Études économiques de l'OCDE : Danemark 2024 (version abrégée)

L’inflation a reculé au premier semestre de 2023, mais l’inflation sous-jacente, à 3 % en novembre, reste forte. Avec la flambée des prix de l’énergie, l’inflation a atteint en 2022 son plus haut niveau depuis les années 80, comme dans la plupart des pays de l’OCDE et ce, malgré une dépendance énergétique relativement faible. Les tensions sur les prix intérieurs ont augmenté, mais restent à ce jour contenues.

La croissance restera en demi-teinte (Tableau 1). L’ajustement des salaires à la hausse des prix se poursuivra, soutenant la consommation. Les exportations demeureront relativement vigoureuses à mesure que la situation économique va s’améliorer chez les principaux partenaires commerciaux, mais la contribution du secteur pharmaceutique pourrait diminuer. Du fait de l’augmentation des taux d’intérêt, le marché du logement restera peu actif et l’investissement modeste. L’inflation globale devrait revenir à 2.5 % d’ici à 2025.

Les risques entourant les perspectives tiennent à la persistance plus grande de l’inflation. Celle-ci pourrait tenir à une croissance des salaires plus forte que prévu. La politique monétaire est contrainte par l’ancrage à l’euro, et la Banque nationale du Danemark doit suivre les décisions de la Banque centrale européenne. Un durcissement de la politique budgétaire s’imposera en cas de persistance, voire d’intensification, des tensions inflationnistes comparativement à la zone euro.

Le secteur financier a bien résisté jusqu’à présent. Les pertes sur prêts sont restées modérées malgré la hausse rapide des taux d’intérêt. Le secteur bancaire est bien capitalisé et dispose de volants de liquidités adéquats, mais les banques de taille moyenne sont exposées aux risques inhérents à l’immobilier commercial, où l’activité a chuté fortement. La dette brute des ménages a diminué, les actifs réels et financiers détenus par les ménages sont importants, mais l’endettement reste l’un des plus élevés de la zone OCDE. La proportion de prêts hypothécaires à taux variable a augmenté et les quotités de financement sont élevées, ce qui accroît le risque de défaillance, même si la capacité de remboursement est forte. Le marché du logement est en phase d’ajustement, mais il faudrait renforcer les politiques macroprudentielles pour gérer le cycle à moyen terme.

Les finances publiques sont solides. Le budget des administrations publiques est excédentaire depuis 2017, la dette publique est peu élevée et le cadre budgétaire en place est robuste. Les aides publiques accordées aux ménages et aux entreprises pour faire face à la hausse des prix de l’énergie ont été limitées, mais globalement appropriées. Les mesures ciblées sur les plus vulnérables ont aidé à amortir l’augmentation du coût de la vie, mais le report de l’indexation des prestations sociales sur les salaires a entraîné d’importantes pertes temporaires de pouvoir d’achat chez les personnes sans emploi.

En dépit des réformes des retraites qui ont pu être menées à bien et de l’augmentation du taux d’emploi des travailleurs âgés, le vieillissement de la population menace potentiellement le modèle social danois. Les dépenses publiques consacrées aux services sociaux vont augmenter, tandis que la population d’âge actif va diminuer. La marge de manœuvre budgétaire est actuellement large, mais pour pouvoir continuer de respecter les règles budgétaires, il faudra faire des économies après 2030.

Alléger comme prévu la charge que la réglementation impose aux collectivités locales pourrait aider à obtenir des gains d’efficience. L’impact de cette réforme sur la qualité des services sur l’ensemble des territoires doit faire l’objet d’un suivi attentif. L’amélioration des marchés publics, le renforcement de la coopération entre les communes ou encore la réforme des services publics de l’emploi constituent quant à eux, parmi d’autres, des moyens de réaliser des gains d’efficience.

Les plans de viabilité budgétaire à long terme reposent sur des relèvements relativement importants de l’âge effectif de départ à la retraite et sur le recours aux régimes de retraite privés. Du fait de son indexation stricte, l’âge légal de départ à la retraite devrait être porté au niveau le plus élevé de la zone OCDE, ce qui risque de rendre plus probable le recours aux dispositifs de retraite anticipée fondées sur l’invalidité. Une réforme des dispositifs de retraite anticipée devrait être conçue de sorte à garantir que les personnes ayant une capacité de travail réduite puissent rester sur le marché du travail dans toute la mesure du possible.

L’économie danoise se caractérise par une forte dépendance, à la fois aux échanges et à un petit nombre d’entreprises et de secteurs d’activité. La diversification de l’activité économique permettrait de réduire les risques et aiderait à tirer parti de nouvelles perspectives, notamment de celles offertes par la transition climatique.

La profonde intégration du Danemark dans les chaînes de valeur mondiales a de grands avantages économiques, mais expose le pays aux risques internationaux. Le Danemark affiche depuis longtemps un ample excédent de sa balance courante, et la concentration de ses exportations dans un petit nombre de secteurs le rend plus dépendant des politiques et réglementations commerciales sectorielles adoptées dans d’autres pays.

L’amélioration du climat des affaires peut aider toute une gamme d’entreprises à prospérer dans le contexte de la double transition écologique et numérique. La transformation numérique bouleverse la dynamique concurrentielle et la politique de la concurrence doit être adaptée en conséquence. Il est possible de renforcer le poids des jeunes entreprises dans l’économie. L’écosystème entrepreneurial permet l’émergence d’entreprises innovantes, mais il serait possible de faire davantage pour soutenir la R‑D, faciliter la coopération entre les universités et les entreprises, et rendre l’entrepreneuriat plus inclusif.

Le Danemark s’est fixé d’ambitieux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre et a déjà accompli des progrès notables en adoptant des politiques d’atténuation du changement climatique efficaces. Cependant, de nouvelles mesures s’imposent pour promouvoir des avancées technologiques et réduire encore les émissions dans tous les secteurs (Graphique 2). La réforme en faveur d’une fiscalité verte élargit le champ d’application de la tarification du carbone et établit à cette fin une trajectoire de large portée à compter de 2025. Il faut veiller à en assurer la cohérence avec le second marché du carbone de l’UE (SEQE‑UE 2).

La réforme pour une fiscalité verte doit être achevée de façon à accélérer la baisse des émissions et à éviter des distorsions entre les secteurs et les technologies. La mise en place d’une taxe sur les émissions de gaz à effet de serre imputables à la production agricole, actuellement à l’étude, pourrait contribuer à atteindre cet objectif de manière économiquement rationnelle. En effet, les recettes fiscales pourraient être utilisées pour compenser les coûts socio-économiques dans les secteurs à forte intensité d’émission.

La transition vers une économie neutre en carbone suppose d’accélérer l’électrification du mix énergétique et de continuer à développer les capacités de production d’électricité verte. Pour cela, il faut conclure des accords au niveau local et réduire les obstacles administratifs à l’investissement et au développement des infrastructures. Une législation visant à simplifier les procédures de planification et d’autorisation et à donner la priorité aux infrastructures énergétiques par rapport à d’autres projets locaux pourrait considérablement accélérer le déploiement des sources d’énergie renouvelables.

Le vieillissement de la population et la double transition numérique et écologique transforment les emplois et les besoins en compétences, nécessitant des politiques en matière de travail et d’éducation qui soient suffisamment souples. La persistance de pénuries de main-d’œuvre freine la croissance et complique l’offre de services de protection sociale.

Malgré le ralentissement économique et la hausse du taux d’activité et de l’immigration, les difficultés de recrutement persistent et restent relativement importantes dans de nombreux secteurs, comme les soins de longue durée et les TIC (Graphique 3). La mobilisation de la population active est incomplète en raison de facteurs structurels, notamment l’entrée tardive des jeunes sur le marché du travail et les départs en retraite anticipée.

Les politiques d’activation ont montré qu’elles permettaient efficacement d’aider les travailleurs lors des périodes de transition et en cas de choc économique. Les autorités ont annoncé une réforme des services publics de l’emploi visant à réduire le coût des politiques d’activation. Les programmes inefficaces devront être progressivement supprimés. On pourrait envisager de sous-traiter les services de l’emploi à des prestataires privés et de renforcer l’informatisation des services, mais cette réforme devra faire l’objet d’un suivi attentif.

Alléger encore l’imposition du revenu des personnes physiques pour mettre davantage l’accent sur la fiscalité immobilière permettrait de renforcer les incitations au travail. La baisse prévue de l’impôt sur le revenu des personnes physiques constitue un pas dans la bonne direction, mais il faut aller plus loin pour réduire la charge fiscale pesant sur le travail (Graphique 4). Rendre moins favorable le traitement fiscal des propriétaires-occupants aurait pour effet d’améliorer le fonctionnement du marché du logement et permettrait d’abaisser encore les impôts sur le travail.

Il est possible de faciliter le recrutement de travailleurs nés à l’étranger dans les secteurs souffrant de pénurie. Plusieurs mesures d’assouplissement des politiques migratoires ont été prises, ou devraient l’être. Assouplir encore les critères d’admissibilité dans les secteurs en pénurie et rationaliser et alléger les formalités administratives peuvent contribuer à remédier aux problèmes de recrutement les plus urgents.

Une réforme du système éducatif peut accélérer l’entrée des jeunes sur le marché du travail. Limiter comme prévu la durée des allocations très généreuses accordées aux étudiants aidera à abaisser l’âge d’obtention des diplômes. Il faudrait aussi envisager de remplacer les bourses par des prêts remboursables sous condition de revenu pour les étudiants en master, et de cibler sur les élèves ayant les plus gros besoins d’apprentissage la dixième année d’enseignement secondaire du premier cycle, qui n’est pas obligatoire.

Les filières d’enseignement et de formation professionnels (EFP) attirent trop peu d’élèves, alors qu’elles pourraient permettre de répondre aux besoins de compétences. L’absence de passerelles entre les cursus professionnels et universitaires décourage les étudiants, et il serait nécessaire d’élaborer des programmes transfilières. Une pédagogie fondée sur des cas pratiques pourrait sensibiliser les élèves aux débouchés offerts par l’enseignement professionnel.

Les immigrés de deuxième génération sont souvent concentrés dans les mêmes établissements, et ont une plus grande probabilité de quitter prématurément le système scolaire, Sensibiliser davantage les parents immigrés aux différentes possibilités de scolarisation et mettre en place des programmes de la deuxième chance plus efficaces pourrait améliorer la mixité scolaire et réduire les taux de décrochage.