Perspectives de l'OCDE sur la politique de la réglementation 2025

Dans le monde entier, les pouvoirs publics sont placés face à une multiplicité de défis exigeant de leur part une action qui doit parfois être menée sur le terrain réglementaire. Cette action réglementaire doit être conduite avec efficience et efficacité. Elle doit répondre aux maîtres mots suivants : l’intelligence, la simplification et la rationalisation. Dans l’environnement actuel, qui est fortement évolutif, il existe de nombreux domaines où la réglementation est jugée inutilement lourde pour les citoyens et les entreprises. Il existe aussi des domaines où la faible mise en application des règles soulève des interrogations quant à l’aptitude des pouvoirs publics à agir avec efficacité et à protéger les citoyens, les consommateurs et l’environnement. Dans ce contexte, les pouvoirs publics doivent redoubler d’efforts pour mieux concevoir, mettre en place et passer en revue les règles, de façon à permettre à chacun d’exprimer son potentiel tout en tenant compte des risques susceptibles de peser sur la société. Cette action réglementaire plus robuste, mais aussi plus judicieuse, sera décisive non seulement pour concevoir et mettre en œuvre de bonnes politiques, mais aussi pour renforcer la confiance à l’égard des institutions publiques.

Cette quatrième édition des Perspectives de l’OCDE sur la politique de la réglementation examine en quoi la réforme de la réglementation peut favoriser la mise en place de règles plus efficaces au service des citoyens, de la planète et de l’avenir. On trouvera aussi dans ces Perspectives des profils par pays qui retracent les progrès récents et qui mettent en relief les domaines dans lesquels les systèmes et processus réglementaires des Membres de l’OCDE présentent encore une marge de progression.

Les pouvoirs publics exercent leur action réglementaire à la fois pour et avec les citoyens : l’objectif de cette action est de protéger les citoyens, et ensemble avec ces derniers renforcer la qualité réglementaire. Faire participer les citoyens au processus normatif permet d’améliorer la qualité des textes et de mieux faire comprendre leurs objectifs à la population. Il en découle une plus grande adhésion au projet de réglementation, ainsi qu’un plus grand respect du texte une fois celui-ci adopté. Le présent rapport montre qu’une évolution positive est en cours : les pouvoirs publics continuent d’améliorer leurs pratiques d’association des parties prenantes, recourant par exemple de plus en plus à des outils numériques pour inviter les citoyens à fournir des éléments probants sur l’impact des règles. De plus, les Membres de l’OCDE ont de plus en plus tendance à fixer des délais minimaux de consultation (c’est le cas de plus de 75 % d’entre eux) et à allonger la durée des périodes de consultation (fixée à un minimum de quatre semaines chez 49 % d’entre eux).

Malgré ces progrès, il convient d’aller plus loin. Pour commencer, il convient de fournir systématiquement aux parties prenantes un retour d’information sur la contribution qu’elles ont apportée aux décisions prises sur le terrain de la réglementation. À l’heure actuelle, seuls 33 % des Membres de l’OCDE fournissent un retour d’information direct aux parties prenantes, laissant ainsi passer une occasion de donner plus de sens à l’exercice, et prenant le risque de dissuader les citoyens d’y participer de nouveau. Il est également nécessaire de diversifier le profil des citoyens qui sont associés à l’action réglementaire, pour gagner en inclusivité et pour éviter tout abus d’influence susceptible de se produire dans le cadre de consultations plus restreintes.

Pour mener une meilleure action réglementaire au service des citoyens et pour lutter contre les inégalités, il convient que les pouvoirs publics évaluent plus systématiquement l’impact de la réglementation sur les différents groupes sociaux. Il convient aussi qu’ils tiennent compte de la charge réglementaire. Enfin, les règles et la prestation des services publics doivent être aussi simples que possible, afin de réduire les coûts et les sources de mécontentement aussi bien pour les particuliers que pour les chefs d’entreprise.

La transition écologique ne pourra être réalisée qu’avec des règles de meilleure qualité et mieux adaptées. La première étape consiste à associer les parties prenantes pour analyser les différentes conséquences des risques écologiques et pour surmonter l’éventuelle résistance aux politiques et textes de protection de l’environnement. Le présent rapport dresse le constat qu’à l’échelon national, tous les Membres de l’OCDE font davantage d’efforts pour prendre en compte l’impact écologique des règles. Toutefois, cette prise en compte porte principalement sur les règles de protection de l’environnement en elles-mêmes, plutôt que sur les conséquences potentielles pour l’environnement des règles adoptées dans les autres secteurs. De fait, seuls 21 % des Membres de l’OCDE ont passé en revue leurs règles existantes sous l’angle de la protection de l’environnement. Pour que les règles favorisent activement la transition écologique, il est crucial de pousser plus loin ces examens afin de prendre en compte les répercussions locales et plus générales de la pollution, les émissions de carbone et la biodiversité.

Dans certains cas, la transition écologique est entravée par un patchwork complexe de règles où coexistent des doublons et des lacunes. Les Membres de l’OCDE ont commencé à progresser dans l’adoption d’approches environnementales fondées sur les risques, notamment sur les plans de l’attribution des permis, de la promotion du respect des règles et de la coordination des inspections. L’adoption systématique de ces pratiques constituera la prochaine étape pour réduire la complexité de la réglementation. Enfin, pour mieux protéger l’environnement, il conviendra de doter les régulateurs des secteurs de réseau tels que l’énergie, les transports, l’eau et les communications électroniques d’objectifs et de pouvoirs clairs en matière de transition écologique.

Le progrès technologique — qu’il s’agisse de l’intelligence artificielle, de l’internet des objets, de l’informatique quantique ou des neurotechnologies — va continuer de transformer fondamentalement nos sociétés. Il s’accompagne d’avantages massifs pour les citoyens, la société et les économies, mais aussi de risques et de préjudices. Les cadres réglementaires actuels peinent souvent à suivre le rythme des progrès technologiques, et ils se heurtent à certains problèmes tels que le chevauchement des ressorts territoriaux, le morcellement juridique et l’obsolescence des règles. Pour mieux accompagner l’innovation tout en maîtrisant les risques, les pouvoirs publics doivent adopter des approches fondées sur l’adaptation et l’apprentissage, et recourir à la veille et à la prospective stratégiques pour renforcer la gouvernance anticipative. Des dispositifs institutionnels solides sont importants pour créer un environnement réglementaire plus cohérent et réactif, propre à favoriser une activité normative et une mise en application robustes. Le renforcement des ressources, des aptitudes et de l’expertise des institutions permettra de les doter de connaissances cruciales pour superviser et accompagner les évolutions technologiques tout en assurant une protection suffisante aux citoyens.

Le présent rapport met aussi en relief des exemples positifs de mise à profit des nouvelles technologies par des administrations et des régulateurs pour leur propre usage. Ainsi, certaines institutions recourent à des technologies numériques pour suivre l’impact des textes avec plus d’efficience et d’efficacité, pour réagir plus rapidement face aux risques émergents et pour améliorer globalement les retombées de l’action réglementaire.

Les textes ont d’autant plus de chances d’être efficaces qu’ils sont fondés sur un socle robuste d’éléments probants. Les pouvoirs publics tiennent désormais mieux compte des éléments probants dans leurs décisions et, dans le cadre de l’utilisation d’outils tels que l’analyse d’impact de la réglementation, ils exigent désormais la prise en compte de davantage de considérations sociales et environnementales, aux côtés des considérations d’ordre économique. Toutefois, bien concevoir les règles ne suffit pas : encore faut-il bien assurer leur mise en œuvre. Chez la plupart des Membres de l’OCDE, il serait possible d’assurer encore mieux le respect des textes et l’obtention des retombées souhaitées, grâce à une mise en application fondée sur les risques. À l’heure actuelle, plus de la moitié des Membres de l’OCDE ne permettent pas aux régulateurs de fonder leurs activités de mise en application sur des critères liés aux risques. Pour favoriser une prise de décision fondée sur des éléments probants, il est nécessaire de mettre en place une bonne conception des textes et une bonne prestation de l’action réglementaire, ce qui implique une dotation suffisante en ressources, en aptitudes et en capacités.