Au cours des deux dernières décennies, et malgré les défis posés par la pandémie de COVID-19, le Togo a connu une croissance économique soutenue, qui a conduit à une réduction de la pauvreté et à une meilleure réponse aux besoins de base. De nouveaux services et activités industrielles émergent, et des investissements dans les infrastructures portuaires ont renforcé la position du Togo comme corridor commercial en Afrique de l’Ouest. Des défis persistent toutefois, notamment une diversification limitée de la production et du commerce, et des niveaux de productivité relativement faibles. Ce rapport décrit les voies stratégiques pour relever ces défis, en mettant l'accent sur la promotion de l'investissement, l'innovation et l'intégration à travers la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) ; le soutien accru des partenaires internationaux ; et la responsabilité du secteur privé. Cet examen est le fruit d'une collaboration entre plusieurs organisations internationales, le gouvernement togolais, le secteur privé et des pairs internationaux du Viet Nam et de Maurice.
Examen des politiques de transformation économique du Togo
Résumé
Synthèse
Le Togo, petite économie d’Afrique de l’Ouest en pleine croissance, a un produit intérieur brut (PIB) de plus de 8.2 milliards de dollars, ce qui en fait la 39ème économie d’Afrique. Il a connu une croissance soutenue, de 5.5 % par an en moyenne au cours de la dernière décennie, ce qui a contribué à la réduction de la pauvreté. Toutefois, le PIB par habitant reste faible par rapport à la moyenne de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
L’agriculture reste l’épine dorsale de l’économie togolaise, contribuant à hauteur de 20 % au PIB et employant 40 % de la main-d’œuvre. Le Togo est le plus grand exportateur de soja biologique vers l’Union européenne, ce qui témoigne de l’essor de ses cultures de rente orientées vers l’exportation. Cependant, l’insécurité alimentaire reste un défi, qui affecte plus de 60 % de la population. Le secteur des services, qui représente 52 % du PIB, s’est considérablement développé, sous l’impulsion des institutions financières et des services publics. L’industrie manufacturière, bien que limitée à 15 % du PIB, est concentrée dans les industries de faible technologie telles que l’agroalimentaire et le textile. La structure économique du Togo reste fragile : 99 % des unités commerciales sont des micro-, petites et moyennes entreprises (MPME) et 85.5 % des entreprises opèrent de manière informelle.
Le Togo exporte principalement des produits de base et des produits agroalimentaires. Le phosphate représentait 14 % de l’ensemble des exportations brutes en 2020-22. Son réseau commercial est limité, les exportations étant principalement destinées à l’Afrique (64 %), suivie de l’Asie (17 %) et de l’Europe (12 %). La plupart des importations proviennent d’Asie, la République populaire de Chine représentant à elle seule 20 %. L’Europe est la deuxième source d’importation.
Classé parmi les pays les moins avancés depuis 1982, le Togo est confronté à plusieurs vulnérabilités, notamment la hausse des températures et l’aggravation des sécheresses, en particulier dans les régions septentrionales. Les risques liés au changement climatique sont importants étant donné la dépendance économique du Togo à l’égard de l’agriculture. En outre, le développement économique est concentré autour de Lomé, la capitale, et le long de la côte. La pauvreté est plus élevée dans les zones rurales (59 %) que dans les zones urbaines (24 %). En outre, le manque d’infrastructures de transport et d’énergie dans les régions les moins favorisées entrave tout effort d’industrialisation. La dépendance énergétique et les coûts élevés de l’électricité rendent le Togo moins compétitif que ses partenaires régionaux comme le Ghana et le Nigéria. L’instabilité régionale ajoute également aux défis de développement du Togo, soulignant sa pertinence stratégique en tant que centre commercial stable en Afrique de l’Ouest.
Corridor commercial historique reliant les pays africains enclavés au reste du monde, le Togo a fait de ses secteurs portuaire et logistique des moteurs de développement économique. Le port en eau profonde de Lomé, qui abrite le port à conteneurs le plus actif de la région, est au cœur du dynamisme économique du Togo. Des améliorations récentes, notamment la création d’un port sec, ont renforcé ses capacités de transbordement : 67 % de ses marchandises sont transférées entre navires. Entre 2021 et 2024, l’efficacité du port s’est améliorée, avec un doublement de la vitesse moyenne de manutention des conteneurs.
Le Togo a progressé dans la numérisation, la vitesse du haut débit passant de 25 Mbps en 2021 à 31.53 Mbps en 2023, désormais à l’égal de celle du Ghana et dépassant celle du Bénin. La couverture du réseau 4G est passée de 7.5 % à 72 % de la population entre 2018 et 2022. En 2022, le gouvernement a lancé la plateforme industrielle d’Adetikopé (PIA) et un port sec. En outre, le gouvernement encourage le développement basé sur l’agriculture avec des plans de construction de 11 agropoles à travers le pays. Le pays investit également pour combler ses lacunes en matière d’infrastructure et d’énergie, l’accès et la connectivité du dernier kilomètre et des zones rurales étant les défis les plus difficiles à relever. Le gouvernement a également amélioré les capacités de l’État, en créant une agence pour le développement agricole, en mettant à jour les cadres juridiques pour l’investissement et en améliorant le système national d’infrastructures de qualité.
Pour parvenir à une prospérité partagée, le Togo doit s’attaquer à ses vulnérabilités structurelles. Le gouvernement s’est engagé dans des réformes visant à transformer l’économie, à favoriser le développement du secteur privé et à assurer une croissance inclusive, comme souligné par la feuille de route gouvernementale (FDR 2025), qui met l’accent sur l’inclusion sociale et le développement industriel. Le gouvernement compte mobiliser l’investissement privé pour financer 80 % des 4.4 milliards USD nécessaires à sa mise en œuvre.
Le Togo a fait ses preuves dans la mise en œuvre de réformes et s’est forgé une réputation de partenaire fiable sur les marchés internationaux. Pour réussir en tant que petite économie d’un continent émergent, et fort d’aspirations claires, le Togo doit donner la priorité à l’articulation des politiques publiques et construire des alliances. Cinq actions sont essentielles pour accélérer les progrès et garantir un développement inclusif et durable :
Donner la priorité à un développement inclusif et local. Pour atteindre ses objectifs en la matière, le Togo doit continuer à moderniser l’État en renforçant les capacités de planification, de gestion et de mise en œuvre dans tous les ministères et à tous les niveaux du gouvernement ; encourager le développement des infrastructures dans les zones rurales ; et améliorer sa capacité à favoriser l’inclusion des jeunes ainsi que l’engagement des communautés locales.
Diversifier et améliorer la production nationale, en attirant davantage d’investissements étrangers (IDE) – dont le stock a augmenté depuis 2000 mais reste inférieur à la moyenne africaine – notamment dans les secteurs d’avenir, et en diversifiant leur provenance.
Investir dans l’innovation pour accroître la productivité. La stratégie nationale (FDR 2025) n’alloue que 0.1 % des investissements à l’innovation. Le Togo doit renforcer ses politiques d’innovation par le biais de services de vulgarisation modernisés, de partenariats internationaux ciblés et d’un fonds national d’innovation dédié.
Capitaliser sur la numérisation et la création de start-ups. Les technologies numériques peuvent stimuler la productivité, accroître la capacité de gestion des risques et améliorer la transparence, la responsabilité et l’efficacité du gouvernement. La scène naissante des start-ups togolaises doit être soutenue pour donner naissance à un écosystème efficace.
Renforcer les partenariats internationaux et continentaux. Pour tirer le meilleur parti de la ZLECAf, le Togo doit adopter une stratégie ciblée, en misant sur le port de Lomé comme atout continental. En tant que petite économie, le pays court le risque d’être marginalisé dans les grands plans d’investissement et partenariats internationaux : un programme de diplomatie économique bien conçu est donc nécessaire pour que le Togo reste une priorité des partenaires internationaux, et favoriser une meilleure coordination entre eux. Ces partenaires sont essentiels pour l’investissement, le partage du savoir-faire et des technologies, ainsi que pour les partenariats industriels visant à co-créer des capacités locales.
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