La croissance du PIB devrait refluer de 3.7 % en 2024 à 3.0 % en 2025, puis à 2.8 % en 2026. L’investissement sera soutenu par l’utilisation des fonds structurels et des fonds de la facilité pour la reprise et la résilience de l’Union européenne (UE), ainsi que par l’amélioration des conditions de financement. La croissance de la consommation privée ralentira parallèlement à la modération de la croissance des revenus réels. Les risques tiennent aux tensions géopolitiques, à la hausse des prix de l’énergie à l’échelle mondiale et à l’affaiblissement de la demande émanant des principaux partenaires commerciaux de la Croatie.

Il faudra faire preuve de prudence en matière budgétaire pour pouvoir reconstituer des marges de manœuvre, favoriser la désinflation et se préparer à relever les défis liés au vieillissement démographique. Il conviendrait de supprimer progressivement dès que possible les mesures non ciblées d’aide énergétique. Enfin, rehausser le taux d’activité des catégories sous-employées contribuerait à atténuer les pénuries chroniques de main-d’œuvre et à stimuler la croissance.

D’après les indicateurs à court terme, l’expansion économique est forte, mais elle est en perte de vitesse au second semestre de 2024. La croissance des ventes reste vigoureuse, mais elle a continué de ralentir au second semestre de cette année, et la dégradation de la confiance des consommateurs se poursuit. Par ailleurs, la production manufacturière reste faible en raison de l’atonie de la demande extérieure. L’inflation globale mesurée par l’indice des prix à la consommation harmonisé reflue depuis 2023 grâce au ralentissement de l’inflation énergétique, mais elle demeure élevée et s’est hissée à 3.6 % en octobre, sous l’effet du renchérissement des produits alimentaires. L’inflation sous-jacente, qui atteignait 4.5 % le même mois, est persistante, en raison de la forte inflation des services due au dynamisme de la croissance des salaires et à la vigueur de la demande touristique. La situation du marché du travail est tendue, et la croissance des salaires nominaux reste soutenue (14 % en glissement annuel en août). Le taux de chômage s’est établi à 4.8 % en septembre, ce qui constitue un point bas historique. Le nombre d’entreprises qui considèrent les pénuries de main-d’œuvre comme un facteur limitant leur production est élevé dans tous les secteurs, et il a augmenté de manière particulièrement sensible dans le secteur manufacturier et celui des services.

Le tassement de la demande extérieure a ralenti les exportations de biens et de services. Pendant la saison haute, l’augmentation des séjours touristiques a été moins rapide qu’un an auparavant. L’assouplissement des conditions financières dans la zone euro ne s’est pas encore répercuté sur les coûts d’emprunt en Croatie. Les prêts bancaires aux ménages ont néanmoins enregistré une forte hausse, de l’ordre de 11 % (en glissement annuel) en septembre. Cela dit, la croissance des prêts aux entreprises a nettement ralenti en 2024, si bien qu’elle avoisinait 4.7 % en septembre, contre 12 % en 2023.

Le déficit des administrations publiques devrait se creuser et passer de 0.9 % du PIB en 2023 à 2.1 % en 2024. La dégradation des finances publiques cette année s’explique par l’accroissement des aides énergétiques accordées aux ménages et aux entreprises, les hausses de salaire dans le secteur public, les revalorisations des prestations sociales ainsi que les dépenses de réparation des dégâts d’origine sismique. L’orientation de la politique budgétaire deviendra légèrement restrictive en 2025, principalement en raison du démantèlement progressif des subventions à l’énergie d’ici à mars 2025. Un nouvel assainissement budgétaire structurel, représentant 0.25 % du PIB, est prévu pour 2026, conformément aux plans budgétaires à moyen terme.

L’expansion économique sera soutenue par la demande intérieure. La croissance de la consommation privée sera vigoureuse, quoique plus modérée en 2025 et 2026, le ralentissement de la progression des salaires et la suppression progressive des subventions à l’énergie freinant les revenus disponibles réels et les pénuries de main-d’œuvre limitant la poursuite de l’augmentation de l’emploi. La croissance de l’investissement sera favorisée par l’absorption du reste des fonds de la facilité de l’UE pour la reprise et la résilience en 2025 et en 2026 (qui représente environ 6 % du PIB), ainsi que par l’assouplissement des conditions financières dans la zone euro. Les exportations augmenteront parallèlement au redressement de la demande extérieure, tandis que les importations conserveront leur vitalité du fait de l’important contenu en importations des investissements financés par les fonds de l’UE. L’inflation globale continuera de se replier peu à peu pour s’établir à 2 % d’ici à la fin de 2026. L’inflation sous-jacente refluera plus lentement du fait de la persistance de l’inflation des services et des effets des hausses des salaires nominaux. Les risques sont orientés de manière prédominante à la baisse. Si elle ne s’accompagnait pas de gains de productivité d’une ampleur équivalente, une forte croissance des salaires tirerait l’inflation vers le haut et saperait la compétitivité commerciale du pays. Par ailleurs, la désinflation ralentirait en l’absence d’assainissement budgétaire.

Il conviendrait de mettre fin comme prévu aux subventions énergétiques mal ciblées, ce qui faciliterait la constitution de marges de manœuvre budgétaires et favoriserait la désinflation. Renforcer les incitations au maintien en activité des seniors, tout en intensifiant les efforts déployés pour attirer et intégrer sur le marché du travail les immigrés et les mères de jeunes enfants, contribuerait à rehausser le taux d’activité et la croissance à long terme. Enfin, des réformes du système éducatif ainsi que des politiques actives du marché du travail, consistant par exemple à améliorer l’enseignement et la formation professionnels et les programmes ciblés de développement des compétences et de reconversion professionnelle, faciliteraient l’adaptation des travailleurs à l’évolution de la demande de compétences et stimuleraient la croissance de la productivité.