du travail et des produits, freinent l’investissement et la mobilité de la main-d’œuvre, sont essentielles pour stimuler la productivité, accroître la diffusion des nouvelles technologies et améliorer les taux d’activité. Ces réformes, associées à des mesures visant à améliorer la qualité des emplois dans les secteurs à faible rémunération, sont indispensables car elles contribueraient à mettre fin aux pénuries de main-d’œuvre structurelles affectant les différents pays, comme détaillé dans le chapitre 2.
Il faut renforcer la coopération internationale pour soutenir les échanges mondiaux et réduire les risques de fragmentation géopolitique en préservant l’ouverture des marchés internationaux au sein d’un système commercial mondialisé fondé sur des règles. Cela est indispensable pour assurer une accélération et une meilleure coordination des efforts de réduction des émissions, et pour remédier au surendettement dans les pays à faible revenu, sans y causer de contraintes excessives.