La pandémie de COVID-19 a déclenché une crise sanitaire mondiale sans équivalent de mémoire d’homme. Son retentissement sur l’économie et les sociétés du monde entier a été à la fois profond et massif. Le choc initial a frappé de vastes pans de l’économie, la crainte de la contagion et les restrictions rigoureuses à l’appui de la distanciation physique ayant mis l’activité économique en veille dans de nombreux pays. À mesure que les populations et les pouvoirs publics ont appris à vivre avec le virus, les comportements se sont adaptés et les restrictions sont devenues plus sélectives. Si bon nombre de salariés ont ainsi pu retourner au travail, d’autres ont continué de souffrir de la situation. Ce chapitre rend compte de l’incidence de la crise du COVID‑19 sur le marché du travail, ainsi que des problèmes qui continuent de surgir. Il attire l’attention sur les groupes qui lui ont payé le plus lourd tribut, laissant entendre qu’un soutien plus important et durable pourrait s’avérer nécessaire.
Perspectives de l'emploi de l'OCDE 2021

1. Évolutions du marché du travail : le déroulement de la crise du COVID‑19
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En bref
Copier le lien de En brefPrincipaux résultats
Le choc initial de la crise du COVID‑19 a frappé des pans entiers de l’économie, les restrictions rigoureuses à l’appui de la distanciation physique et la crainte de la contagion ayant mis en veille une bonne part de l’activité dans les pays de l’OCDE. La plupart des pays ont maintenant subi plusieurs vagues de la pandémie, qui ont fait des victimes toujours plus nombreuses. Par ailleurs, à mesure que les pouvoirs publics et les populations ont appris à mieux connaître le virus et à vivre avec lui, les restrictions ont été quelque peu assouplies et nettement plus sélectives. Nombre de salariés ont ainsi pu reprendre le travail, et l’épicentre de la crise s’est précisé. À l’heure d’aborder la reprise économique, il importe de recenser ceux qui ont été le plus violemment atteints, mais aussi ceux pour qui le retour à la normale risque d’être le plus long. Selon les dernières données disponibles au moment d’écrire ces lignes, on constate ce qui suit :
Un an après le début de la crise, le nombre d’heures travaillées demeure nettement inférieur à celui enregistré auparavant. En mars 2021, il était encore inférieur de 7 % au niveau de décembre 2019, en moyenne, dans les dix pays pour lesquels on dispose de statistiques actualisées. Ce chiffre représente la moitié de celui observé au creux de la crise, au deuxième trimestre de 2020, quand le nombre total d’heures travaillées a chuté de plus de 15 % dans l’OCDE.
Les retombées inédites de la crise sur le marché du travail ont été en grande partie déterminées par les politiques publiques. Si les mises à pied temporaires généralisées ont gonflé les chiffres du chômage aux États-Unis et au Canada, faisant grimper les taux de l’OCDE de 3 % en un mois à peine, ailleurs, les réductions du temps de travail financées par l’État ont en grande partie absorbé le sous-emploi. En effet, dans l’OCDE, les dispositifs de réduction du temps de travail mis en place pour les salariés qui ont conservé leur emploi ont compté pour près des trois quarts de la baisse du nombre d’heures travaillées. Par ailleurs, de nombreuses personnes se sont retirées du marché du travail, amplifiant le nombre d’inactifs à l’heure où la crainte de l’infection et les sollicitations domestiques croissantes (pour les parents de jeunes enfants notamment) rendaient la recherche d’emploi difficile.
Étant donné son caractère fortement sectoriel, la crise a essentiellement frappé certaines catégories de la population tandis que d’autres, qui en ont moins souffert, ont en outre bénéficié plus rapidement de la reprise. Le nombre d’heures travaillées dans les professions faiblement rémunérées a chuté de plus de 28 % dans l’OCDE - recul supérieur de 18 points de pourcentage à celui enregistré dans les professions très rémunératrices. L’effet de la crise sur les heures travaillées des salariés qui ont un faible niveau d’études a été près de trois fois supérieur à celui qu’ont ressenti les personnes très instruites.
Les ravages provoqués par la crise ont tout particulièrement touché les jeunes. Le chômage des jeunes dans l’OCDE a bondi au début de la pandémie ; leur nombre d’heures travaillées a fléchi de plus de 26 % - près du double du recul enregistré chez les travailleurs d’âge très actif et seniors (15 %). De nombreux jeunes - qui travaillent souvent en contrat précaire dans des secteurs durement atteints - ont perdu leur emploi ; ceux qui étaient sur le point d’entrer sur le marché du travail à l’issue de leurs études ont pour leur part peiné à trouver un emploi compte tenu du faible nombre de postes à pourvoir. Le taux de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif a par conséquent augmenté au début de la pandémie, inversant ainsi la tendance observée depuis une dizaine d’années. Fin 2020, la proportion des 15-29 ans sans emploi et sortis du système éducatif s’élevait à 12 %, soit un point de pourcentage de plus qu’en 2019.
Malgré la mise en place généralisée de dispositifs de maintien dans l’emploi, l’ajustement s’est en grande partie opéré par le biais d’une baisse de l’emploi parmi les salariés peu qualifiés, les professions peu rémunérées, et les jeunes. De fait, parmi les peu qualifiés, la moitié du nombre d’heures de travail perdues au deuxième trimestre de 2020 par rapport au même trimestre de 2019 est due à la montée du non-emploi. À l’inverse, la baisse des heures travaillées par les salariés très qualifiés tient en quasi-totalité à la réduction du temps de travail et n’a eu aucun effet sur le chômage. La reprise a de ce fait été limitée pour les peu qualifiés, même dans les cas où bon nombre de ceux qui avaient vu leurs heures réduites ont été en mesure de retourner au travail au troisième trimestre de 2020. De même, alors que les réductions du temps travail sont à l’origine d’un peu plus de 40 % du recul du nombre d’heures travaillées des jeunes, ce chiffre atteint près de 80 % chez les salariés d’âge très actif et seniors. Cette situation devrait profondément influer sur la rapidité de la reprise de l’emploi chez les jeunes.
La première vague de la crise a atteint de manière disproportionnée les travailleurs temporaires. Et si, au cours de la période d’incertitude engendrée par la deuxième vague, la situation des titulaires de contrats temporaires a été relativement plus favorable, l’incidence de la crise sur les travailleurs occupant des emplois atypiques, qu’ils soient temporaires ou indépendants, a des conséquences substantielles sur la sécurité de leur revenus et leur bien-être. En effet, ceux-ci sont généralement moins bien couverts par les dispositifs de maintien dans l’emploi et d’assurance-chômage.
Un an et demi après le début de la crise, nombreux sont ceux qui ne sont pas encore revenus au plein emploi. Dans de nombreux pays de l’OCDE, les taux d’emploi devraient rester à des niveaux inférieurs à ceux constatés avant la crise jusqu’à la fin de 2022 au moins. Avec le retrait progressif et le ciblage plus précis des dispositifs de soutien, d’autres emplois risquent de disparaître. De même, dans les pays qui ont essentiellement eu recours aux dispositifs de chômage partiel, les employeurs risquent de ne pouvoir réintégrer bon nombre des salariés qui comptent encore retrouver leur emploi. Plus le temps passe, plus les travailleurs qui n’ont pas réintégré leur emploi risquent de se retrouver en situation de chômage déclaré.
Ceux qui ont perdu leur emploi au début de la pandémie pourraient connaître une situation encore plus défavorable, et le marché du travail demeure exposé au risque d’une montée rapide du chômage de longue durée. Le nombre des travailleurs sans emploi depuis le début de la crise augmente dans la plupart des pays. Lorsque la recherche d’emploi reprendra, la majorité d’entre eux n’auront pas travaillé depuis plus d’un an. Même si les perspectives économiques sont dans l’ensemble plus engageantes dans de nombreux pays, un fossé pourrait bien se créer entre ceux qui ont continué de travailler et ceux qui ont perdu leur emploi et des revenus. En parallèle, l’écart risque de se creuser entre ceux qui ont surmonté la crise grâce aux dispositifs de réduction du temps de travail et à de courtes périodes de chômage partiel et ceux qui ont perdu leur emploi - qui sont de plus en plus éloignés de la vie active, épuisent leurs droits à prestations et risquent de souffrir de séquelles durables. À la fin de 2020, le nombre de personnes restées au moins six moins au chômage était supérieur de 60 % à celui constaté avant la crise, et ce chiffre a continué de croître durant les premiers mois de 2021.
Malgré les retombées substantielles de la pandémie sur l’emploi et les salaires, les gouvernements de l’OCDE sont parvenus à préserver le revenu des ménages moyennant des aides d’envergure et généralisées. De fait, entre le quatrième trimestre de 2019 et le deuxième trimestre de 2020, malgré un recul de 12.4 % du PIB par habitant dans la zone OCDE, le revenu disponible brut réel des ménages a augmenté dans la plupart des pays et a progressé de 3.7 % dans l’ensemble de l’OCDE sous l’effet des aides publiques massives mises en place pour faire face au COVID‑19. Quoi qu’il en soit, si ces mesures, rapidement conçues et appliquées, ont dans l’ensemble fortement contribué à préserver le bien-être économique des ménages, il ressort de données provisoires que certaines catégories de la population ont été précarisées et démesurément exposées au risque de perte d’emploi et de revenus.
Les répercussions de la crise sur le marché du travail ne se sont pas encore pleinement manifestées. Au final, l’ampleur de la destruction nette d’emplois dépendra sans doute de la durée des restrictions, mais aussi des attentes et des évolutions à long terme des technologies et de la demande des consommateurs. Des données provisoires permettent de penser que les restructurations engagées par les entreprises accélèrent les tendances préexistantes, comme l’automatisation, la numérisation et l’accroissement de la demande de personnel spécialisé dans les secteurs verts et dans celui de la santé. Ce phénomène modifie en profondeur les modes de production des entreprises et la façon dont elles associent travail humain et nouvelles technologies. Les pouvoirs publics doivent maintenant donner priorité au développement des compétences et à la reconversion des travailleurs que la pandémie a le plus durement éprouvés et qui devraient avoir le plus de difficultés à retrouver un emploi durable de qualité.
Alors que de nombreux pays de l’OCDE se préparent à aborder la reprise, de nombreux pays émergents et en développement demeurent confrontés à un nombre élevé de nouveaux cas de COVID‑19 et à des difficultés pour vacciner leur population. Cette situation vient brutalement rappeler l’effet potentiel des nouveaux variants et la nécessité d’une coopération internationale, mais aussi le fait que, compte tenu des relations étroites entre pays, la pandémie ne prendra pas fin tant qu’une forte proportion de la population mondiale ne sera pas vaccinée.
Introduction
Copier le lien de IntroductionPrès d’un an et demi après le début de la crise économique déclenchée par la pandémie du COVID‑19, une lueur est enfin visible au bout du tunnel. Néanmoins, alors même que l’activité redémarre dans l’OCDE, les marchés du travail sont confrontés à des problèmes colossaux. Au fil de la crise, les catégories les plus atteintes par ses effets cataclysmiques ont varié. Certaines, notamment les salariés occupant des emplois peu rémunérateurs, les peu qualifiés, et les jeunes, sont cependant restées dans l'œil du cyclone. Ces groupes ont non seulement été les plus touchés par les réductions d’heures travaillées, mais l’ont plus souvent été sous forme de chômage.
La nature et la rapidité de la reprise du marché du travail seront sans doute déterminées par divers facteurs : le nombre d’emplois actuellement « gelés » que l’état d’urgence sanitaire et la crise économique détruiront à terme, entraînant un nouvel accroissement des pertes d’emplois parmi les salariés en mise à pied temporaire ou en horaires réduits ; la facilité avec laquelle ceux qui sont devenus inactifs peuvent réintégrer la vie active ; et , pour finir, l’ampleur des créations d’emplois pour satisfaire aux besoins du nombre grandissant de personnes actuellement sans travail.
Ce chapitre examine les effets actuels de la crise du COVID‑19 sur le marché du travail, et les problèmes qui continuent de surgir. Il braque les projecteurs sur les groupes qui lui ont payé un lourd tribut et met en évidence les domaines dans lesquels un soutien plus important et durable sera éventuellement nécessaire. Le chapitre est structuré comme suit : la section 1.1 présente brièvement le déroulement de la crise et les mesures d’endiguement. Elle décrit la manière dont l’activité s’est adaptée aux restrictions à mesure que les autorités et les populations des pays de l’OCDE ont appris à mieux connaître le virus et à vivre avec lui. La section 1.2 s’intéresse pour sa part au marché du travail ; elle examine l’incidence du chômage et la dynamique des heures de travail aux diverses phases de la crise et met en lumière les problèmes qui continuent de surgir sur ce marché. La section 1.3 se penche sur les catégories de la population qui ont le plus souffert de la crise du point de vue de l’emploi. Elle analyse dans quelle mesure la perte d’heures de travail ou d’emplois a touché chacun de ces groupes, et en quoi cette situation peut influer sur la rapidité de la reprise. Enfin, la section 1.4 passe en revue les données disponibles concernant l’accélération de changements structurels au long cours durant la crise et leur incidence sur le monde du travail, et analyse le rôle stratégique que joueront pendant la reprise les mesures en matière de développement des compétences et de reconversion destinées aux personnes vulnérables.
1.1. Le déroulement de la crise
Copier le lien de 1.1. Le déroulement de la criseLorsque la pandémie s’est déclenchée, au début de 2020, la plupart des pays ont été pris au dépourvu par la rapidité de sa propagation, l’ampleur de ses conséquences, et la durée de la lutte contre le virus. Alors même que la reprise est amorcée, malgré quelques complications dues à de nouvelles vagues de contamination, l’incidence durable de la pandémie sur les marchés du travail et les niveaux de vie dans l’OCDE pourrait encore nous surprendre.
1.1.1. L’évolution de la crise
En mars 2020, la rapidité et l’ampleur du choc provoqué par la pandémie ont précipité l’économie mondiale dans une grave récession. Les mesures d’endiguement rigoureuses et les directives comportementales mises en œuvre pour juguler la contagion ont eu de profondes conséquences économiques, mais n’étaient pas censées durer (Graphique 1.1). La propagation du virus s’est d’abord traduite par un choc d’offre international - du fait que les travailleurs étaient en quarantaine ou malades, empêchés de se rendre au travail ou assujettis à un confinement, et que les entreprises ont été contraintes (ou ont choisi) de suspendre leur activité. Avec la chute des revenus et la baisse de la consommation et de l’investissement due à une incertitude croissante, ce choc s’est cependant rapidement propagé à la demande.
Graphique 1.1. L’évolution de la crise
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Au départ, un rétablissement rapide était espéré. De fait, au cours du troisième trimestre de 2020, de nombreux pays ont assoupli leurs mesures de distanciation physique et commencé à organiser le retrait progressif des mesures de soutien (Graphique 1.2). Cet optimisme initial, conjugué à la réouverture des économies, a entraîné un net rebond du PIB au 3e trimestre (Graphique 1.3, partie B). Dès la fin de l’année, il s’était toutefois dissipé. La découverte de nouveaux variants partout dans le monde et la recrudescence du nombre de cas ont amené de nombreux pays de l’OCDE - dans l’hémisphère nord notamment - à restaurer des mesures d’endiguement rigoureuses, voire de confinement. Cette deuxième vague a cependant eu des retombées nettement moins homogènes que celle qui était intervenue au cours des deux premiers trimestres de 2020. De fait, alors que la reprise a fait long feu en Europe, où des mesures draconiennes ont été rétablies, elle s’est poursuivie tout au long du deuxième semestre de 2020 (Graphique 1.3, partie B) dans des pays comme l’Australie et le Japon (où la deuxième vague ne s’est jamais matérialisée - Graphique 1.3, partie A) et, dans une moindre mesure, au Canada et aux États-Unis (où elle s’est manifestée plus tard)1.
Graphique 1.2. Évolution des mesures de restriction
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1. L’étendue des mesures de restriction varie sensiblement à l’intérieur des pays. Dans certains, par exemple, les universités n’ont pas fermé en même temps que les écoles primaires, qui ne sont restées ouvertes que pour les enfants des travailleurs essentiels. Ces questions créent des difficultés substantielles d’évaluation aux fins de comparaison systématique des ripostes nationales à la pandémie (Hale et al., 2020[1]). Le graphique ci-dessus transforme les chiffres ordinaux de Hale et al. (2020[2]) en variables binaires comme suit : une valeur de 1 est assignée aux fermetures d’écoles si celles-ci sont imposées partiellement (établissements secondaires uniquement) ou à l’échelon national ; aux restrictions à la taille des rassemblements si ceux-ci sont limités à moins de 10 personnes ; à la mise à l’arrêt des transports publics si celle-ci est imposée, et pas seulement recommandée ; aux confinements à domicile si les sorties sont interdites ou limitées à l’exercice quotidien, aux courses alimentaires, etc. Qui plus est, le degré de fermeture varie parfois d’une région à l’autre dans un pays. Les variables binaires sont basées sur les conditions les plus rigoureuses en place dans chaque pays au cours d’un mois donné.
2. Les données permettent d’observer la variation des visites (ou du temps passé) dans les lieux catégorisés par rapport à un (des) jour(s) de référence. Le jour de référence est la valeur médiane de l’OCDE pour la période de cinq semaines comprise entre le 3 janvier et le 6 février 2020 (voir https://support.google.com/COVID-19-mobility/answer/9824897?hl=en&ref_topic=9822927).
Source : Université d’Oxford, COVID‑19 government response tracker, https://www.bsg.ox.ac.uk/research/research-projects/coronavirus-government-response-tracker#data et données Google Mobility.
Graphique 1.3. Évolution des retombées de la crise et des mesures d’endiguement
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Source : Partie A : Université d’Oxford, COVID 19 government response tracker, https://www.bsg.ox.ac.uk/research/research-projects/coronavirus-government-response-tracker#data. Partie B : base de données de l’OCDE sur les comptes nationaux.
Source : Partie A : Université d’Oxford, COVID‑19 government response tracker, https://www.bsg.ox.ac.uk/research/research-projects/coronavirus-government-response-tracker#data. Partie B : base de données de l’OCDE sur les comptes nationaux.
À mesure que la pandémie a progressé et que les scientifiques ont mieux compris son mode de transmission, le ciblage des interventions non pharmaceutiques s’est précisé. Les contractions de l’activité qui ont accompagné les deuxième et troisième vagues de restrictions ont été plus modérées et moins uniformes que celles observées au deuxième trimestre de 2020 (Graphique 1.2)2. Elles ont également été associées à des changements de comportement plus limités (utilisation des transports publics par exemple). Néanmoins, étant donné le prolongement de la crise, le retard risque d’être plus dur à rattraper. Les responsables publics sont désormais conscients des dangers d’un assouplissement rapide des restrictions et de nombreux citoyens, après une année de précautions draconiennes, s’inquiètent d’une reprise rapide de l’activité économique. Dans le même temps, bien que les aides publiques massives et généralisées aient permis d’éviter des faillites, la pérennisation de la crise a mis à rude épreuve de nombreuses entreprises, et d’autres licenciements risquent d’intervenir lorsque les aides seront retirées.
1.1.2. Perspectives à court terme
Le déploiement des vaccins pour combattre le virus procure une plus grande certitude, favorisant la réouverture de la plupart des pays de l’OCDE. En parallèle, des mesures toujours plus ciblées et efficaces visant à juguler la propagation du virus et les nouvelles aides budgétaires d’envergure accordées par de nombreux pays ont, une fois encore, ranimé l’espoir d’une fin prochaine de la pandémie. Cet optimisme renouvelé transparaît dans les prévisions de l’OCDE (2021[3]) selon lesquelles la croissance du PIB atteindra 5.75 % en 2021 et 4 % en 2022 dans ses pays membres. Le PIB par habitant ne devrait cependant pas retrouver le niveau affiché avant la pandémie avant 2022 dans la majorité de ces pays et, dans certains d’entre eux, le retour complet à la normale est encore plus éloigné.
Les perspectives économiques demeurent incertaines. La vaccination est au point mort dans plusieurs pays, les pénuries de doses, les retards logistiques et le scepticisme de certaines populations freinant son déploiement au premier semestre de 2021. Par conséquent, les mesures d’endiguement rigoureuses demeurées en place dans certains pays durant cette période risquent de peser, à court terme, sur la reprise - en particulier dans le secteur des services. L’évolution de nouveaux variants du virus partout dans le monde continue de modérer l’optimisme prudent de nombreux pays de l’OCDE à l’heure où ils prévoient une réouverture graduelle de leurs économies. En même temps, des incertitudes subsistent quant à l’ampleur des difficultés financières auxquelles sont confrontés les employeurs - les petites et moyennes entreprises notamment (voir par exemple Hadjibeyli, Roulleau et Bauer (2021[4])). Par ailleurs, bien que ces perspectives plus favorables s’étendent au marché du travail (voir la section 1.2), il ne faudra pas perdre de vue les conséquences sans doute durables de la crise, même lorsque les taux de chômage diminueront.
1.2. L’incidence évolutive de la crise sur le marché du travail
Copier le lien de 1.2. L’incidence évolutive de la crise sur le marché du travail1.2.1. Plusieurs pays ont accusé une hausse prononcée du chômage après le déclenchement de la pandémie
La crise du COVID‑19 a profondément bouleversé les marchés du travail dans l’OCDE. En avril 2020, suite à l’irruption de la crise, le taux de chômage de l’OCDE a enregistré une hausse sans précédent de 3 points de pourcentage, atteignant 8.8 % - le taux le plus élevé observé depuis dix ans (Graphique 1.4). En un mois à peine, tous les progrès réalisés depuis la crise financière ont été réduits à néant. Cette flambée du chômage tient en grande partie aux hausses substantielles observées dans des pays comme les États-Unis et le Canada, où le recours massif aux mises à pied temporaires a gonflé les chiffres à mesure que les entreprises fermaient et envoyaient leurs salariés se mettre à l’abri du virus chez eux3. Rien qu’aux États-Unis, en un mois seulement, le nombre de chômeurs a enflé de près de 16 millions pour atteindre plus de 23 millions en avril 2020 (voir la Graphique 1.1 ci-dessous). Ce chiffre a ensuite chuté, diminuant de plus de moitié au cours des six mois suivants, à mesure que l’activité économique redémarrait et que les entreprises rappelaient leurs salariés (Graphique 1.5).
Graphique 1.4. Évolution du chômage dans certains pays
Copier le lien de Graphique 1.4. Évolution du chômage dans certains paysPourcentage de la population active, corrigé de la saisonnalité

Note : « Zone Euro » désigne les19 pays membres de l’UE qui font partie de la zone euro.
Source : Base de données des statistiques du marché du travail à court terme de l’OCDE.
Graphique 1.5. Chômage, avant la crise, niveau maximal, derniers chiffres
Copier le lien de Graphique 1.5. Chômage, avant la crise, niveau maximal, derniers chiffresPourcentage de la population active, corrigé de la saisonnalité

Note : * les derniers chiffres sont ceux d’avril 2021 pour le Chili, le Costa Rica et la Turquie, de mars 2021 pour le Royaume-Uni et de novembre 2020 pour la Norvège. Le niveau maximal correspond à avril 2020 aux États-Unis, à mai 2020 au Canada, en Colombie, au Luxembourg et en Slovénie, à juin 2020 en Autriche, au Chili, au Costa Rica, en Grèce, en Hongrie, en Lettonie et au Mexique, à juillet 2020 en Australie, au Danemark et en Turquie, à août 2020 en Allemagne, en Espagne, en Finlande, en France, en Norvège, aux Pays-Bas, au Portugal et en République slovaque, à septembre 2020 en Estonie et Lituanie, à octobre 2020 au Japon, à novembre 2020 au Royaume-Uni, à janvier 2021 en Corée, à mars 2021 en Belgique, en Islande en Pologne, en République tchèque et en Suède, à avril 2021 en Irlande et en Italie et à mai 2021 en Israël.
Source : Base de données des statistiques du marché du travail à court terme de l’OCDE.
Ailleurs dans l’OCDE (notamment dans les pays qui ont fait amplement appel aux dispositifs de maintien dans l’emploi qui permettent aux employeurs de réduire le coût de la main d’œuvre en diminuant le nombre d’heures de travail des salariés maintenus en poste - voir le chapitre 2), malgré la hausse du chômage, le nombre de demandeurs d’emploi n’a que modérément augmenté en regard de l’ampleur du choc : il n’a en effet progressé que d’un point de pourcentage dans la majorité des pays au cours de 2020 (voir l’Encadré 1.1 pour une présentation détaillée de la comparabilité des chiffres du chômage)4.
1.2.2. Pendant la crise du COVID‑19, le sous-emploi de la main d’œuvre a pris des formes diverses
Les chiffres du chômage, bien que parfois saisissants, ne rendent pas pleinement compte de l’incidence de la crise du COVID‑19 sur les marchés du travail ; le chômage n’est que l’une des formes du sous-emploi de la main d'œuvre. Cela tient à la spécificité du choc et aux mesures inédites adoptées pour soutenir les entreprises, l’emploi et les populations (voir OCDE (2020[5]) et les chapitres 2 et 3). Outre les chômeurs, de nombreux citoyens, actifs ou pas, auraient souhaité plus d’emplois, soit parce qu’ils ne travaillaient que quelques heures, soit parce qu’ils n’avaient pas d’emploi mais n’étaient pas disponibles pour en chercher un et travailler - conditions nécessaires pour être considéré chômeur.
Encadré 1.1. Mise en garde concernant la comparabilité des chiffres du chômage et d’autres données relatives à la population active
Copier le lien de Encadré 1.1. Mise en garde concernant la comparabilité des chiffres du chômage et d’autres données relatives à la population activeLes évolutions considérablement hétérogènes du chômage pendant la crise s’expliquent en partie par la diversité des politiques adoptées par les pays pour amortir ses retombées économiques et sociales. Alors que les États-Unis et le Canada ont amplement fait appel au régime normal d’assurance-chômage pour garantir un revenu aux personnes qui avaient perdu leur emploi, même si c’était par le biais de mises à pied temporaires, de nombreux autres pays de l’OCDE ont privilégié les dispositifs de maintien dans l’emploi - qui permettent aux employeurs de réduire leurs coûts de main d'œuvre en diminuant le nombre d’heures de travail des employés maintenus en poste (chapitre 2).
En parallèle, divers éléments d’ordre technique amènent à interpréter avec prudence les chiffres du chômage pendant la pandémie du COVID‑19.
Problèmes d’échantillonnage liés aux aspects pratiques de la réalisation d’enquêtes durant une pandémie : partout dans le monde, la crise du COVID‑19 a créé des obstacles très concrets à la production de statistiques du marché du travail. Les centres d’appel fonctionnaient à plus faible capacité, et il était impossible de mener des entretiens en face à face. Le taux de réponse a par conséquent chuté dans plusieurs pays. On craint notamment que le taux de non-réponse n’ait créé un biais dans la mesure où il concerne essentiellement certaines populations. Au Royaume-Uni, par exemple, on a constaté que le recours aux entretiens téléphoniques dans le cadre de l’enquête sur la population active durant la pandémie avait davantage augmenté le taux de non-réponse des ménages locataires que celui des ménages propriétaires occupant leur logement (Office of National Statistics du Royaume-Uni (2020[6])). Cette non-réponse sélective aura altéré l’échantillon de nombreuses populations surreprésentées parmi les locataires.
Les différences dans la classification de la réduction du temps de travail ou de mis à pied temporaires peuvent compromettre la comparabilité1 :
Entre pays : dans les pays européens, les salariés déclarant une absence temporaire du travail au motif d’un chômage partiel pour raisons techniques ou économiques étaient, jusqu’en janvier 2021 (voir plus loin), considérés comme des « employés » (non présents sur site) dans les cas suivants : i) la durée totale prévue de leur absence était inférieure à trois mois2 ; ii) leur employeur continuait de leur verser la moitié au moins de leur salaire (voir Eurostat (2016[7]))3. En conséquence, la plupart des salariés couverts par les dispositifs de maintien dans l’emploi relevaient de cette catégorie en cas d’absence complète du travail. Il en va de même des salariés encouragés à prendre des congés annuels et de ceux dont le contrat de travail a été suspendu sans indemnisation - même si, en réalité, ces derniers sont sans doute peu nombreux dans la plupart des pays européens compte tenu des règlementations contraignantes en vigueur (voir par exemple Eurofound (2021[8])). Aux États-Unis et au Canada, les salariés mis à pied temporairement sont classés dans la catégorie « chômeurs » si leur employeur leur a notifié une date de retour au travail, et dans celle des « inactifs » autrement4.
Dans le temps : à compter du 1er janvier 20215, en application des nouvelles règles gouvernant la collecte et la diffusion des données relatives à la population active dans l’Union européenne, les personnes déclarant i) n’avoir effectué aucune heure de travail pendant plus de trois mois et ii) ne pas être en recherche d’emploi, sont désormais classées parmi les inactifs (et non parmi les employés non présents sur site comme auparavant). Ces changements de définition devraient avoir une profonde incidence sur le nombre d’employés et d’inactifs couverts par les dispositifs de maintien dans l’emploi, ou de travailleurs indépendants mais n’ayant effectué aucune heure de travail. Bien qu’ils n’influent guère sur les chiffres du chômage, et que les instituts de statistiques aient procédé dans la mesure du possible à des révisions rétrospectives, ils pourraient induire une légère rupture de série dans les taux de chômage au travers des effets sur la population active. La comparaison des données européennes correspondant à cette période doit donc être considérée avec prudence.
Ces différences de définition n’ont généralement qu’une incidence limitée sur la comparabilité globale des statistiques de l’emploi et du chômage. En temps de crise, en revanche, elles peuvent sensiblement influer sur celle des statistiques du chômage. En Italie, par exemple, les pertes d’emplois intervenues entre février et décembre 2020 ont augmenté de 80 % dans la série chronologique révisée (Instituto Nazionale di Statistica, 2021[9]).
Les statistiques du chômage témoignent de ce que la crainte de l’infection et les confinements ont modifié les comportements en matière de recherche d’emploi. Pour être considérée « au chômage », une personne sans travail doit être en recherche active d’emploi. Comme les restrictions imposées par les pouvoirs publics et la crainte de l’infection ont considérablement perturbé la recherche d’emploi, de nombreuses personnes sans travail qui seraient normalement en quête d’un emploi, et donc comptabilisées comme chômeurs, le seront en réalité comme inactives.
1. Voir la note détaillée dans OCDE (2020[10]).
2. Ou plus si le retour à l’emploi dans la même unité économique est garanti.
3. Y compris une rémunération partielle, même s’ils bénéficient également d’une aide provenant d’autres sources, notamment de dispositifs publics.
4. Aux États-Unis, les personnes mis à pied temporairement sont classées dans la catégorie « chômeurs » si elles prévoient d’être rappelées à leur poste dans un délai de six mois. Si leur employeur ne leur a indiqué aucune date de retour au travail et si elles ne pensent pas reprendre le travail dans un délai de six mois, elles doivent satisfaire aux critères de « recherche d’emploi » pour être classées dans la catégorie « chômeurs ».
5. Le 1er janvier 2021, le règlement (UE) 2019/1700 est entré en vigueur : il précise les éléments techniques de l’Enquête sur la population active, établit les formats techniques de transmission de l’information et décrit dans le détail les modalités et le contenu des rapports de qualité sur l’organisation d’une enquête par échantillonnage.
Source : adaptation et mise à jour de OCDE (2020[11]) « OECD employment and unemployment statistics during the COVID‑19 crisis », https://www.oecd.org/sdd/labour-stats/OECD-employment-and-unemployment-statistics-during-the-COVID-19-crisis.pdf, et de OCDE (2020[5]), OECD Employment Outlook 2020: Worker Security and the COVID‑19 Crisis, https://doi.org/10.1787/1686c758-en.
La demande excédentaire de travail se compose en fait de trois éléments : i) les chômeurs, qui sont disponibles et à la recherche d’un emploi ; ii) les personnes en marge du marché de l’emploi, qui sont disponibles pour un emploi mais n’en cherchent pas ; iii) les travailleurs sous-employés, à savoir les salariés à temps plein qui travaillent moins d’une semaine complète et les travailleurs à temps partiel qui souhaitent un emploi à temps plein mais n’en trouvent pas5. Dans le contexte du COVID‑19 et des interventions sur le marché du travail qui ont accompagné la pandémie, ces autres composantes du sous-emploi de la main d’œuvre ont gagné en importance.
1.2.3. Bon nombre de travailleurs se sont retirés du marché du travail...
Au paroxysme de la première vague du coronavirus, les restrictions généralisées sur les déplacements et les contacts sociaux, conjuguées à la crainte de contracter le virus, ont mis un coup d’arrêt brutal aux recherches d’emploi car bon nombre de ceux qui avaient perdu leur travail n’ont pu se mettre immédiatement en quête d’un nouveau poste. De fait, alors que, d’ordinaire, la recherche d’emploi globale augmente en temps de récession, elle semble avoir diminué dans de nombreux pays durant la crise du COVID‑19 (Encadré 1.2). En effet, conscients des difficultés et des dangers de cette activité au plus fort de la pandémie, plusieurs pays ont provisoirement levé l’obligation de recherche d’emploi qui conditionne le versement des prestations (chapitre 3)6.
Quoiqu’il en soit, pour être considérée comme « chômeur », au sens des statistiques du marché du travail, une personne sans travail doit être en recherche active d’emploi. Les obstacles créés par la pandémie ont donc fait basculer bon nombre de ceux qui, en temps normal, auraient été considérés comme des chômeurs dans la catégorie des inactifs - ou des travailleurs en marge du marché du travail. La contribution de ces personnes à la flambée de l’inactivité a été particulièrement importante au Chili, au Mexique et en Turquie, ainsi que dans divers pays européens comme l’Autriche, l’Espagne, la Finlande, l’Irlande et le Portugal (Graphique 1.6, partie A).
Graphique 1.6. Composition de la variation du non-emploi
Copier le lien de Graphique 1.6. Composition de la variation du non-emploiVariation en points de pourcentage, pourcentage de la population âgée de plus de 15 ans, corrigé de la saisonnalité

Note : OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés. Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques en raison des restrictions nationales dues à la pandémie.
Source : OCDE, base de données des comptes nationaux - Tableau de bord sur les ménages.
Parallèlement aux personnes qui demeurent en marge de la population active, une proportion préoccupante des retraits de la vie active observés au deuxième trimestre de 2020 tient cependant dans plusieurs pays au nombre grandissant de personnes qui n’étaient plus disponibles pour travailler. Ces retraits dans l’inactivité ont sans doute été partiellement motivés par la fermeture des établissements scolaires et l’accroissement de la charge de travail domestique qui ont empêché bon nombre de personnes éventuellement désireuses de travailler, les femmes notamment, de le faire.
Au cours des troisième et quatrième trimestres de 2020, dans le contexte d’un assouplissement des restrictions aux déplacements, la part des personnes en marge du marché du travail dans le taux de chômage a légèrement reculé, diminuant de plus de deux points au Canada, au Chili, en Irlande et au Mexique, et de plus de 1.8 point en Espagne. Elle n’a continué à progresser qu’en Estonie, en Grèce, en Islande, en République slovaque et en Slovénie (Graphique 1.6, partie B). Elle demeure toutefois supérieure aux niveaux constatés avant la crise dans tous les pays hormis l’Australie, la Lettonie et le Luxembourg.
Encadré 1.2. L’activité de recherche d’emploi pendant la crise du COVID‑19 a été singulièrement modérée
Copier le lien de Encadré 1.2. L’activité de recherche d’emploi pendant la crise du COVID‑19 a été singulièrement modéréeL’augmentation prononcée du chômage temporaire et du nombre de salariés en horaires réduits ou mis à pied temporairement a sans doute participé d’une autre caractéristique inhabituelle de la crise induite par le COVID‑19. Comme bon nombre de ceux qui ne travaillent pas comptent retrouver leur poste antérieur, contrairement à ce qui se produit habituellement dans le cadre d’une récession, la recherche d’emploi durant la contraction due à la pandémie semble avoir diminué au lieu d’augmenter. La crise n’a pas seulement fait chuter la demande de main d’œuvre ; elle a également paralysé l’offre (voir Forsythe et al. (2020[12]), Hensvik, Le Barbanchon et Rathelot (2021[13]), et Balgova et al. (2021[14]).
Les enquêtes classiques sur la population active fournissent des informations sur le nombre de chômeurs et d’inactifs, mais elles nous en disent peu sur l’intensité de la recherche d’emploi. Autrement dit, elles nous renseignent sur la marge extensive - s’il y a recherche d’emploi ou pas - mais pas sur la marge intensive - l’ardeur que les individus mettent à cette recherche. Généralement, elles ne procurent pas non plus d’informations concernant la recherche d’emploi de ceux qui travaillent.
Normalement, en période de ralentissement économique, on observe une intensification de la recherche d’emploi globale (voir Forsythe et al. (2020[12]) et Balgova et al (2021[14])1). Celle-ci peut intervenir au travers de divers mécanismes. D’abord, le nombre de chômeurs augmente, ce qui fait que même si certains se découragent, la marge extensive tend à croître. Ensuite, la sécurité de l’emploi diminue, ce qui peut amener un plus grand nombre de salariés à se mettre en quête d’un travail. Enfin, l’intensité de la recherche - chez les chômeurs et les salariés - peut évoluer. Les données relatives à la recherche d’emploi résultant des enquêtes sur la population active ne portent généralement que sur le premier de ces mécanismes - le nombre de chômeurs en recherche d’emploi.
Pendant la crise du COVID‑19, la recherche d’emploi ne semble pas avoir obéi à ce scénario. Dans la majorité des pays de l’OCDE, elle a en fait chuté au début de la pandémie (Graphique 1.7). Ce recul est probablement dû à plusieurs facteurs, notamment : i) la crainte de l’infection ; ii) l’offre restreinte de services de l’emploi ; iii) l’assouplissement des conditions donnant droit aux prestations ; iv) le grand nombre de personnes couvertes par des dispositifs de mise à pied temporaire ou de maintien dans l’emploi comptant retrouver leur poste antérieur ; v) la fermeture des écoles, qui a fait que de nombreux parents n’étaient pas disponibles pour travailler (ou pour chercher un emploi).
Les personnes mises à pied temporairement , notamment, peuvent biaiser les indicateurs classiques des tensions sur le marché du travail - le rapport entre postes à pourvoir et demandeurs d’emploi - qui se fondent sur les chiffres du chômage. En effet, bien que certains pays les classent parmi les chômeurs, elles sont moins susceptibles de rechercher activement un travail du fait qu’elles attendent que leur employeur les rappelle.
Compte tenu de ces éléments, la Graphique 1.7 ci-dessous suit Forsythe et al. (2020[12]) et Baker et Fradkin (2017[15]) en ce qu’il utilise les recherches effectuées sur Google portant sur mot « emploi » (ou l’équivalent dans la langue locale) comme indicateur de l’intensité de la recherche globale2. Il en résulte une mesure de l’intensité de la recherche qui englobe les recherches engagées par les salariés, par les employés qui travaillent en horaires réduits ou pas du tout, par les personnes en mise à pied temporaire, et par les chômeurs.
Graphique 1.7. Recherche d’emploi
Copier le lien de Graphique 1.7. Recherche d’emploiIndice de recherche Google Trends (requêtes contenant le mot « emploi »). Rapport de la moyenne de chaque mois à la moyenne du même mois au cours des trois années précédentes

Note : Google Trends produit une série chronologique représentant l’activité de recherche sur Internet pour un terme, une période et un lieu donnés. La série correspond au nombre de requêtes effectuées pour le terme spécifié par rapport au nombre total de requêtes sur ce terme lancées sur Google au cours de la période considérée. La série ci-dessus mesure l’activité de recherche d’emploi représentée par les requêtes effectuées sur Google contenant le terme « emploi », celui-ci étant traduit dans la langue locale principale par l’intermédiaire de Google translate. Les tendances saisonnières sont prises en compte, suivant Forsythe et al. (2020[12]), en rapportant l’intensité de recherche actuelle à la moyenne des trois années précédentes.
Source : Google Trends.
Dans les premières phases de la crise, l’intensité de la recherche d’emploi a chuté du fait que, partout dans l’OCDE, les restrictions liées à la pandémie, les problèmes sanitaires et la charge accrue de travail domestique ont amené les personnes qui avaient perdu leur travail à suspendre temporairement leur recherche. Si elle semble s’être légèrement redressée au cours du deuxième trimestre de 2020 - retrouvant des niveaux équivalents, ou très légèrement supérieurs, à ceux observés avant le début de la pandémie - un deuxième creux est observable dans la majorité des pays au début du quatrième trimestre de 2020 (Graphique 1.7). C’est alors, face à l’ampleur de la deuxième vague d’infections, qu’est apparu le caractère durable de la crise.
Élément important, la baisse de l’activité de recherche d’emploi aux premiers temps de la crise ne semble pas avoir été motivée par la générosité accrue des prestations. En effet, des études fondées à la fois sur les annonces publiées sur les sites d’emploi en Suède (Hensvik, Le Barbanchon et Rathelot, 2021[13]) et sur les sites d’emploi en ligne aux États-Unis (Marinescu, Skandalis et Zhao, 2020[16]) constatent que ce recul a précédé l’instauration des dispositifs renforcés d’assurance-chômage. On peut en revanche se demander si cet accroissement des prestations ne va pas freiner la recherche d’emploi lorsque la reprise économique sera plus nettement amorcée.
Dans ce climat d’atonie de l’activité de recherche, les tensions sur les marchés du travail peuvent paraître exagérées, d’où un optimisme excessif quant à la rapidité avec laquelle la hausse du chômage sera absorbée une fois la pandémie terminée.
Cette morosité risque par ailleurs d’avoir des retombées notables sur le calendrier et l’efficacité des subventions à l’embauche. D’une part, elle peut freiner la création de postes si les employeurs prévoient un nombre restreint de candidats (et, partant, des recrutements de moindre qualité) pour ceux qu’ils créent (Forsythe et al., 2020[12]) ; des subventions à l’embauche pourraient dans ce cas donner un coup d’envoi important à la reprise. D’autre part, les subventions temporaires à l’embauche sont généralement plus efficaces en temps de crise (ou dans les secteurs durement touchés). En effet, sur des marchés léthargiques, l’effet de ces subventions sur les salaires est habituellement négligeable. Si la faiblesse de l’activité de recherche signifie que les marchés du travail sont tendus - malgré l’incidence profonde que la pandémie a eue sur eux -, les subventions à l’embauche risquent de se répercuter sur les salaires. Autrement dit, elles pourraient avoir un effet dynamisant plus marqué sur la création d’emplois si leur mise en place était reportée jusqu’à ce que les entreprises puissent rouvrir et retrouver une activité normale, et les travailleurs reprendre leur recherche (voir également le chapitre 3).
1. En examinant des données en provenance des Pays-Bas, Balgova et al. (2021[14]) observent, plus précisément, que la recherche d’emploi des chômeurs pendant la pandémie a été sensiblement inférieure à ce que les circonstances auraient laissé présager, alors qu’elle a été légèrement plus élevée chez les salariés.
2. La validité de cet indicateur dépend du taux d’accès et d’utilisation de l’Internet dans le pays.
Si la contribution des autres formes d’inactivité a diminué en parallèle au nombre des personnes en marge du marché du travail, elle est restée particulièrement forte au Chili (3.6 points de pourcentage), en Islande (2.4) aux États-Unis (1.3) et en Italie (1.0), où elle affiche des niveaux supérieurs à ceux observés avant la pandémie. Mis à part l’Islande, ces pays comptent parmi ceux où les écoles sont restées le plus longtemps fermées du fait de la pandémie (UNESCO, 2021[17]).
1.2.4. Nombreuses sont les personnes qui, ayant conservé leur emploi, ont vu leurs heures de travail sensiblement réduites
Tout comme la fermeture des entreprises et la levée des conditions relatives à la recherche d’emploi, en augmentant le nombre de personnes qui ont suspendu leur recherche, ont estompé la frontière entre chômage et inactivité, le recours massif aux dispositifs de maintien dans l’emploi dans de nombreux pays a brouillé celle entre emploi et chômage.
Dans l’OCDE, les restrictions imposées par les mesures d’endiguement du COVID‑19 sont allées de pair avec des aides aux entreprises des secteurs « non essentiels » pour qu’elles conservent leur personnel. Parmi ces mesures, les dispositifs de maintien dans l’emploi occupent une place dominante (chapitre 2). Ces derniers visent à limiter les pertes d’emplois en permettant aux entreprises qui connaissent un creux temporaire d’activité de bénéficier d’une aide couvrant une part substantielle de la rémunération des salariés en horaires réduits. Au début de la pandémie, de nombreux pays, en Europe notamment, ont facilité l’accès des entreprises à ces dispositifs ou en ont instauré de nouveaux à titre temporaire. Soucieux de limiter les pertes d’emplois et de favoriser un redémarrage rapide de l’activité économique à la réouverture des entreprises, ils ont élargi la couverture des secteurs et des entreprises assurée par ces dispositifs (qui sont le plus souvent devenus universels), renforcé leur générosité et minoré les conditions à remplir pour en bénéficier. Le recours à ces mécanismes a en conséquence explosé, le nombre de bénéficiaires en mai 2020 étant dix fois supérieur à celui enregistré à l’apogée de la crise financière mondiale. Outre ce soutien aux salaires, de nombreux pays de l’OCDE se sont efforcés de parer aux licenciements moyennant un soutien massif à la trésorerie des entreprises tandis que d’autres - comme l’Espagne, la France et l’Italie - ont interdit, implicitement ou explicitement, aux entreprises bénéficiaires des aides au maintien dans l’emploi de procéder à des licenciements.
Dans la mesure où ces dispositifs ont permis aux employeurs d’éviter des licenciements à grande échelle, ils ont empêché la crise de se traduire par un chômage de masse. Par ailleurs, étant donné le recours sans précédent à ces mécanismes dans de nombreux pays, les ajustements au temps de travail des salariés qui ont conservé leur emploi jouent un rôle inédit. La Graphique 1.8 ci-dessous montre en quoi le sous-emploi a contribué à amortir les conséquences de la pandémie sur les marchés du travail de l’OCDE. Le sous-emploi a rapidement augmenté depuis le début de la pandémie puisqu’il a doublé en un trimestre seulement, passant de 5.4 % à 11 % de la population active. Cette hausse a été le facteur essentiel de la croissance prononcée de la sous-utilisation de la population active de l’OCDE au deuxième trimestre de 20207. Pour mettre les choses en perspective, au début de 2010 - acmé de la crise financière mondiale -, sur trois personnes sans travail, travaillant moins qu’habituellement, ou moins qu’elles ne l’auraient souhaité, près de deux relevaient du chômage. Au deuxième trimestre de 2020, ce chiffre était inférieur à une personne sur deux. Malgré un taux nettement plus élevé de sous-utilisation de la main d’œuvre, le taux de chômage est resté inférieur à celui observé pendant la crise financière. Cela s’est vérifié dans tous les pays de l’OCDE à l’exception de l'Australie, qui n’est pas entrée en récession pendant cette crise, de même qu’au Canada et aux États-Unis, pays où les mises à pied temporaires ont fait bondir les chiffres du chômage.
Aux troisième et quatrième trimestres de 2020, la sous-utilisation de la main d’œuvre a considérablement diminué (de 4 points), recul dû pour l’essentiel à la chute du sous-emploi. On notera toutefois que dans les pays où le repli du sous-emploi a été le plus marqué, le chômage a souvent progressé.
Graphique 1.8. Composantes de la sous-utilisation de la main d'œuvre, par trimestre
Copier le lien de Graphique 1.8. Composantes de la sous-utilisation de la main d'œuvre, par trimestreTaux de sous-utilisation de la main d'œuvre en pourcentage de la population active, moyenne de l’OCDE, corrigé de la saisonnalité

Note : moyenne de l’OCDE à l’exclusion de la Colombie, de la Corée, du Costa Rica et d’Israël. On entend par sous-employés les salariés à temps plein qui travaillent moins d’une semaine complète et les travailleurs à temps partiel qui souhaitent un emploi à temps plein mais n’en trouvent pas.
Source : OCDE, base de données des comptes nationaux - Tableau de bord sur les ménages.
1.2.5. Ainsi, la réduction du temps de travail des salariés en emploi a en grande partie absorbé le choc initial
Les chiffres du chômage, du sous-emploi et de l’inactivité sont un indicateur important du grand nombre de personnes touchées par la crise du COVID‑19. Pour autant, quoique sans appel, ils ne donnent isolément qu’une idée partielle de la situation. Un tableau complet des effets de la pandémie sur les marchés du travail de l’OCDE doit réunir ces multiples éléments. C’est précisément ce tableau que procure l’évolution du nombre d’heures travaillées depuis le début de la crise car elle en saisit les retombées à la fois sur la marge extensive (baisse du nombre d’employés) et sur la marge intensive (réduction des heures de travail des employés restés en poste). En moyenne, dans les pays pour lesquels on dispose de données mensuelles, le nombre total d’heures travaillées a chuté de près de 20 % en un mois à peine, entre mars et avril (Graphique 1.9). Cet effet initial s’est immédiatement fait ressentir chez les femmes, chez qui elles ont diminué de plus de 21 %, contre 19 % pour les hommes. Néanmoins, lorsqu’un retour à la normale s’est esquissé, au cours du deuxième trimestre, il apparaît que les femmes ont repris le travail et que leurs heures de travail ont augmenté plus rapidement que celles des hommes. Ces moyennes masquent cependant une certaine hétérogénéité entre pays, le nombre d’heures ayant dans un premier temps accusé une baisse particulièrement brutale au Canada, au Chili, aux États-Unis, au Mexique et au Royaume-Uni où, en avril 2020, il avait reculé de plus de 20 % par rapport au début de l’année. En Suède, où les restrictions sur l’activité ont été moindres, il n’a diminué que de 10 %.
Outre qu’elle donne une idée plus complète de l’incidence globale de la pandémie sur les marchés du travail de l’OCDE, la ventilation par origine de la réduction des heures permet de mieux appréhender les mécanismes au travers desquels celle-ci s’est manifesté. La Graphique 1.10 ci-après répartit la baisse du nombre d’heures sur un an8 selon qu’elle est due aux travailleurs qui ont perdu leur emploi ou à ceux qui l’ont conservé mais ont vu leur temps de travail diminuer.
Graphique 1.9. Évolution des heures travaillées durant la pandémie du COVID‑19
Copier le lien de Graphique 1.9. Évolution des heures travaillées durant la pandémie du COVID‑19Indice des heures mensuelles travaillées (janvier 2020=100), corrigé de la saisonnalité, sélection de pays

Note : Les pays ont été choisis en fonction de la disponibilité de données actualisées. Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays.
Source : calculs de l’OCDE basés sur Australian Bureau of Statistics (Labour Force Survey), Statistiques Canada (Enquête sur la population active), Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo), Statistiques Islande (Enquête sur la population active), Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active), Office coréen de statistiques (Enquête sur la population économiquement active), Institut national des statistiques et de la géographie du Mexique (ENOE et ETOE), Office suédois de statistiques (Enquêtes sur la population active), Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) et Bureau of Labor Statistics des États-Unis (Current Population Survey).
Au début de la crise, près de quatre heures non travaillées sur cinq avaient pour origine un dispositif de réduction du temps de travail. Fait encore plus frappant, la majorité des heures chômées - plus de deux sur trois - étaient le fait de salariés qui, bien qu’employés, avaient vu leur temps de travail ramené à zéro. Ce sont essentiellement les pays européens qui ont fait massivement appel à la marge intensive pour absorber les premiers effets de la pandémie sur le marché du travail. De fait, dans des pays comme la Belgique, la France, la Grèce, la Hongrie, le Luxembourg, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, la réduction du temps de travail des salariés représente neuf heures non travaillées sur dix. Aux États-Unis, en revanche, la marge intensive ne compte que pour un quart des heures non travaillées, l’ajustement intervenant essentiellement par le biais du chômage (quoique temporaire dans de nombreux cas - voir plus loin).
Une reprise prononcée du temps de travail, se situant, en moyenne, à un niveau inférieur de 4.3 % à peine à celui enregistré au troisième trimestre de 2019, a été observée au troisième trimestre de 2020 dans la plupart des pays suite à la réouverture de nombreux magasins et restaurants et au retour au travail des salariés. Ce redressement semble tenir en grande partie à la résorption de la marge intensive. La composition des heures perdues a par conséquent quelque peu évolué durant cette phase de la crise, le chômage intervenant davantage dans l’ajustement - et représentant environ deux heures non travaillées sur trois en moyenne (Graphique 1.10, partie B)9. En parallèle, dans les pays qui avaient fait le plus appel aux mises à pied temporaires au deuxième trimestre de 2020 - notamment le Chili, les États-Unis, la Turquie et le Canada - la hausse des heures travaillées au troisième trimestre de 2020 a été moins prononcée10.
Au quatrième trimestre, le retour des restrictions dans plusieurs pays (voir la section 1.1.1) a entraîné un nouveau repli du nombre d’heures travaillées. Celui-ci s’est accentué dans l’ensemble de l’OCDE, passant en moyenne, d’une année sur l’autre, de 4.3 % au troisième trimestre à 5.6 % au quatrième (Graphique 1.10). Cela dit, la moyenne de l’OCDE occulte là encore une certaine hétérogénéité. En effet, dans plusieurs pays - comme l’Autriche, la Belgique, la Grèce, l’Islande, la Norvège, les Pays-Bas, la Pologne, la République slovaque et la République tchèque - cette baisse a plus que triplé entre les troisième et quatrième trimestres alors que dans d’autres, comme l’Australie, le Canada, le Chili, le Danemark, les États-Unis, le Mexique, la Nouvelle-Zélande et le Royaume-Uni, elle n’a pas cessé de se résorber, le nombre d’heures travaillées revenant même dans certains cas au niveau enregistré avant la pandémie. Parallèlement à cette nouvelle baisse des heures travaillées, c’est encore la marge intensive qui a été utilisée pour absorber une bonne part de ce sous-emploi au dernier trimestre de 2020. En mars 2021, le nombre d’heures travaillées était encore inférieur de 7 % au niveau observé avant la crise, en moyenne, dans les dix pays pour lesquels on dispose de statistiques mensuelles actualisées (Graphique 1.9), le Canada étant le seul pays où il est revenu à la normale. On estime aussi à 7 % environ le déficit du premier trimestre 2021 par rapport au quatrième trimestre 2019 pour l’ensemble de la zone OCDE, estimations qui se fondent sur les chiffres des comptes nationaux trimestriels pour les pays qui ne disposent pas encore de données d’enquête sur la population active pour le premier trimestre de 2021.
Graphique 1.10. Décomposition de la variation du nombre total d’heures
Copier le lien de Graphique 1.10. Décomposition de la variation du nombre total d’heuresVariation en %, en glissement annuel

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Voir l’Annexe 1.A pour une explication détaillée de la décomposition. Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés.
Source : calculs du Secrétariat fondés sur l’Enquête européenne sur les forces de travail ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Australian Bureau of Statistics ; Statistiques Canada (Statistiques de la population active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active) ; Office coréen de statistiques (Enquête sur la population économiquement active) ; Statistics New Zealand (Household Labour Force Survey) ; et Current Population Survey des États-Unis.
1.2.6. Bon nombre de salariés mis à pied temporairement, ou en horaires réduits, risquent de se trouver en situation de chômage déclaré...
Étant donné le caractère extérieur du choc provoqué par la pandémie du COVID‑19, les problèmes de trésorerie immédiats que de nombreuses entreprises ont connu en conséquence ne permettent guère de prévoir leur viabilité à long terme. Pour maintenir ces entreprises à flot jusqu’à la reprise de l’activité économique, les gouvernements de l’OCDE ont apporté des aides d’un niveau inédit, notamment sous forme d’achats d’obligations d’entreprises, de prêts directs, d’injections de liquidités, de subventions en espèces et de soutien direct aux coûts de main d’œuvre. Ces dispositifs ont permis aux entreprises de diminuer les coûts de main d’œuvre, et ainsi atténué les problèmes de liquidité immédiats résultant de la pandémie et des mesures de confinement s’y rattachant.
Pour l’heure, la crise du COVID‑19 a donc renversé la tendance historique qui veut que les faillites suivent le cycle conjoncturel. En effet, d’après l’indice des faillites de l’OCDE, le nombre de faillites enregistré à chacun des trimestres de 2020 a diminué par rapport à l’année précédente dans quasiment tous les pays membres pour lesquels on dispose de données11. Néanmoins, ces dispositifs ont été conçus pour aider les entreprises et les salariés à surmonter l’effet immédiat de la pandémie ; plus la crise se prolongera, plus le nombre d’entreprises luttant pour préserver leur solvabilité augmentera (voir Demmou et al. (2021[18]) et Hadjibeyli, Roulleau et Bauer (2021[4])). Des licenciements seront inévitables.
Outre le nombre croissant d’entreprises confrontées à des problèmes de solvabilité, les employeurs risquent fort de constater, la crise se pérennisant, que la rétention de main d’œuvre encouragée par les dispositifs de maintien dans l’emploi perd de son intérêt - d’autant que les subventions seront progressivement supprimées et de plus en plus ciblées. Les avantages de la rétention de main d’œuvre (la tendance des entreprises à conserver, face à un choc défavorable, un plus grand nombre de salariés qu’il ne le faudrait pour assurer un niveau de production optimal) sont particulièrement importants lorsque les chocs sont temporaires (Giupponi et Landais, 2018[19]). En effet, alors que les coûts prévus sont liés au facteur temps, les économies dérivant des mesures prises pour éviter de licencier des salariés et d’en réembaucher par la suite ne le sont pas. À la fin de 2020, l’espoir que la crise serait de courte durée avait quasiment été réduit à néant face à l’incertitude grandissante quant à sa durée potentielle et aux changements structurels qu’elle provoquerait. De fait, les demandes de soutien des employeurs au titre des dispositifs de maintien dans l’emploi ont brutalement diminué au troisième trimestre de 2020, avec la réouverture de l’économie et, lorsqu’elles ont à nouveau augmenté, durant le deuxième confinement, elles n’ont pas atteint le pic enregistré en avril et mai (chapitre 2).
De même, dans les pays qui ont principalement recouru aux mises à pied temporaires, les employeurs risquent de ne pas être en mesure de rappeler bon nombre des salariés qui comptent encore retrouver leur emploi12. Par ailleurs, alors que les variations rapides de l’emploi entre mars et juin s’expliquent au premier chef par les mises à pied temporaires et aux rappels des travailleurs, les salariés que leurs employeurs n’ont pas réintégrés risquent fort, à mesure que le temps passe, de perdre définitivement leur emploi (Cheng et al., 2020[20]). En effet, le recul rapide des mises à pied temporaires au cours du troisième trimestre 2020 est allé de pair avec une hausse des pertes permanentes d’emploi, au Canada comme aux États-Unis (Graphique 1.11). Aux États-Unis, par exemple, la baisse du pourcentage de la population active en mise à pied temporaire - de plus de 10 points entre avril 2020 et avril 2021 -, s’est accompagnée d’une augmentation de 1.5 point de celui de la population active au chômage déclaré.
Les taux de rappel des salariés mis à pied temporairement sont d’habitude relativement élevés, les estimations indiquant en général qu’aux États-Unis, plus de deux sur trois sont rappelés - la majorité dans les huit semaines suivant leur mise en disponibilité (Katz et Meyer, 1990[21])13. Néanmoins, la crise s’étant prolongée au-delà de la durée escomptée au moment où les entreprises ont pris leurs décisions à cet égard, et alors qu’elles continuent de s’interroger sur les moyens de s’adapter, la possibilité de rappeler les employés encore au chômage a évolué pour nombre d’entre elles. Les schémas historiques observés dans des conjonctures plus prévisibles de l’emploi ne sauraient donc constituer un guide fiable. En effet, en avril 2021, plus de 48 % des salariés se déclarant temporairement au chômage aux États-Unis l’étaient depuis 27 semaines au moins14, de nombreux autres traversant plusieurs périodes de chômage durant la pandémie. Se fondant sur des données anonymisées de comptes bancaires, Ganong et al. (2021[22]) ont constaté que plus de la moitié des nouvelles demandes d’allocations de chômage ont été faites par des salariés qui avaient déjà bénéficié d’indemnités de chômage pendant la pandémie, ce qui permet de penser que bon nombre des travailleurs rappelés durant l’été ont été à nouveau licenciés ultérieurement.
Graphique 1.11. Évolution du chômage déclaré et de la mise à pied temporaire, États-Unis et Canada
Copier le lien de Graphique 1.11. Évolution du chômage déclaré et de la mise à pied temporaire, États-Unis et Canada
Source : Bureau of Labor Statistics des États-Unis, https://www.bls.gov/web/empsit/cpseea11.htm, et Statistiques Canada, https://www150.statcan.gc.ca/t1/tbl1/fr/tv.action?pid=1410005801&request_locale=fr et https://www150.statcan.gc.ca/t1/tbl1/fr/tv.action?pid=1410012501&request_locale=fr.
1.2.7. Pour ceux qui ont perdu leur emploi, le chômage de longue durée et ses séquelles peuvent devenir une source de préoccupation
Compte tenu du nombre croissant de chômeurs, des nombreux salariés travaillant encore en horaires réduits ou en chômage technique, et du taux d’inactivité élevé, le marché du travail demeure exposé à une montée rapide du chômage de longue durée. Bon nombre des personnes actuellement sans emploi ont suspendu leurs recherches pour des raisons diverses liées à la pandémie (Graphique 1.7). Lorsqu’elles reviendront sur le marché du travail (en même temps que les employés actuellement en horaires réduits et en mise à pied temporaire qui découvriront que leur emploi n’existe plus), les tensions que celui-ci connaît actuellement - le rapport des postes à pourvoir aux demandeurs d’emploi - s’aggraveront sans doute, ce qui pourrait entraîner une baisse des taux d’accès à l’emploi et, éventuellement, un chômage durable. Plus d’un an après le début de la crise provoquée par la pandémie, le problème du chômage de longue durée gagne en urgence.
Généralement défini comme le pourcentage de personnes au chômage depuis 12 mois ou plus, le taux de chômage de longue durée ne commence normalement à croître qu’un an après le taux de chômage ordinaire. Or, suivant cette définition, et compte tenu du délai de mise à disposition des données internationales, les derniers chiffres dont on dispose à ce sujet (4e trimestre de 2020) ne prennent pas encore en compte les chômeurs licenciés au début de la crise du COVID‑19. Étant donné le nombre croissant de personnes restées entre 6 et 12 mois sans emploi, le phénomène paraît toutefois imminent. En l’absence d’une forte augmentation des postes à pourvoir, les chiffres indiquent clairement que le taux de chômage de longue durée va bientôt augmenter. En conséquence, l’analyse ci-dessous suit le Bureau of Labor Statistics des États-Unis et se concentre sur les personnes au chômage depuis plus de six mois15.
Au quatrième trimestre de 2020, soit neuf mois après le début de la pandémie, le nombre de personnes au chômage depuis 6 à 12 mois avait en moyenne plus que doublé, sur cette période, dans l’OCDE (Graphique 1.12). Cette hausse importante s’explique à la fois par le nombre limité de postes à pourvoir et par le faible taux de recherche d’emploi, qui ont fait que les personnes qui avaient perdu leur travail au début de la pandémie étaient peu nombreuses à en avoir retrouvé un à la fin de l’année. Aux États-Unis et au Canada, où le chômage a absorbé une grande part du choc initial du marché du travail, la proportion de la population active ayant connu des périodes de chômage de 6 à 12 mois avait respectivement progressé de plus de 540% et 370 %16. En Australie et dans divers pays européens, malgré un soutien substantiel à l’emploi, le pourcentage de la population active dont la période de chômage se prolongeait était déjà en hausse : des pays comme l’Autriche, le Danemark, l’Espagne, la Lituanie, les Pays-Bas et la République tchèque ont vu le nombre de personnes au chômage depuis 6 à 12 mois augmenter de plus de deux tiers, tandis qu’en Australie, en Estonie, en Irlande, en Islande, en Norvège, au Portugal, et en Slovénie, ce chiffre avait plus que doublé au quatrième trimestre de 2020. Aux États-Unis, les personnes au chômage depuis six mois au moins comptaient pour 43.4 % des chômeurs en mars 2021, taux proche du niveau historique de 45.5 % enregistré en avril 2010, avant de reculer légèrement pour atteindre 42.1 % en juin 2021 suite au redressement de l’économie nationale17.
L’accroissement du nombre de personnes au chômage depuis 12 mois ou plus demeure relativement modéré dans la majorité des pays de l’OCDE. Au quatrième trimestre de 2020, moins d’un an s’était écoulé depuis le déclenchement de la pandémie ; son incidence ne transparaissait donc pas encore dans le taux de chômage de longue durée. De fait, plusieurs pays (France, Grèce, Irlande, Italie, Norvège, Portugal, République slovaque et Turquie) ont vu le pourcentage de la population active connaissant des périodes de chômage supérieures à un an diminuer. Néanmoins, cette baisse tient sans doute à ce que les personnes restées plus longtemps au chômage se sont découragées et ont renoncé à chercher un emploi étant donné les obstacles supplémentaires créés par la pandémie, conjugués à la suspension des obligations mutuelles dans de nombreux pays (chapitre 3).
L’augmentation du chômage de longue durée dépend des entrées dans le chômage, mais aussi de la possibilité d’en sortir rapidement. Étant donné le climat d’incertitude entourant la propagation de nouveaux variants du virus, la date à laquelle les mesures de distanciation physique ne freineront plus l’activité économique, et l’ampleur du sous-emploi caché, même une hausse relativement modérée du chômage de longue durée peut être source de préoccupation.
Si les périodes de chômage courtes sont peu inquiétantes, surtout quand les chômeurs sont couverts par des régimes d’assurance-chômage ou d’autres dispositifs de soutien financier, les périodes prolongées soulèvent davantage de problèmes. En particulier, lorsque les prestations de garantie de revenu et l’épargne sont épuisées, le chômage de longue durée peut créer des difficultés financières. Des chiffres récents recueillis dans le cadre de l’enquête « Des risques qui comptent » (OCDE, 2020[23]) indiquent qu’en moyenne, dans les pays examinés, près d’un ménage sur trois ayant subi une perte d’emploi depuis le début de la pandémie déclare ne pas être en mesure de payer une dépense courante, et un sur huit signale avoir souffert de la faim (Graphique 1.13). Les difficultés financières, préoccupantes en soi, peuvent aussi avoir des répercussions à long terme sur l’emploi si elles contraignent les demandeurs d’emploi à accepter des postes de moindre qualité, créant ainsi un risque d’inadéquation des compétences.
Outre les difficultés financières et les problèmes mentaux et matériels qui les accompagnent, le chômage de longue durée peut avoir des séquelles qui risquent de compromettre les perspectives professionnelles des chômeurs et de créer une situation dans laquelle les emplois seront plus difficiles à trouver, moins rémunérateurs et plus instables. Il est désormais assez bien établi que les chômeurs de relativement courte durée trouvent plus rapidement un emploi que ceux de longue durée (voir par exemple OCDE (2019[24])). Néanmoins, on ignore encore à quoi tient cette association, et l’ampleur des effets pernicieux qu’aura le chômage lié au COVID‑19. Dans les cas où la stigmatisation est due à la dépréciation du capital humain et à la dégradation des compétences pendant la période de non-emploi (voir par exemple (Pissarides, 1992[25])), ses effets risquent de ne pas se limiter aux chômeurs de longue durée. Les salariés qui travaillent en horaires réduits ou pas du tout pendant de longues périodes - même si, techniquement, ils n’ont pas été au chômage – voient aussi sans doute leur capital humain se déprécier. C’est notamment le cas lorsque ceux qui n’ont pas du tout travaillé n’ont pas eu la possibilité (ou ressenti le besoin) de suivre une formation professionnelle (chapitre 3).
Graphique 1.12. Durée du chômage
Copier le lien de Graphique 1.12. Durée du chômageVariation en pourcentage (4e trimestre 2019 - 4e trimestre 2020)

Note : voir l’Encadré 1.1 pour des précisions concernant la comparabilité des données du chômage. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés.
Source : Australian Bureau of Statistics ; Statistiques Canada (Enquête sur la population active) ; Enquête sur les forces de travail de l’Union européenne (EFT-UE) ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Quarterly Labour Force Survey) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; Bureau of Labor Statistics des États-Unis (Current Population Survey - CPS) ; Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active).
Reste que le chômage de longue durée résulte sans doute aussi partiellement de la stigmatisation liée aux périodes prolongées de chômage. Lorsque les employeurs voient dans ces dernières un signal négatif de la qualité du demandeur d’emploi, la discrimination qui en résulte risque de les pérenniser (voir par exemple Farber et al. (2018[26])). Des données expérimentales résultant de tests de discrimination à l’embauche fondée sur le CV indiquent que, toutes choses étant égales par ailleurs, la probabilité qu’un candidat à un poste soit convoqué à un entretien diminue sensiblement avec la durée de la période de chômage (Kroft, Lange et Notowidigdo, 2013[27]), en particulier pour les chômeurs de très longue durée (Farber et al., 2018[26]). Dans le climat économique actuel, l’ampleur du chômage tient bien davantage aux restrictions exceptionnelles à l’activité économique et aux difficultés financières que connaissent en conséquence de nombreux employeurs qu’à la qualité du travail des salariés licenciés. Il se pourrait donc que l’effet de stigmatisation lié au chômage de longue durée dans le contexte du choc extérieur du COVID‑19 soit modéré. Kroft, Lange et Notowidigdo (2013[27]) constatent d’ailleurs que cet effet est plus faible sur les marchés du travail moins tendus, ce qui permet de penser que les employeurs sont conscients de ce que la durée du chômage est moins révélatrice quand le chômage est élevé. Quoi qu’il en soit, si, la crise se prolongeant, de nouveaux chômeurs viennent grossir les rangs des demandeurs d’emploi, les chômeurs de plus longue durée risquent de se retrouver en bout de file quand les embauches reprendront.
Graphique 1.13. Difficultés financières des ménages déclarant une perte d’emploi depuis le début de la pandémie
Copier le lien de Graphique 1.13. Difficultés financières des ménages déclarant une perte d’emploi depuis le début de la pandémiePourcentage de répondants signalant chacune des difficultés financières suivantes depuis le début de la pandémie de COVID‑19, moyenne de l’OCDE, 2020

Note : moyenne de l’OCDE, voir le Graphique d’annexe 1.B.1 pour les données par pays. Les répondants pouvaient sélectionner toutes les réponses pertinentes. Les pourcentages représentent la part des personnes qui en ont choisi au moins une. « Perte d’emploi au sein du ménage » renvoie aux répondants qui déclarent avoir (eux-mêmes ou un membre du ménage) perdu leur emploi ou avoir été licenciés par leur employeur et (ou) avoir perdu leur emploi indépendant ou leur propre entreprise, depuis le début de la pandémie de COVID‑19. Les ménages « qui n’ont perdu aucun emploi » peuvent avoir souffert d’autres formes de perturbation de l’emploi.
Source : OCDE (2021[28]), Enquête « Des risques qui comptent » 2020 : les effets à long terme du COVID-19, https://doi.org/10.1787/44932654-en.
L’ampleur et les effets du chômage de longue durée pendant la crise induite par le COVID‑19 influeront à long terme sur le creusement des vulnérabilités sur le marché du travail. Déjà, des études liminaires indiquent qu’en général, les catégories qui enregistraient les taux de chômage les plus élevés en avril affichaient aussi les taux de réemploi les plus faibles (Cheng et al., 2020[20]). Comme la crise perdure, un abîme risque de se creuser entre ceux qui ont pu travailler à domicile et ceux qui ont subi une perte d’emploi et de revenu (voir OCDE (2020[5]) et le chapitre 5), mais aussi entre ceux qui ont surmonté la crise grâce au travail en horaires réduits et à de courtes périodes de mise à pied temporaire et ceux qui se sont retrouvés sans emploi, de plus en plus éloignés de la vie active, et exposés au risque de séquelles durables.
1.2.8. La capacité de créer de nouveaux appariements sera déterminante
Alors que le déploiement des vaccins est en cours et que l’activité économique peut, une fois encore, redémarrer dans tous les secteurs, on espère que le surcroît d’épargne aura créé un forte demande potentielle susceptible, tôt ou tard, de stimuler la reprise. De fait, l’OCDE (2021[3]) prévoit que le chômage continuera de reculer en 2021 et 2022 et atteindra 5.7 % au dernier trimestre de 2022. Malgré ces perspectives plus favorables, son taux devrait rester supérieur au niveau enregistré avant la crise dans la plupart des pays (Graphique 1.14), avec une sous-utilisation persistante de la main d’œuvre en 2021‑22. Ces prévisions reposent en grande partie sur l’hypothèse selon laquelle l’absorption du sous-emploi des salariés qui bénéficient de dispositifs de maintien dans l’emploi et travaillent actuellement en horaires réduits précédera la création d’emplois à grande échelle.
Malgré des projections plus optimistes qu’auparavant, l’OCDE (2021[3]) prévoit des disparités notables en ce qui concerne le rythme et l’évolution de la reprise dans les pays membres. De fait, le taux de chômage est déjà revenu au niveau enregistré avant la crise dans un petit nombre de pays et, d’ici la fin de 2022, il l’atteindra également ou s’en approchera dans beaucoup d’autres. Dans quelques-uns, en revanche, l’emploi ne devrait pas retrouver son niveau prépandémique avant plusieurs années.
Graphique 1.14. Dans de nombreux pays, le chômage n’aura pas renoué avec son taux antérieur à la fin de 2022
Copier le lien de Graphique 1.14. Dans de nombreux pays, le chômage n’aura pas renoué avec son taux antérieur à la fin de 2022Taux de chômage projetés au 4e trimestre 2022, écart en point de pourcentage par rapport au 4e trimestre 2019

Note : EA = zone euro.
Source : OCDE (2021[3]), Perspectives économiques de l'OCDE, Volume 2021 Numéro 1, https://doi.org/10.1787/631c1b44-fr.
C’est seulement quand le marché du travail ne sera plus exposé au risque de restrictions obligatoires de l’activité, à la fermeture des établissements scolaires, et aux craintes individuelles de contracter l’infection que l’on pourra appréhender pleinement l’ampleur de la reprise nécessaire. Divers facteurs détermineront sans doute la nature et la rapidité de la reprise de l’emploi : le pourcentage des emplois actuellement « gelés » - chômage technique ou horaires réduits - que la pandémie détruira à terme, provoquant une nouvelle flambée des pertes d’emplois ; la facilité avec laquelle ceux qui sont devenus inactifs peuvent réintégrer la population active ; et l’ampleur des créations d’emplois pour satisfaire aux besoins du nombre grandissant de personnes actuellement sans travail.
1.3. Qui sont les principales victimes de la crise ? Qui bénéficie de la reprise ?
Copier le lien de 1.3. Qui sont les principales victimes de la crise ? Qui bénéficie de la reprise ?Alors que le déploiement de la vaccination permet d’espérer une fin prochaine de la pandémie dans plusieurs pays de l’OCDE, les marchés du travail de la zone demeurent confrontés à d’énormes difficultés. Un nombre sans précédent de salariés en horaires réduits, au chômage technique ou au chômage déclaré n’ont pas, ou peu, travaillé depuis plus d’un an. Cette absence d’activité professionnelle risque d’avoir des effets considérablement plus durables que la crise elle-même. Comme il est maintenant possible de faire le point sur les retombées probables de l’année écoulée, il convient d’analyser ce bilan et d’en déduire quelles catégories de la population subiront les conséquences économiques de la crise au cours des mois et des années à venir.
1.3.1. Incidence sectorielle de la crise
L’une des caractéristiques de la crise induite par le COVID‑19 est son caractère éminemment sectoriel
Durant la première phase de la crise, alors que des confinements étaient en vigueur dans de nombreux pays de l’OCDE, les mesures rigoureuses de restriction des déplacements et de distanciation physique face au COVID‑19 ont amené de nombreux secteurs à suspendre leur activité. Le premier choc de la pandémie a donc été réparti sur de larges pans de l’économie. Mais alors que les économies redémarraient lentement et que nous nous sommes habitués à vivre et à travailler avec le virus, des secteurs comme l’hôtellerie et la restauration, le tourisme, la culture et les loisirs ont vu leur situation s’aggraver18.
Dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, le nombre d’heures travaillées dans l’OCDE a diminué de plus de moitié au deuxième trimestre de 2020. À l’époque, on pensait que les arrêts d’activité seraient de courte durée, ce qui a incité les employeurs à faire largement appel aux dispositifs de maintien de l’emploi pour conserver leurs salariés en prévision d’une reprise en V. En conséquence, près de deux heures perdues sur trois sont dues à la réduction des heures de travail dans ce secteur (Graphique 1.15). Au troisième trimestre, lorsque les magasins, restaurants et hôtels ont rouvert, la baisse des heures travaillées a été plus modérée (20 %), de nombreux salariés en chômage partiel ou en mise à pied temporaire reprenant le travail. La charge de l’ajustement s’est cependant portée sur la marge extensive ; en effet, si bon nombre des salariés en horaires réduits sont retournés au travail, les emplois détruits n’ont pas été recréés. Les destructions d’emplois ont ainsi compté pour plus de 80 % des heures de travail perdues au troisième trimestre de 2020. Un schéma similaire a été observé dans le secteur culturel, où le nombre d’heures travaillées a fléchi de plus de 42 % au deuxième trimestre de 2020, avant de remonter légèrement pour atteindre 14 %, en glissement annuel, au troisième trimestre de 2020. Une exception notable à cette évolution est constatée aux États-Unis, où le recours aux mises à pied temporaires a fait que l’absorption par la marge extensive de la réduction des heures travaillées - même au deuxième trimestre de 2020 - a été plus marquée, les destructions nettes d’emplois comptant pour environ quatre heures de travail perdues sur cinq dans des secteurs comme la culture et l’hôtellerie et la restauration, y compris au deuxième trimestre de 2020.
Contrairement à ces secteurs, qui ont connu une baisse modérée du nombre d’heures de travail perdues sous l’effet des destructions nettes d’emploi au troisième trimestre de 2020, celui du transport et de l’entreposage a vu ce chiffre augmenter durant cette même période. Cette situation tient peut-être à l’offre restreinte d’emplois saisonniers et (ou) au fait que les emplois d’une partie des salariés qui, dans un premier temps, ont travaillé en horaires réduits ou ont été temporairement mis à pied ont été supprimés au troisième trimestre - ce qui pourrait témoigner d’une évolution des attentes quant à la durée de la crise, notamment en ce qui concerne la demande future de déplacements19.
Graphique 1.15. Décomposition des horaires, par secteur
Copier le lien de Graphique 1.15. Décomposition des horaires, par secteurMoyenne de l’OCDE, variation en %, en glissement annuel

Note : *l’échelle est différente. Le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Moyenne des pays suivants : UE (à l’exception de l’Allemagne), Chili, États-Unis, Japon, Mexique, Norvège, Royaume-Uni, Suisse et Turquie.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’Enquête européenne sur les forces de travail ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Pendant le troisième trimestre également, le commerce de détail, qui avait été la première victime de la crise, a commencé à bénéficier, parallèlement au secteur de la fabrication, d’une réorientation des dépenses des services vers les biens, ce qui a modéré la réduction des heures de travail observée au cours de cette période. Dans le même temps, plusieurs secteurs - dont l’immobilier, les services aux entreprises et la construction - ont connu un vigoureux rebond sous l’effet de la réouverture progressive des économies au cours du trimestre et du retour du nombre d’heures de travail aux niveaux constatés l’année précédente, avant la pandémie.
Dans l’information et la communication, ainsi que dans la finance et les assurances, le nombre d’heures travaillées a en revanche augmenté par rapport à l’année antérieure, ces secteurs ne faisant guère appel à la réduction des horaires de travail mais augmentant l’utilisation de la main d’œuvre à la marge extensive. À vrai dire, l’emploi dans ces deux secteurs a continué de croître, en moyenne, au plus fort de la crise. Dans leur cas, ce schéma s’explique sans doute par la rapidité à laquelle ils ont su s’adapter en modifiant leurs pratiques de travail, moyennant la diminution des déplacements et le télétravail par exemple (voir Dingel et Neiman (2020[29])).
Dans les secteurs où les effets maximaux de la crise ont été de courte durée, comme l’immobilier, ainsi que la santé et l’action sociale, la chute des heures non travaillées imputables aux salariés en horaires réduits ou au chômage technique observée entre le deuxième et le troisième trimestres de 2020 ne s’est pas accompagnée d’une hausse des destructions nettes d’emplois au troisième trimestre. Ce schéma permet de penser que, dans ces secteurs, le recours massif aux dispositifs de maintien de l’emploi, qui a permis aux salariés en horaires réduits de reprendre rapidement le travail lorsque l’activité a redémarré, a porté ses fruits. D’autres secteurs - comme l’agriculture - moins tributaires de la proximité physique ont aussi été beaucoup moins touchés.
Lorsque le nombre de cas est reparti à la hausse, au quatrième trimestre de 2020, la baisse des heures travaillées sur douze mois s’est accentuée dans quasiment tous les secteurs par rapport à celle observée au trimestre précédent. Ont fait exception les secteurs dont les salariés ont pu assez bien s’adapter aux restrictions sur les déplacements grâce au télétravail, à savoir ceux de l’information et la communication, des services financiers et d’assurance et des services aux entreprises. Malgré l’incidence négative de la deuxième vague sur le nombre d’heures travaillées, la majorité des secteurs ont été en mesure de s’adapter, essentiellement par la réduction des heures de travail des salariés, la marge extensive n’absorbant une partie de cet effet que dans les secteurs les plus durement frappés - ceux des services d’hôtellerie et de restauration et de la culture.
Une forte incertitude subsiste quant à la durée et à la nature des restrictions actuelles (et changeantes) sur l’activité, et quant à la permanence des modifications que les périodes prolongées de confinement ont apporté aux habitudes et aux préférences des consommateurs. Certains secteurs, comme la construction et l’immobilier, peuvent bénéficier, avant même que la pandémie ne prenne fin, de la faiblesse des taux d’intérêt, de la demande refoulée et du désir des consommateurs d’améliorer leur cadre de vie, mais dans d’autres, la reprise risque d’arriver trop tard pour de nombreuses entreprises. Si les consommateurs modifient de manière permanente leurs façons de travailler, de faire des courses et d’occuper leur temps libre, certains secteurs risquent de ne jamais rebondir, même avec l’accélération de la vaccination. Des travaux récents de l’OCDE prévoient un fort accroissement du nombre d’entreprises susceptibles de connaître des difficultés sous l’effet de la chute des bénéfices résultant de la pandémie et des restrictions qui lui sont associées (Demmou et al., 2021[18]). Bien que les résultats varient selon les catégories d’entreprises, dans les secteurs qui subissent le plus important contrecoup, comme les « Activités d’hébergement et de restauration » et les « Arts et spectacles », pas moins de 32 % et 24 %, respectivement, d’entreprises par ailleurs viables devraient connaître de grandes difficultés, même dans le contexte des mesures de soutien en vigueur. Si une vague de faillites s’annonce, la sous-utilisation de la main d’œuvre dans certains secteurs de l’économie pourrait bien perdurer.
L’incidence de la pandémie du COVID‑19 s’est concentrée sur le secteur des services, ce qui est inhabituel. En effet, contrairement à l’industrie manufacturière et à la construction, qui souffrent généralement davantage des ralentissements conjoncturels, celui-ci est d’ordinaire résilient. Les retombées massives de la récession actuelle sur ce secteur pourraient influer sur la rapidité de la reprise (Beraia et Wolf, 2021[30]) et, compte tenu de la concentration de certaines catégories socioéconomiques dans ces professions - sur l’incidence de la crise sur les plus vulnérables (Encadré 1.3).
Encadré 1.3. Concentration sectorielle des catégories sociodémographiques en Europe
Copier le lien de Encadré 1.3. Concentration sectorielle des catégories sociodémographiques en EuropeCertaines catégories démographiques sont concentrées dans des secteurs touchés de plein fouet par les destructions nettes d’emplois
En Europe, au premier trimestre de 2020, les restaurants, les magasins et les lieux récréatifs ont été contraints de fermer, les voyages aériens ont été interrompus, et les transports publics fortement réduits. Plusieurs études ont maintenant analysé l’effet de ces arrêts d’activité et examiné dans quelle mesure la concentration sectorielle détermine les catégories de travailleurs les plus touchées. Ainsi, se fondant sur des données du Royaume-Uni, Joyce et Yu (2020[31]) constatent que 17 % des femmes travaillaient dans un secteur ayant cessé toute activité pendant le premier confinement, alors que ce chiffre se montait à 13 % seulement pour les hommes. De même, les salariés âgés de moins de 25 ans étaient deux fois et demi plus susceptibles que les autres de travailler dans l’un de ces secteurs.
Néanmoins, l’incidence probable de la crise du COVID‑19 sur les destructions nettes d’emploi ne dépend pas seulement de l’éventuelle interruption d’activité d’un secteur, mais aussi du recul de la demande des consommateurs, des attentes sectorielles quant à la durée de l’arrêt d’activité, de la facilité à licencier et embaucher (et reformer) des employés et, dans le même ordre d’idée, de la mesure dans laquelle les secteurs ont eu recours à la marge extensive ou intensive pour absorber les effets de la crise sur le marché du travail. Une étude récemment menée aux États-Unis au moyen de données de Google Trends pour estimer les retombées des interventions non pharmaceutiques sur les demandes d’assurance-chômage constate qu’en mars 2020 les restrictions imposées aux cafés et restaurants et la fermeture des commerces non essentiels n’ont été à l’origine que de 6 % et 6.4 %, respectivement, des demandes déposées, signe que leur augmentation récente tient pour l’essentiel à d’autres facteurs (Kong et Prinz, 2020[32]). Ce résultat concorde avec les données présentées dans OCDE (2020[5]), qui concluait que la majeure partie de la hausse des demandes d’assurance-chômage aux États-Unis au cours de cette période était imputable aux restrictions auxquelles se sont volontairement soumis les individus et les entreprises à la suite de la déclaration d’urgence fédérale et de la publication de directives fédérales, et non à d’autres interventions non pharmaceutiques.
Le Graphique 1.16 ci-après illustre la concentration sectorielle de plusieurs groupes démographiques et met notamment en évidence les secteurs où de nombreux emplois nets ont été détruits pendant la crise (ceux où un recul trimestriel de plus de 3 % sur 12 mois du nombre d’heures travaillées est imputable à ces destructions).
Les salariés exerçant des emplois peu rémunérés couraient deux fois plus de risques de travailler dans un secteur victime d’un nombre substantiel de destructions nettes d’emplois, et plus de la moitié des salariés peu qualifiés travaillaient dans des secteurs lourdement frappés par la crise. À titre comparatif, cette proportion était inférieure à un sur cinq pour les salariés très qualifiés.
Les jeunes sont particulièrement concentrés dans les secteurs où de nombreux emplois nets ont été détruits. En 2019, 12 % d’entre eux travaillaient dans le secteur des services d’hébergement et de restauration, qui a connu des destructions nettes d’emplois au deuxième et au troisième trimestres de 2020.
Les hommes étaient plus susceptibles de travailler dans des secteurs où de nombreux emplois nets ont été détruits au début de la pandémie, au deuxième trimestre de 2020. En effet, si les femmes sont effectivement plus concentrées dans les secteurs des services d’hébergement et de restauration et du commerce de détail, elles travaillent aussi plus souvent dans ceux de l’éducation et de l’administration publique, ou de la santé et de l’action sociale, qui ont été relativement épargnés par ce phénomène. Néanmoins, dans les phases ultérieures de la crise, lorsque les secteurs de la construction et de l’agriculture, où la main d’œuvre masculine domine, ont pu reprendre leur activité, l’équilibre femmes-hommes s’est rétabli dans les secteurs où des destructions d’emplois massives sont intervenues au troisième trimestre de 2020.
Graphique 1.16. Concentration sectorielle des catégories sociodémographiques en Europe
Copier le lien de Graphique 1.16. Concentration sectorielle des catégories sociodémographiques en EuropePourcentage, 2019

Note : répartition sectorielle de chaque catégorie de travailleurs. Les secteurs lourdement frappés par les destructions d’emplois sont définis comme ceux dans lesquels le nombre d’heures travaillées a reculé de plus de 3 % sur douze mois, en moyenne, dans l’UE (à l’exclusion de l’Allemagne) sous l’effet des destructions nettes d’emplois intervenues au cours du (des) trimestre(s) indiqué(s). Les secteurs les moins touchés par ce phénomène sont tous les autres secteurs. La concentration sectorielle ne change pas lorsque l’on retire les étudiants de l’échantillon.
Source : Enquête sur les forces de travail de l'Union européenne.
1.3.2. Incidence de la crise sur les catégories sociodémographiques
La pandémie du coronavirus a eu des retombées économiques très diverses sur les différentes catégories socioéconomiques : certaines ont supporté l’essentiel des conséquences de la crise tandis que d’autres en ont peu souffert et se sont rapidement relevées. Aux États-Unis, par exemple, où l’on a fait appel aux données sur les opérations de plusieurs entreprises privées pour étudier l’incidence de la pandémie sur l’emploi et les dépenses des particuliers, il apparaît que l’emploi s’est en grande partie redressé dans les quintiles supérieurs de revenu alors qu’il demeure atone à l’extrémité inférieure de la distribution20.
Bien des études ont déjà été consacrées aux répercussions de la pandémie sur certaines catégories socioéconomiques, notamment les salariés peu rémunérés, les personnes peu qualifiées, les jeunes et les femmes (voir par exemple OCDE (2020[5]), Adams-Prassl et al. (2020[33]), Cheng et al. (2020[20])). S’appuyant sur ces travaux, l’analyse qui suit examine la façon dont ces effets ont évolué au cours de la crise, et s’intéresse en particulier à ceux qui ont bénéficié de l’ajustement du marché du travail par le recours à la marge intensive plutôt qu’extensive, à savoir à la réduction des horaires des salariés plutôt qu’au chômage. L’incidence de la pandémie a revêtu des formes diverses selon les catégories sociodémographiques, et influera sans doute sur la rapidité de la reprise et sur les problèmes à plus long terme qui pourraient encore surgir.
Les professions peu rémunératrices ont été durement frappées et la crise s’est en grande partie traduite par des destructions d’emplois
La pandémie a modifié la façon dont nous considérons les salariés faiblement rémunérés et a clairement montré à quel point la société est tributaire des travailleurs essentiels. Dans le même temps, le travail héroïque de ces salariés, exercé dans des conditions souvent dangereuses et éreintantes, a suscité de nombreux éloges. D’aucuns ont exprimé en parallèle le regret que la qualité des emplois dans plusieurs secteurs essentiels ne corresponde ni à l’importance du travail effectué, ni aux risques encourus. En effet, il ressort de travaux récents fondés sur les données relatives à 800 000 personnes bénéficiant d’une assurance privée à Philadelphie (États-Unis) que, pendant le confinement, les risques pour les travailleurs essentiels de contracter le COVID‑19 étaient supérieurs de 55 % à ceux des autres (Song et al., 2021[34]). Si la définition du travail considéré « essentiel » n’est pas claire et varie selon les pays (et même à l’intérieur de ces derniers), la catégorie des « travailleurs essentiels » recouvre en général ceux des secteurs suivants : santé et action sociale ; éducation et puériculture ; produits alimentaires et autres produits de première nécessité ; services publics stratégiques ; administrations locales et nationales ; services d’utilité publique ; sécurité publique et nationale ; transports21. En Europe, ces travailleurs représentent un peu plus d’un quart des salariés22.
Si la protection de tous les travailleurs essentiels est incontestablement importante, seuls certains d’entre eux doivent être physiquement présents sur leur lieu de travail. Ces derniers, les plus exposés aux risques sanitaires, sont généralement qualifiés de travailleurs « de première ligne » et, dans de nombreux pays, ont bénéficié d’un accès prioritaire aux services d’accueil des enfants, au matériel de protection et aux vaccins. Plus exposés au virus, ils sont aussi généralement moins en mesure de se prémunir contre ses conséquences financières (voir Encadré 1.4 sur les travailleurs de première ligne dans le secteur de la dépendance). Dans le prolongement des travaux de Dingel et Neiman (2020[29]) visant à recenser les travailleurs essentiels dont le travail requiert une présence physique, une étude récente de Blau, Koebe et Meyerhofer (2020[35]) cherche à isoler les « travailleurs de première ligne » de la catégorie plus vaste des travailleurs essentiels. Les auteurs constatent qu’aux États-Unis, alors que cette dernière tend à reproduire les caractéristiques démographiques de la population active, les travailleurs de première ligne ont un niveau de qualification plus faible, sont généralement moins bien rémunérés, et comportent une proportion relativement élevée d’immigrés.
Outre la plus forte exposition à la contamination des travailleurs de première ligne faiblement rémunérés, les travailleurs exerçant des emplois peu rémunérateurs ont été de manière générale nettement plus vulnérables aux pertes de revenu, d’emploi, et d’heures de travail résultant de la pandémie. Qui plus est, les dispositifs de maintien dans l’emploi semblent avoir été moins efficaces pour ces salariés, dont la baisse des heures de travail relève en grande partie de la marge extensive (voir le chapitre 2 pour une analyse approfondie des dispositifs de maintien dans l’emploi). Cela tient probablement à la moindre proportion d’emplois faiblement rémunérés s’inscrivant dans le cadre de contrats de travail stables et protecteurs, et aux coûts de recrutement et de licenciement plus bas de cette catégorie de travailleurs.
Le Graphique 1.17 reprend les catégories professionnelles définies dans Goos, Manning et Salomons (2014[36]) et les regroupe en trois catégories : fortement rémunératrices, moyennement rémunératrices et faiblement rémunératrices23. Les professions faiblement rémunératrices ont été rudement frappées dans les premiers mois de la crise. En effet, le nombre d’heures dans ces métiers a fléchi de 28 % en moyenne dans l’OCDE, soit 18 points de pourcentage de plus que les professions hautement rémunérées. Dans des pays comme l’Espagne et le Portugal, il a accusé un repli de plus de 40 % par rapport à l’année précédente (Annexe 1.B). Ces évolutions contrastent avec celles du nombre de postes à pourvoir observées après le déclenchement de la crise, dont la baisse avait été comparable dans les professions fortement et faiblement rémunérées (OCDE, 2020[5]), alors qu’elle était légèrement plus marquée dans les professions moyennement rémunératrices24.
De surcroît, l’incidence apparemment homogène de la crise sur les postes vacants semble avoir masqué un effet très différent sur les marges extensive et intensive, comme le révèle le nombre d’heures de travail des personnes en emploi. Au deuxième trimestre de 2020, dans l’OCDE, les destructions nettes d’emplois ont été à l’origine de plus de 34 % de la réduction du temps de travail dans les professions peu rémunératrices. Dans les professions fortement rémunérées, en revanche, même dans le contexte d’un recul du temps de travail total, le nombre d’heures travaillées à la marge extensive a continué de progresser. Il semblerait donc que les salariés faiblement rémunérés ont été doublement désavantagés. Outre le recul massif des heures de travail dans cette catégorie d’emplois, l’ampleur du chômage qui en est résulté semble indiquer que l’instabilité, les pertes de revenu et le préjudice professionnel les ont touchés de manière disproportionnée.
Au troisième trimestre de 2020, alors que le temps de travail total des salariés hautement rémunérés était largement revenu au niveau observé avant la pandémie, il restait inférieur de 10 % à celui constaté en 2019 pour les moins rémunérés, l’ajustement s’opérant essentiellement (plus de 80 %) au travers des destructions d’emplois. Il convient également de noter que durant ce même trimestre, alors que le temps de travail repartait à la hausse, le schéma de la reprise dans les professions peu et moyennement rémunérées a présenté une certaine convergence - bon nombre des salariés en horaires réduits ont repris le travail, mais il n’y a guère eu d’amélioration à la marge extensive.
Encadré 1.4. Les travailleurs de première ligne dans le secteur de la dépendance
Copier le lien de Encadré 1.4. Les travailleurs de première ligne dans le secteur de la dépendanceLe secteur de la dépendance a été durement frappé par le COVID‑19
Compte tenu des risques élevés auxquels les personnes âgées et celles souffrant de de pathologies chroniques sont confrontées, les travailleurs du secteur de la dépendance ont joué un rôle exceptionnellement important pendant la crise. Selon les estimations, pas moins de 50 % des décès liés au virus sont intervenus dans les établissements de soins de longue durée (OCDE, 2020[37]), situation qui a mis en lumière, en particulier, le manque de personnel dans ce secteur.
Dans la majorité des pays de l’OCDE, le secteur de la dépendance souffre d’une pénurie de main d'œuvre. Un rapport récent de l’OCDE (OCDE, 2020[38]) portant sur ce secteur a constaté qu’entre 2011 et 2016, déjà, le nombre de personnes âgées augmentait plus rapidement que le nombre de soignants dans trois quarts des pays membres. Pour y maintenir le rapport actuel de cinq soignants pour 100 personnes âgées de 65 ans et plus, il faudrait que les effectifs du secteur augmentent de 13.5 millions de personnes d’ici à 2040. Comme de nombreuses personnes dépendantes ont contracté le virus, les soignants ont été exposés à un risque de contamination accru. La pandémie a mis en relief les problèmes structurels à l’origine de la pénurie de personnel, à savoir la médiocrité des emplois et les difficultés de recrutement et de rétention.
La médiocrité des emplois amène les salariés à quitter le secteur des soins aux personnes âgées
Les bas salaires et la médiocrité des emplois, qui créent des difficultés de recrutement et de rétention, aggravent la pénurie de personnel. Par rapport au personnel hospitalier exerçant des métiers similaires, les travailleurs du secteur de la dépendance ont généralement moins de possibilités de promotion et des salaires sensiblement inférieurs. Leur salaire médian dans les pays européens (9 EUR de l’heure) est en effet inférieur de plus de 50 % à celui de leurs homologues hospitaliers (OCDE, 2020[38]).
En parallèle, l’emploi atypique, travail à temps partiel et temporaire compris, est répandu dans le secteur, dont près de la moitié (45 %) du personnel travaille à temps partiel dans les pays de l’OCDE (pourcentage représentant plus du double de celui constaté dans l’ensemble de l’économie), et près d’un employé sur cinq est en contrat temporaire (contre un peu plus d’un sur dix dans les hôpitaux). La moitié de ces travailleurs sont en travail posté, lequel est associé à des risques pour la santé, comme l’anxiété, le surmenage et la dépression. Même avant la crise, les salariés du secteur souffraient de manière disproportionnée de problèmes de santé, dont 44 % en moyenne de problèmes de santé mentale (OCDE, 2020[38]). Compte tenu des risques élevés d’infection des patients en soins de longue durée et du stress, amplifié par la crise, qui leur est lié, ces risques professionnels devraient s’intensifier.
Repenser la qualité de l’emploi des travailleurs de première ligne
L’importance des travailleurs de première ligne, qui ont assuré le fonctionnement de nos sociétés pendant les confinements et dans un contexte de hausse des taux de contamination, souvent au prix de risques considérables pour leur santé, est de plus en plus reconnue (Song et al., 2021[34]). La pandémie du COVID‑19 a mis en évidence les demandes auxquelles sont assujettis certains travailleurs, et le peu qu’ils obtiennent en retour. On ignore pour l’heure si c’est là l’amorce d’une réflexion approfondie sur la façon dont ces emplois sont valorisés et rémunérés, mais des appels de plus en plus nombreux à l’instauration de primes de risques et d’autres avantages se font entendre dans plusieurs pays.
Au-delà des salaires, la promotion d’environnements de travail plus sains et la prévention des accidents et maladies professionnels devraient mobiliser davantage l’attention à l’ère post-COVID‑19. Dans le secteur de la dépendance, divers pays ont déjà pris des mesures en ce sens ; les Pays-Bas ont mis en place des programmes d’accompagnement, le Japon assure des services de conseil en matière de prévention des accidents et du surmenage, et quelques pays, comme la Corée et le Danemark, développent les offres de formation et les perspectives professionnelles des employés du secteur (OCDE, 2020[38]).
Au quatrième trimestre de 2020, la baisse des heures de travail sur douze mois s’est à nouveau accentuée. Si, une fois encore, la totalité des heures perdues dans les professions très rémunératrices a été globalement absorbée par la réduction des heures de travail (une hausse de la création d’emplois a en fait atténué les pertes d’heures travaillées dues aux horaires réduits), les pertes en heures de travail dues aux destructions d’emplois dans les métiers peu rémunérateurs n’ont pas été récupérées. À vrai dire, les destructions d’emplois dans les professions faiblement rémunérées, à l’origine de plus de la moitié des heures de travail réduites, en ont représenté une part encore plus importante au cours de la deuxième vague que lors de la première, au deuxième trimestre. Contrairement aux métiers moyennement et fortement rémunérés, l’essentiel des heures perdues restantes sont imputables aux salariés qui ont travaillé zéro heure (et non en horaires réduits).
Graphique 1.17. Décomposition des heures par catégorie professionnelle
Copier le lien de Graphique 1.17. Décomposition des heures par catégorie professionnelleMoyenne de l’OCDE, variation en %, en glissement annuel

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Moyenne des pays suivants : UE (à l’exception de l’Allemagne), Chili, États-Unis, Japon, Mexique, Norvège, Royaume-Uni, Suisse et Turquie. Une table de correspondance officieuse entre la nomenclature de la CITP, la Japan Standard Occupation Classification (JSOC) et la Classification mexicaine des professions (CMO) a été établie par le Secrétariat de l’OCDE aux seules fins de cette analyse.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’Enquête européenne sur les forces de travail ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Les profondes retombées de la pandémie sur les professions peu rémunératrices tiennent en partie à ce que celles-ci sont pour beaucoup concentrées dans les secteurs les plus touchés par les interruptions d’activité et le recul de la demande - notamment le commerce de détail et les échanges (Encadré 1.3) -, mais peut-être aussi à la composition des compétences de ces secteurs et à ses conséquences sur la disposition des entreprises à retenir (ou pas) les travailleurs dotés de ces qualifications dans le cadre de dispositifs de maintien dans l’emploi.
... Et les salariés moins instruits sont plus susceptibles d’avoir perdu leur emploi
Dans les premières phases de la pandémie, une chute considérable et généralisée des heures travaillées a été observée chez les salariés de tous niveaux d’études. L’effet initial sur l’emploi s’est toutefois fait plus fortement ressentir chez les moins instruits. Dans l’OCDE, le nombre moyen d’heures travaillées a reculé de 8.5 % chez les très qualifiés, de 20 % chez les salariés au niveau d’études intermédiaire, et de 24 % chez ceux qui étaient tout au plus diplômés du premier cycle du secondaire (Graphique 1.18). Ces disparités ont été particulièrement marquées dans des pays comme les États-Unis, la Finlande, l’Irlande, la République slovaque et la Slovénie, où la réduction des heures de travail chez les peu qualifiés a été supérieure de 25 points à celle observée chez ceux qui avaient un niveau d’études élevé (supérieur pour certains). Elles ont été moins prononcées en Autriche, au Danemark, en Grèce, au Mexique, en République tchèque et en Suisse, où l’écart est resté inférieur à 10 points. En Lettonie et en Lituanie, l’incidence sur l’emploi a été plus forte pour les très qualifiés.
Graphique 1.18. Décomposition des heures par niveau d’études
Copier le lien de Graphique 1.18. Décomposition des heures par niveau d’étudesVariation en %, en glissement annuel

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Moyenne des pays suivants : UE (à l’exception de l’Allemagne), Canada, Chili, États-Unis, Mexique, Norvège, Royaume-Uni, Suisse et Turquie.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’Enquête européenne sur les forces de travail ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Enquête sur la population active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Outre que la contraction de la demande de travail a été plus forte pour les peu qualifiés, la réduction de leurs heures travaillées est plus souvent intervenue à la marge extensive. En effet, la hausse du chômage net dans cette catégorie a représenté la moitié environ des heures de travail perdues au cours de l’année précédant le deuxième trimestre de 2020, ce qui s’explique en partie par le fait que les emplois temporaires y sont plus répandus (voir l’Encadré 1.5) et ont moins été couverts par les dispositifs de maintien dans l’emploi. À l’inverse, le chômage net n’a pas augmenté chez les très qualifiés, ce qui concorde avec la constatation selon laquelle les destructions nettes d’emplois ont été limitées dans les professions fortement rémunératrices - la réduction des heures de travail a été intégralement opérée à la marge intensive25.
Une évolution peut-être plus inquiétante, du point de vue des inégalités croissantes dues à la pandémie sur le marché du travail, est celle de la composition des heures chômées entre le deuxième et le troisième trimestres de 2020. Contrairement à ce qui a été observé dans les professions faiblement, moyennement et hautement rémunératrices, les disparités éducatives se sont renforcées au troisième trimestre avec le retour aux horaires normaux de nombreux salariés moyennement et très qualifiés jusque-là en horaires réduits ou au chômage technique, alors que le chômage persistait chez les peu qualifiés - et a même augmenté dans certains pays comme la Belgique, le Chili, la Grèce, la Lettonie, la Lituanie, la Norvège, la Pologne, la République slovaque, la République tchèque, la Slovénie et la Suède.
Au quatrième trimestre de 2020, l’accélération de la propagation du virus et les restrictions concomitantes se sont traduites par une nouvelle diminution du nombre d’heures travaillées sur un an résultant en grande part de nouvelles réductions des heures de travail à tous les niveaux de qualification. Pour les salariés très qualifiés, toutefois, le recours à la marge intensive pour absorber le choc s’est accompagné d’une création nette d’emplois, tandis que chez les salariés moyennement et peu qualifiés, la baisse des heures de travail est intervenue aussi bien à la marge extensive qu’intensive26. Globalement, à la fin de 2020, le nombre de personnes peu qualifiées en emploi était inférieur de près de 10 % à l’année précédente, alors que l’emploi des personnes diplômées de l’enseignement post-secondaire au moins avait augmenté de 3% au cours de la même période.
Il convient de noter que l’analyse de la seule incidence de la crise sur l’emploi et les heures travaillées ne permet pas de saisir pleinement ses retombées sur les revenus. En effet, on ne peut distinguer, dans les données relatives aux heures travaillées, les salariés travaillant en horaires réduits dans le cadre de dispositifs de maintien dans l’emploi de ceux en contrat précaire dont les heures de travail perdues n’ont pas été indemnisées par ces dispositifs. La proportion de la réduction du temps de travail indemnisée a sans doute été encore plus faible chez les salariés peu rémunérés. Au Royaume-Uni, la Low Pay Commission a ainsi constaté une progression des revenus de la proportion de travailleurs en horaires réduits à plein salaire (Low Pay Commission, 2020[39]).
Du point de vue des employeurs, le recours aux dispositifs de financement des heures chômées pour conserver des employés en période de réduction temporaire de la demande a pour principal avantage de leur économiser les coûts liés au licenciement et à la réembauche de travailleurs (chapitre 2). Il y a tout lieu de penser que ces coûts sont plus élevés pour les travailleurs très qualifiés, qui occupent généralement des postes plus stables et bénéficient d’une protection de l’emploi et sont en outre, dans de nombreux cas, plus difficiles à remplacer. De surcroît, le remplacement de certains salariés suppose des coûts substantiels de requalification spécifique à l’entreprise ou au poste. Dans la mesure où ces postes ont aussi plus de chances d’être occupés par des personnes qualifiées, il paraît logique que le chômage représente une part plus faible de la réduction des heures de travail parmi les travailleurs qui ont un niveau de formation élevé (Pfann et Palm, 1993[40]). Quoique intuitive, la conclusion selon laquelle la rétention subventionnée de la main d’œuvre profite de manière disproportionnée aux plus qualifiés a des conséquences importantes pour la complémentarité du soutien à l’emploi et des allocations chômage, et laisse entendre qu’un régime d’assurance-chômage solide et d’autres dispositifs de remplacement des revenus des chômeurs sont nécessaires.
Encadré 1.5. Les travailleurs faiblement qualifiés se concentrent dans les emplois précaires en Europe
Copier le lien de Encadré 1.5. Les travailleurs faiblement qualifiés se concentrent dans les emplois précaires en EuropeLa première vague a frappé de manière disproportionnée les travailleurs temporaires du fait que même la création d’emplois intérimaires a été limitée
L’incidence de la pandémie du COVID‑19 sur le nombre d’heures travaillées par les salariés en contrat temporaire a été considérable et s’est en grande partie traduite par des destructions d’emplois - parmi les moins qualifiés notamment. Au deuxième trimestre de 2020, ces travailleurs ont vu leurs heures chuter de 28 % en moyenne en glissement annuel - un recul plus de deux fois supérieur à celui observé pour les salariés permanents (Graphique 1.19). La contribution des destructions nettes d’emplois à la réduction des heures travaillées est encore plus impressionnante. Parmi les travailleurs faiblement qualifiés sous contrat temporaire, elles sont responsables, au deuxième trimestre de 2020, de la perte d’un quart des heures travaillées par rapport au deuxième trimestre de 2019.
Cette évolution notable intervenue dans les premiers mois de la crise, alors que les contrats temporaires n’étaient pas renouvelés et que la création d’emplois était au point mort, témoigne de la tendance des secteurs durement frappés à faire amplement appel au travail temporaire, mais aussi de la précarité inhérente à ces contrats et de la facilité avec laquelle les employeurs peuvent licencier à faible coût ces travailleurs.
Graphique 1.19. Baisse du nombre d’heures travaillées par niveau d’études et statut d’emploi
Copier le lien de Graphique 1.19. Baisse du nombre d’heures travaillées par niveau d’études et statut d’emploiVariation en %, en glissement annuel

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Moyenne des pays de l’UE (à l’exclusion de l’Allemagne), de la Norvège, du Royaume-Uni, de la Suisse et de la Turquie. La catégorie « non salarié » comprend les travailleurs indépendants avec et sans employé(s) et ceux qui se définissent comme travailleurs familiaux.
Source : Calculs de l’OCDE à partir des bases de données EFT-UE et EU-KLEMS.
Les travailleurs indépendants ont également été frappés de plein fouet par la récession, mais le niveau d’études a moins joué
Au deuxième trimestre de 2020, le nombre d’heures travaillées des travailleurs indépendants avait reculé de 19 % par rapport au même trimestre de l’année antérieure. Ce repli, quoique sensiblement plus important (12 points) que celui observé chez les salariés, a cependant été plus également réparti entre les différents niveaux d’études - les plus qualifiés étant tout aussi touchés que les moins instruits (Graphique 1.19). Cette configuration tient sans doute en partie à ce que de nombreux travailleurs indépendants peu qualifiés, notamment ceux qui trouvent du travail par le biais des applications, comme les chauffeurs de VTC, comptent parmi les moins atteints par la baisse des heures travaillées1. Au Royaume-Uni, par exemple, pas moins d’un tiers de ces travailleurs ont déclaré avoir plus de travail qu’à l’ordinaire (Blundell, Machin et Ventura, 2020[41]). Bon nombre d’entre eux ont généralement un niveau d’études plus faible, mais la forte demande pour leurs services a pu partiellement compenser le nombre d’heures perdues par d’autres travailleurs de la même catégorie. Il se peut aussi que des salariés licenciés se soient tournés vers ces emplois de plateforme pour compenser leur perte de revenu.
En même temps, la moindre tendance des travailleurs indépendants peu qualifiés à absorber la perte d’heures travaillées par la marge intensive que leurs homologues moyennement et très qualifiés aux deuxième et troisième trimestres de 2020 tient peut-être à ce que des contraintes de liquidité ou la crainte de perdre leur emploi les ont incités à poursuivre leur activité malgré les risques sanitaires élevés. Un étude récente menée au Royaume-Uni a constaté que de nombreux « travailleurs à la demande », quoique conscients des risques pour leur santé, ont continué à travailler, et que bon nombre d’entre eux n’étaient pas informés des dispositifs d’aide publics dont ils pouvaient bénéficier (Blundell, Machin et Ventura, 2020[41]). Cette forte proportion d’heures perdues imputable à la marge intensive - parmi les travailleurs indépendants moyennement et très qualifiés notamment - est peut-être un indicateur de l’accès aux mesures gouvernementales ciblées de soutien au revenu (OCDE, (2020[42])).
Les retombées de la deuxième vague ont été moins inégales
Durant la deuxième vague de la pandémie, la baisse des heures travaillées a nettement moins pesé sur les salariés et les travailleurs temporaires. En effet, la perte d’heures travaillées sur 12 mois des peu qualifiés, au dernier trimestre de 2020, a été légèrement plus élevée chez les salariés en contrat à durée indéterminée que chez ceux en contrat temporaire (Graphique 1.19). Cette évolution a été encore plus marquée en ce qui concerne les heures perdues suite à des destructions d’emplois.
Si la facilité avec laquelle les contrats temporaires peuvent être résiliés explique sans doute en partie l’ampleur du choc subi par leurs titulaires au cours de la première vague de la pandémie, elle a peut-être aussi contribué à amortir celui de la deuxième du fait que, dans le climat d’incertitude régnant, les entreprises hésitaient à recruter des employés permanents.
Quoi qu’il en soit, l’incidence de la crise sur la sécurité des revenus et le bien-être est en grande partie déterminée par ses tombées sur les travailleurs atypiques, qu’ils soient temporaires ou indépendants, car ceux-ci sont généralement moins bien protégés par les dispositifs de maintien dans l’emploi et d’assurance-chômage (voir OCDE (2020[42]) et OCDE (2020[5])).
1. Il ressort d’estimations européennes établies avant la pandémie qu’en moyenne, dans les pays européens, 6 % de la population adulte consacrent plus de 25 heures au travail de plateforme ou en dérivent plus de 25 % de leur revenu (CCR, Commission européenne, 2020[43]).
Le taux de chômage a bondi chez les jeunes...
La pandémie et les restrictions à l’activité qu’elle a entraînées ont fortement pesé sur les jeunes. Même en période de prospérité, le marché du travail des jeunes est très sensible aux cycles économiques ; leur recrutement relativement récent ne leur a pas permis d’acquérir une expérience et des compétences propres à l’entreprise et, en tant que derniers embauchés, ils sont souvent les premiers licenciés. La crise déclenchée par le COVID‑19 leur a par ailleurs été particulièrement préjudiciable du fait qu’ils travaillent plus souvent dans les secteurs qui ont été les plus touchés par les mesures de confinement et de distanciation physique, notamment ceux de l’hébergement et du commerce de détail non alimentaire (Encadré 1.3).
Au début de la pandémie, le chômage a flambé chez les jeunes de 15‑24 ans dans l’OCDE, passant d’un niveau historiquement bas de 11.5 % en février 2020 à 19 % en deux mois à peine, soit une hausse plus de deux fois supérieure, en points de pourcentage, à celle du taux de chômage des 25 ans et plus. À l’instar des chiffres globaux du chômage, ces fluctuations considérables tiennent en grande partie aux amples variations observées dans les pays qui ont fait fortement appel au chômage technique. Aux États-Unis comme au Canada, le taux de chômage des jeunes a augmenté de 17 points en deux mois à peine, atteignant plus de 27 % en avril 2020. Dans l’Union européenne, en revanche, il est pour l’heure resté sensiblement inférieur au niveau enregistré durant la crise financière mondiale (et dans les mois qui ont suivi) (Graphique 1.20). Néanmoins, même en Europe, sa hausse de 3 points depuis le début de l’année est nettement supérieure (d’un point) à celle observée pour les plus âgés. Il continue en outre d’augmenter dans de nombreux pays (Graphique 1.20). Cette forte progression tient sans doute aux pertes d’emplois, mais aussi au nombre croissant de jeunes qui arrivent sur le marché du travail mais qui, dans un contexte de faible recrutement, ne parviennent pas à trouver un premier emploi. Compte tenu des nouvelles restrictions à l’activité économique instaurées au quatrième trimestre de 2020 et au premier trimestre de 2021 et du nombre important de jeunes ayant achevé leurs études qui arrivent sur un marché du travail léthargique, ce taux devrait rester élevé un certain temps encore.
Graphique 1.20. Taux de chômage des jeunes par pays
Copier le lien de Graphique 1.20. Taux de chômage des jeunes par paysPersonnes de 15 à 24 ans, pourcentage

Note : * les derniers chiffres sont ceux d’avril 2021 pour la Belgique, le Chili, le Costa Rica et la Turquie, de mars 2021 pour le Royaume-Uni et la Slovénie, et de novembre 2020 pour la Norvège. Les niveaux maximaux correspondent aux mois suivants : avril 2020 pour les États-Unis et la Slovénie ; mai 2020 pour l’Autriche, le Canada, la Colombie, la Corée, la Finlande et la Lettonie ; juin 2020 pour le Chili, l’Espagne, la Hongrie, le Luxembourg et le Portugal ; juillet 2020 pour l’Australie, l’Estonie, la France, la Norvège et la Suède ; août 2020 pour Israël, les Pays-Bas et le Royaume-Uni ; septembre 2020 pour le Costa Rica, l’Irlande et la Lituanie ; décembre 2020 pour l’Allemagne ; janvier 2021 pour la Belgique, l’Italie, le Japon et la République tchèque ; février 2021 pour la Pologne et la Turquie ; mars 2021 pour le Danemark ; avril 2021 pour le Mexique et la République slovaque ; mai 2021 pour l’Islande. La moyenne pondérée du chômage des jeunes dans les pays de l’OCDE a atteint son niveau maximal en avril 2020.
Source : Base de données des statistiques du marché du travail à court terme de l’OCDE.
... puisque c’est principalement sous cette forme que l’incidence de la crise sur le marché du travail des jeunes s’est traduite
Étant donné la concentration des jeunes travailleurs dans les secteurs touchés par les mesures de confinement et de distanciation physique (Encadré 1.3) et dans les emplois précaires, il n’est pas surprenant qu’ils aient connu, parallèlement au chômage, des réductions considérables de leurs heures de travail. Au deuxième trimestre de 2020, dans l’OCDE, les réductions du temps de travail ont concouru pour près de moitié à la chute de 24 % des heures travaillées de cette tranche d’âge. Contrairement au schéma observé chez les travailleurs d’âge très actif et seniors, c’est seulement dans une minorité de pays, dont l’Autriche, l’Islande, la Turquie et, dans une moindre mesure, la Grèce, l’Italie et la République slovaque, que l’ajustement s’est opéré au travers d’une réduction partielle des heures de travail (voir Graphique 1.21 et Graphique 1.22). En effet, chez les jeunes, l’immense majorité de ces réductions est imputable à ceux dont le temps de travail a été ramené à zéro heures. Compte tenu du nombre considérable de jeunes travailleurs en contrat atypique, une partie de ces emplois sans heures travaillées n’ont sans doute pas bénéficié des dispositifs de maintien dans l’emploi (congés rémunérés ou non rémunérés par exemple) ; les données disponibles ne permettent cependant pas d’examiner l’ampleur du phénomène.
Graphique 1.21. Décomposition horaire : jeunes travailleurs
Copier le lien de Graphique 1.21. Décomposition horaire : jeunes travailleursVariation en %, en glissement annuel, 2020

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. On entend par « jeunes » les personnes âgées de 15 à 24 ans. Les pays sont classés par ordre croissant de la variation du nombre total d’heures au 2e trimestre de 2020 (Graphique 1.10). Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’Enquête européenne sur les forces de travail ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Enquête sur la population active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Enquête sur la population active du Japon ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Graphique 1.22. Décomposition horaire : travailleurs d’âge très actif et seniors
Copier le lien de Graphique 1.22. Décomposition horaire : travailleurs d’âge très actif et seniorsVariation en %, en glissement annuel, 2020

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. On entend par « travailleurs d’âge très actifs et seniors » les personnes âgées de 25 ans et plus. Les pays sont classés par ordre croissant de la variation du nombre total d’heures au 2e trimestre de 2020 (Graphique 1.10). Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’Enquête européenne sur les forces de travail ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Enquête sur la population active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Enquête sur la population active du Japon ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Au troisième trimestre 2020, suite à l’assouplissement des mesures de confinement et de distanciation physique dans l’OCDE, de nombreux jeunes travaillant zéro heures ont repris leur activité. Cependant, compte tenu de la part relativement importante du chômage dans la réduction de leur temps de travail, contrairement aux travailleurs d’âge très actif et seniors, leurs heures chômées n’ont pas sensiblement diminué27. Au quatrième trimestre 2020, alors que les salariés de tous âges revenaient aux horaires réduits, la baisse des heures sur douze mois résultant du chômage est restée importante pour eux.
La montée du chômage des jeunes provoquée par la pandémie tient essentiellement à deux facteurs. Il y a d’abord ceux, souvent employés dans des secteurs durement frappés et dans le cadre de contrats précaires, qui perdent leur travail. S’y ajoute toutefois le grand nombre de ceux qui quittent le système éducatif, soit parce qu’ils abandonnent leurs études, soit parce qu’ils les ont terminées, et peinent à trouver un emploi dans un contexte de pénurie d’offre. Les données internationales actualisées sur les recrutements de jeunes sont rares, mais l’examen du taux d’embauche, défini ici comme la proportion des jeunes salariés qui ont pris leur fonction au cours des trois derniers mois, en donne une idée (Graphique 1.23, partie A). Au deuxième trimestre de 2020, ce taux a substantiellement diminué - de plus de 5 points de pourcentage, en glissement annuel, en Espagne, en Grèce, en Irlande, au Portugal, en Italie, en France et en Estonie (Graphique 1.23, partie B)28. Cette baisse, qui s’est poursuivie, quoique à un moindre degré, aux deux trimestres suivants, permet de supposer que les nouveaux venus sur le marché du travail ont contribué dans une mesure relativement importante à la progression du chômage chez les jeunes.
Graphique 1.23. Taux d’embauche des jeunes en Europe
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Note : les embauches sont définites comme les salariés qui occupent leur emploi actuel de manière continue depuis moins de trois mois. Le taux d’embauche est défini comme le rapport des embauches à l’emploi. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés. p.p. : points de pourcentage
Source : calculs de l’OCDE basés sur des données communiquées par Eurostat et l’Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey).
L’augmentation du nombre de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif tient essentiellement à l’inactivité, de nombreux jeunes ayant dû mettre leur vie entre parenthèses
Bien des jeunes continuent de suivre des études à temps plein et ont déployé des efforts considérables, pendant toute la crise, pour apprendre à distance. Cette situation a eu des effets néfastes sur la santé mentale de bon nombre d’entre eux et son coût véritable, en termes de pertes d’apprentissage, chez les plus fragiles notamment, pourrait bien ne pas être pleinement appréhendé avant de nombreuses années. D’autres, ceux qui quittent maintenant le système d’enseignement ou avaient à peine mis pied sur le marché du travail lorsque la pandémie a frappé, sont particulièrement exposés au chômage dans l’immédiat, et au risque de séquelles durables s’ils doivent traverser une longue période de chômage et d’inactivité. Enfin, il y a ceux qui avaient prévu de travailler pendant leurs études pour les financer. Pour ces derniers, la pénurie d’emplois ne risque pas seulement de compromettre leur activité sur le marché du travail, mais aussi leur parcours éducatif et, partant, leurs perspectives professionnelles à long terme.
La crise a aussi considérablement diminué les possibilités de formation et d’apprentissage dans le cadre de l’emploi, les employeurs ayant souvent été contraints de supprimer ce type de programmes ou de les organiser à distance compte tenu des mesures de distanciation physique et de la fermeture des entreprises. En Allemagne, par exemple, moins de 500 000 personnes ont pu bénéficier de contrats d’apprentissage en 2020, chiffre en baisse de 9.4% par rapport à l’année précédente. Au Royaume-Uni, 61 000 formations seulement ont débuté dans le cadre d’apprentissages entre mars et juillet 2020 - soit un recul de plus de 45 % d’une année sur l’autre (OCDE, 2021[44]).
En 2019, le pourcentage de jeunes adultes sans emploi et sortis du système éducatif était le plus faible enregistré depuis le début du siècle. À la fin de 2019, avant le déclenchement de la pandémie, un peu plus d’un jeune de 15 à 29 ans sur dix était dans cette situation, en moyenne, dans les pays de l’OCDE. Or, dans les premières phases de la crise du COVID‑19, le taux de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif a flambé dans ces pays (Graphique 1.24, partie A), renversant la tendance de la décennie précédente ; il a par exemple augmenté de plus de 4 points dans des pays comme le Canada, les États-Unis29, l’Irlande, la Turquie, l’Espagne et le Portugal. Un élément particulièrement inquiétant au deuxième trimestre de 2020 a été la forte proportion du nombre grandissant de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif en situation d’inactivité.
Au troisième trimestre 2020, avec l’assouplissement des restrictions aux déplacements, les économies ont amorcé une réouverture et des emplois se sont créés (quoiqu’en nombre limité). De nombreux jeunes sans emploi et sortis du système éducatif ont recommencé à chercher activement du travail et l’augmentation, en glissement annuel, du taux de ces jeunes en situation d’inactivité a sensiblement diminué. Au quatrième trimestre 2020, ce chiffre demeurait toutefois élevé dans la majorité des pays - dont la Turquie, les États-Unis, la Grèce, l’Italie, l’Islande, l’Irlande, la Hongrie, l’Estonie et la France (Graphique 1.24, partie B).
Cette hausse du nombre de ces jeunes en situation d’inactivité n’est pas surprenante compte tenu des restrictions à l’activité imposées par le virus et de la réduction des offres d’emploi et des services de garde d’enfants. Elle se distingue cependant de celle observée pendant la crise financière mondiale (Carcillo et al., 2015[45]). Comme il est avéré que les périodes d’inactivité sont particulièrement préjudiciables aux perspectives professionnelles des jeunes, un taux élevé d’inactivité chez les jeunes jeunes sans emploi et sortis du système éducatif risque d’en aggraver les séquelles. Il conviendra donc de recenser et de contacter les jeunes qui ont abandonné le système d’enseignement, et de veiller à ne pas laisser les jeunes sans emploi et sortis du système éducatif s’éloigner encore davantage du marché du travail. Souvent, les jeunes les plus vulnérables ne prennent pas contact avec le Service public d’emploi (SPE) ou avec les services destinés aux jeunes parce qu’ils n’ont pas droit à un soutien au revenu, parce qu’ils n’ont pas confiance dans les pouvoirs publics, ou simplement parce qu’ils ne sont pas informés des aides auxquelles ils peuvent prétendre. Des interventions rapides et préventives seront d’une importance cruciale dans le cadre de la crise actuelle.
Graphique 1.24. Variation du taux de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif (15‑29 ans)
Copier le lien de Graphique 1.24. Variation du taux de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif (15‑29 ans)Variation en %, en glissement annuel, 2020

Note : NEET : jeunes sans emploi et sortis du système éducatif. Au Canada, la forte augmentation du taux de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif au deuxième trimestre tient en grande partie à la fermeture des établissements scolaires et aux grands nombres de jeunes qui, de ce fait, ont déclaré ne pas aller à l’école. Voir https://www150.statcan.gc.ca/n1/pub/81-599-x/81-599-x2020001-eng.htm pour des informations plus détaillées. Ailleurs, les données portent sur les taux d’inscription, et non de fréquentation scolaire ; la fermeture des écoles ne les modifie donc en rien. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés.
Source : calculs de l’OCDE basés sur l’EFT-UE ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Enquête sur les forces de travail) et Current Population Survey des États-Unis.
Le niveau d’études est généralement un facteur déterminant de la situation de jeune sans emploi et sorti du système éducatif. Dans les pays de l’OCDE, les jeunes de 25 à 29 ans n’ayant pas atteint le deuxième cycle de l’enseignement secondaire sont quatre fois plus susceptibles d’être sans emploi et sortis du système éducatif que les diplômés du supérieur (OCDE, 2020[46]). Par ailleurs, dans quasiment tous ces pays, les jeunes qui n’ont qu’un faible niveau d’études (premier cycle du secondaire au plus) sont fortement surreprésentés dans cette catégorie. Ces dernières années, toutefois, la proportion des jeunes possédant un niveau d’études intermédiaire ou élevé parmi les jeunes sans emploi et sortis du système éducatif a augmenté (Carcillo et al., 2015[45]) et, dans plusieurs pays, elle a encore progressé pendant la crise du COVID‑19 (Graphique 1.25). Dans une grande partie de l’OCDE, le pourcentage de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif ayant suivi quelques années d’enseignement supérieur au moins a progressé depuis le début de la crise, des hausses importantes ayant été observées dans plusieurs pays au début de la pandémie : au Danemark, en France, en Hongrie, en Lettonie, au Portugal et en Suède, le pourcentage des jeunes sans emploi et sortis du système éducatif ayant un niveau d’études élevé ou intermédiaire a accusé une augmentation de plus de 7 points de pourcentage au deuxième trimestre 2020. Et si, en glissement annuel, la croissance de ce taux s’est légèrement tassée au troisième trimestre 2020 dans la majorité des pays, elle a repris au dernier trimestre de l’année, et a même été supérieure à celle enregistrée au deuxième trimestre dans plusieurs pays.
Le manque d’expérience fait que les jeunes sont particulièrement exposés au chômage de longue durée et à ses séquelles
Une mauvaise conjoncture du marché du travail au moment où les jeunes terminent leurs études peut sérieusement compromettre leurs perspectives professionnelles. Ses conséquences durables, directement liées aux retombées de crises économiques, influent parfois lourdement sur le parcours professionnel de ces nouveaux arrivants. Chez les jeunes, elles interviennent généralement sous deux formes. Pour ceux qui ne parviennent pas à trouver un emploi dès leur arrivée sur le marché du travail, des périodes de chômage et, en particulier, d’inactivité peuvent hypothéquer les perspectives d’emploi et de rémunération (Dorsett et Lucchino, 2018[47]). Ceux qui trouvent du travail peuvent cependant aussi en pâtir durablement s’ils sont contraints d’accepter des postes subalternes, si la rareté des postes à pourvoir fait obstacle à leur mobilité, ou si leurs possibilités de formation et de promotion sont moindres30. Il ressort en effet de certains travaux qu’une forte récession au moment où les jeunes obtiennent leur diplôme réduit les rémunérations à l’entrée dans la vie active, et que cet effet persiste en outre par la suite. Une étude d’Altonji, Kahn et Speer (2016[48]) portant sur les États-Unis observe une baisse de rémunération d’environ 10 % du diplômé moyen entrant sur le marché du travail au cours d’une récession type, assortie d’une perte de revenu annuelle d’environ 1.8 % au cours des dix années suivant son diplôme. Oreopoulos, von Wachter et Heisz (2012[49]) obtiennent des résultats de même ordre à partir de données appariées employeurs-employés au Canada. Il apparaît également que ces effets nocifs s’étendent à la santé et au bien-être (Garrouste et Godard, 2016[50]).
Certaines catégories de jeunes sont particulièrement vulnérables à ces effets délétères. Des travaux ont ainsi constaté que c’est notamment le cas des jeunes peu qualifiés, ainsi que des diplômés de secteurs caractérisés par des rémunérations relativement faibles (voir Kroft, Lange et Notowidigdo (2013[27]) et Altonji, Kahn et Speer (2016[48])). Ces effets de répartition diffèrent en outre d’une récession à l’autre (Altonji, Kahn et Speer, 2016[48]). Par ailleurs, tout porte à croire que la distanciation physique et le télétravail résultant du COVID‑19 auront également des retombées négatives sur les perspectives professionnelles des jeunes qui ont réussi à obtenir un emploi, surtout dans les domaines où l’accumulation de capital humain après les études est importante.
Graphique 1.25. Variation du pourcentage de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif possédant un niveau d’études élevé ou intermédiaire (15‑29 ans)
Copier le lien de Graphique 1.25. Variation du pourcentage de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif possédant un niveau d’études élevé ou intermédiaire (15‑29 ans)Variation, en glissement annuel, du pourcentage de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif ayant un niveau d’études intermédiaire ou élevé sur le nombre total de ces jeunes

Note : p.p. : points de pourcentage. NEET : jeunes sans emploi et sortis du système éducatif
Source : calculs de l’OCDE basés sur l’EFT-UE ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Enquête sur les forces de travail) et Current Population Survey des États-Unis.
L’incidence disproportionnée sur la participation à la vie active des femmes s’est dissipée dans plusieurs pays de l’OCDE
Malgré les progrès substantiels réalisés ces dernières décennies, la participation des femmes au marché du travail demeure plus faible que celle de leurs collègues masculins. Les femmes en emploi effectuent généralement moins d’heures rémunérées que les hommes, gagnent moins, et restent moins longtemps en poste (voir OCDE (2019[24] ; 2020[51] ; 2020[52] ; 2020[53])), de sorte qu’elles sont plus vulnérables et plus facilement licenciées. De surcroît, et contrairement aux crises précédentes qui, souvent, ont principalement frappé les secteurs à dominante masculine (voir par exemple Bredemeier, Juessen et Winkler (2017[54])), ceux du commerce de détail, de la restauration et de l’hébergement - caractérisés par un taux d’emploi féminin élevé - ont été particulièrement ébranlés au début de la crise induite par le COVID‑19. La montée en puissance de l’économie de services ces dernières décennies a semble-t-il fortement contribué aux évolutions observées du nombre d’heures de travail des femmes et de leurs rémunérations relatives (voir Ngai et Petrongolo (2017[55]) et Blau et Kahn (2017[56])). Les retombées négatives de la pandémie sur l’emploi dans ces secteurs ont donc fait craindre que des pertes d’emplois et de revenus plus importantes chez les femmes n’hypothèquent les progrès récemment accomplis en matière d’égalité des sexes (Adams-Prassl et al., 2020[33]). De fait, dans les premières phases de la pandémie, l’écart de taux d’emploi entre hommes et femmes s’est creusé dans la majorité des pays - de plus d’un point de pourcentage dans plusieurs d’entre eux, dont la Slovénie, le Canada, la Suède et la Finlande (Graphique 1.26). La tendance s’est toutefois inversée dans la plupart au trimestre suivant, malgré quelques exceptions comme la Slovénie, la Lituanie, le Canada, la Suède, la Finlande, la Hongrie, la Colombie et la Belgique.
Quoi qu’il en soit, outre qu’elles sont surreprésentées dans les secteurs dont l’activité a été mise en veille, les femmes constituent une part disproportionnée des travailleurs des nombreux secteurs définis comme essentiels qui ont souvent été contraints d’effectuer des heures supplémentaires pour faire face à la forte demande (voir l’Encadré 1.3). Par ailleurs, l’incidence de la pandémie sur l’emploi dans les premiers temps de la crise a été, dans une large mesure, fonction de la possibilité de travailler à domicile - ce qui a généralement été le cas dans de nombreux secteurs à dominante féminine comme l’enseignement.
Graphique 1.26. Variations de l’écart de taux d’emploi entre hommes et femmes
Copier le lien de Graphique 1.26. Variations de l’écart de taux d’emploi entre hommes et femmesVariation en points de pourcentage, corrigée de la saisonnalité

Note : l’écart est calculé comme la différence entre le taux d’emploi des hommes et des femmes âgés de 15 à 64 ans.
Source : base de données des statistiques du marché du travail à court terme de l’OCDE.
Étant donné les progrès accomplis dans la compréhension du COVID‑19 et l’apparition de nouveaux variants inquiétants du virus, les restrictions ne cessent d’évoluer. Au cours des dernières phases de la crise, bon nombre des salariés de secteurs à dominante masculine (comme la construction, la réparation et des pans importants de l’industrie manufacturière) qui n’appellent pas de contacts étroits avec les collègues ou les clients ont pu retourner au travail. Dans le même temps, les restaurants ayant à nouveau cessé leur activité, et de nouvelles souches plus contagieuses du virus ayant conduit plusieurs pays à fermer les établissements scolaires (Graphique 1.2), bon nombre des raisons multiples qui ont amené les femmes à ne plus travailler au début de la pandémie sont réapparues. Ces évolutions transparaîtront peut-être encore dans les données ultérieurement publiées.
En effet, le surcroît de responsabilités familiales influe en général lentement sur les disparités professionnelles entre hommes et femmes, ces dernières (en particulier) optant à la longue pour le travail à temps partiel, quittant entièrement la vie active, ou cherchant simplement des emplois qui offrent plus de flexibilité ou des trajets travail-domicile plus courts. Ces choix se traduisent souvent par une progression salariale plus lente, du fait qu’ils restreignent l’éventail d’emplois, le pouvoir de négociation et les possibilités de promotion dans l’entreprise (voir par exemple OCDE (2019[24])). À cet égard, les retombées pernicieuses de la pandémie risquent de se faire ressentir pendant de nombreuses années.
La réduction des heures de travail a permis d’atténuer l’incidence de la crise sur l’emploi des femmes dans certains pays
Ces dernières années, la pénalité salariale associée à la maternité s’est montrée persistante (Ngai et Petrongolo, 2017[55]). Il est vrai qu’indépendamment du sort de leur emploi, la participation des femmes à la vie active a été mise à rude épreuve par la fermeture des écoles et des structures d’accueil des enfants qui a accompagné les mesures visant à maîtriser le virus (Graphique 1.2). L’accroissement des responsabilités familiales qui a résulté de la fermeture généralisée des établissements scolaires est en grande partie retombé sur les femmes (voir Hupkau et Petrongolo (2020[57]) au Royaume-Uni, Farré et al. (2020[58]) en Espagne, et del Boca et al. (2020[59]) en Italie), amenant nombre d’entre elles à se mettre entièrement en retrait de la vie active, même lorsque leur emploi n’a pas été touché par ces mesures.
Dans plusieurs pays de l’OCDE ayant instauré des dispositifs de maintien dans l’emploi ou des congés familiaux spécifiques, les femmes ont pu demander à bénéficier d’horaires réduits pour que la scolarisation à domicile et les responsabilités familiales ne les contraignent pas à quitter le marché du travail31. De ce fait, l’incidence de la première vague de la pandémie sur l’écart de taux d’emploi n’a pas été nette, mais a varié selon les pays (Graphique 1.26)32.
S’agissant du temps de travail, les retombées de la crise sur le nombre d’heures perdues après le choc initial ont généralement été plus marquées chez les femmes, tant à la marge intensive qu’extensive (Graphique 1.27, parties A et B). Cet écart semble toutefois avoir été éphémère dans de nombreux pays, et s’est même inversé par la suite. En effet, le nombre d’heures perdues au troisième trimestre de 2020 a été comparable, la baisse étant légèrement plus prononcée pour les hommes (4.3 points chez les femmes, en moyenne, dans l’OCDE, et 4.5 points chez les hommes). Ces évolutions permettent de penser que les mesures visant à orienter l’incidence de la pandémie sur la marge intensive semblent avoir relativement réussi à amortir les conséquences de la crise pour les femmes, et leur avoir permis de retourner rapidement au travail. Aux États-Unis, par exemple, où cet effet a été essentiellement ressenti à la marge extensive, la baisse des heures de travail dans la population active féminine au troisième trimestre est restée supérieure à celle des hommes33.
Suite au retour du virus dans de nombreux pays au quatrième trimestre de 2020, les heures travaillées des femmes ont à nouveau diminué dans une proportion légèrement supérieure à celles des hommes, en moyenne, dans l’OCDE (6.2 % pour les femmes, 5.7 % pour les hommes) (, parties C et D). Si, là encore, la marge intensive a absorbé l’essentiel de cette augmentation, le chômage a supporté une plus grande part de la diminution des heures travaillées au cours de cette deuxième vague, chez les femmes notamment. Cela dit, leur baisse plus accusée chez les femmes, surtout durant la deuxième phase de restrictions, tient aux disparités prononcées observées dans un petit nombre de pays comme le Chili, la Slovénie, la Turquie et la Lituanie. Dans de nombreux autres, en Europe en particulier, elle a été comparable à celle des hommes au quatrième trimestre ou, dans de nombreux cas, plus limitée.
Des aides publiques massives et diversifiées ont préservé le revenu de nombreux ménages
Malgré l’incidence substantielle de la pandémie sur l’emploi et les salaires, les gouvernements de l’OCDE ont été en mesure de préserver le revenu des ménages moyennant des aides massives et diversifiées (voir OCDE (2020[42] ; 2020[5])). À vrai dire, entre le quatrième trimestre 2019 et le deuxième trimestre 2020, malgré une chute de 12.4 % du PIB par habitant dans la zone OCDE, le revenu disponible brut réel des ménages a augmenté de 3.9 % grâce aux mesures d’accompagnement d’envergure mises en place par les autorités face au COVID‑19. Cette croissance a été particulièrement marquée au Canada et aux États-Unis où, sous l’effet de mesures de soutiens importantes, mais temporaires, elle a atteint respectivement 12.6 % et 11.1 % (Graphique 1.28, partie A). Elle s’est cependant quelque peu tassée depuis dans ces deux pays et, au quatrième trimestre 2020, elle était retombée à des taux plus modérés de 6.6% et 4 % par rapport aux niveaux prépandémiques. Cette évolution témoigne du caractère provisoire de la hausse des transferts nets aux ménages (Graphique 1.28, partie B).
Une progression plus faible du revenu disponible a été également observée au cours de la même période en Irlande (4.5 %), en Australie (4.1%) et en Pologne (3.5 %). En Irlande et en Australie, elle s’est poursuivie jusqu’à la fin du quatrième trimestre 2020. Malgré l’accroissement des transferts nets en espèces vers les ménages dans quasiment tous les pays (Graphique 1.28, partie B), le revenu disponible par habitant a diminué dans bon nombre d’entre eux au deuxième trimestre 2020. Le Chili, l’Autriche, la Suède, la Hongrie et la Slovénie, de même que l’Italie, le Mexique et les Pays-Bas, ont en revanche bien réussi à neutraliser le choc négatif exercé sur celui-ci entre le quatrième trimestre 2019 et le deuxième trimestre 2020.
Ces chiffres fournissent quelques élements d’évaluation de la mesure dans laquelle les dispositifs de soutien sont parvenus à préserver les niveaux de vie face à la pandémie du COVID‑19. Ils nous en disent cependant peu sur la répartition des effets de la pandémie sur le revenu disponible aux différents niveaux de la distribution des revenus et dans certaines catégories socioéconomiques, et donc sur l’efficacité des aides publiques à protéger les segments les plus vulnérables de la population.
Mais certains demeurent vulnérables, et de nombreux problèmes persistent
On ne dispose malheureusement pas encore de microdonnées internationales sur les retombées des transferts publics. Il n’existe pas d’indicateurs à haute périodicité fiables des inégalités économiques, la plupart des statistiques officielles sur les inégalités de revenu n’étant publiées qu’une fois par an, et souvent avec un décalage important. Fort heureusement, des études récentes (voir par exemple Aspachs et al. (2020[60]), Bick et Blandin (2021[61]), Chetty et al. (2020[62]), Cox et al. (2020[63]) et Ganong et Noel (2019,[64])) ont pu exploiter des données massives de sources privées pour appréhender les évolutions rapides et apporter des éclairages utiles à l’élaboration des politiques. Ces travaux laissent entendre que si les mesures rapidement conçues et appliquées ont dans l’ensemble remarquablement réussi à préserver le bien-être économique des ménages, certaines catégories de la population ont pu, du fait de leurs caractéristiques professionnelles, se trouver en situation de précarité et démesurément fragilisées (voir l’Encadré 1.6).
Près d’un an et demi après le début de la crise économique déclenchée par le COVID‑19, on espère à nouveau une lueur au bout du tunnel. Cependant, même aujourd’hui, alors que l’activité économique redémarre, les marchés du travail de l’OCDE sont confrontés à d’énormes défis. Les catégories les plus atteintes par les effets cataclysmiques de la crise ont varié au fil de son évolution. Certains groupes, toutefois, (les salariés occupant des emplois peu rémunérateurs, les peu qualifiés, et les jeunes notamment), sont constamment restés dans l’œil du cyclone. Ils ont non seulement subi les plus fortes réductions du nombre d’heures travaillées, mais ont été plus susceptibles de les vivre sous forme de chômage. Cette constatation a des conséquences importantes : elle fournit des indications sur le ciblage de facto des mesures de soutien à l’emploi et leur effet potentiel sur les inégalités, et nous éclaire quant aux retombées probables à long terme de la crise sur la carrière des personnes concernées.
Graphique 1.27. Décomposition des horaires, selon le sexe
Copier le lien de Graphique 1.27. Décomposition des horaires, selon le sexeVariation en %, en glissement annuel, 2020

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Les pays sont classés par ordre croissant de la variation du nombre total d’heures au 2e trimestre de 2020 (Graphique 1.10). Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’Enquête européenne sur les forces de travail ; Australian Bureau of Statistics ; Statistiques Canada (Enquête sur la population active) ; Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active) ; Office coréen de statistiques (Enquête sur la population économiquement active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Graphique 1.28. Le revenu des ménages a été relativement préservé
Copier le lien de Graphique 1.28. Le revenu des ménages a été relativement préservé
Note : * les dernières données se rapportent au 3e trimestre pour la France (partie B), le Mexique et la Pologne (parties A et B). Le revenu primaire brut est le revenu perçu par les ménages du fait de leur participation au processus de production (rémunération des salariés, revenu du travail indépendant) ou parce qu’ils possèdent des actifs qui peuvent être nécessaires à la production (nets de tout remboursement de dette). Le revenu disponible brut des ménages est calculé à partir du revenu primaire en tenant compte des transferts courants nets, comme le paiement d’impôts sur le revenu et le patrimoine et les cotisations sociales, et les prestations sociales reçues de l’État. Il ne comprend cependant pas les transferts en nature, comme ceux liés à la santé et l’éducation fournis gratuitement ou à des prix économiquement non significatifs par l’État. Les impôts déduits du revenu ne comprennent pas le paiement des taxes à la consommation (comme la taxe à la valeur ajoutée). Le rapport du revenu disponible brut au revenu primaire brut illustre l’effet de la redistribution des revenus, essentiellement opérée par l’administration publique, sur le niveau de revenu des ménages.
Source : OCDE, base de données des comptes nationaux - Tableau de bord sur les ménages.
Encadré 1.6. Amortir l’incidence de la pandémie sur les inégalités en Espagne
Copier le lien de Encadré 1.6. Amortir l’incidence de la pandémie sur les inégalités en EspagneIl faudra quelques temps avant que l’on ne dispose de microdonnées internationales détaillées, mais des informations publiées par l’une des plus grandes banques espagnoles, CaixaBank, mettent en lumière les retombées de la crise sur les revenus, ainsi que la mesure dans laquelle l’État-providence les a amorties. Les microdonnées anonymisées de cette nature, qui contiennent des renseignements précis, en temps réel, sur les transferts, les salaires et les subventions, sont un instrument utile pour évaluer l’effet de la mise en application rapide et opportune, des mesures gouvernementales. Les données couvrent tous les détenteurs de comptes actifs percevant soit des aides publiques, soit des salaires d’un employeur privé ou public. L’échantillon, qui porte sur trois millions de petits déposants, est très représentatif de la population active espagnole.
Selon une analyse liminaire des données, ce sont les salariés situés au bas de l’échelle des rémunérations qui auraient le plus durement ressenti les premiers effets de la crise, la probabilité que ceux des tranches inférieures aient perdu l’intégralité de leur salaire entre février et avril 2020 étant supérieure de 20 % à celle de l’année précédente (Aspachs et al., 2020[60]). En effet, les évolutions du revenu salarial avant transferts se sont traduites par un net accroissement des inégalités, de sorte qu’en avril 2020 l’indice de Gini se situait plus de 11 points de pourcentage au-dessus du niveau observé l’année précédente, avant de retomber à partir de mai, lorsque les mesures de confinement ont été assouplies (Graphique 1.29).
Graphique 1.29. Les transferts publics ont amorti la flambée des inégalités pendant la pandémie
Copier le lien de Graphique 1.29. Les transferts publics ont amorti la flambée des inégalités pendant la pandémieÉvolution du coefficient de Gini avant et après transferts, variation en points de pourcentage, en glissement annuel

Note : pour garantir que les salaires ou transferts concernent une personne seulement, l’échantillon se limite aux comptes à titulaire unique ou à ceux sur lesquels les salaires provenant d’un seul employeur sont versés. Les prestations publiques versées par la sécurité sociale comprennent les sommes relevant des dispositifs de maintien dans l’emploi (connus sous le nom d’ERTE en Espagne). Les variations du coefficient de Gini en glissement annuel sont utilisées pour lisser les fluctuations saisonnières, comme le versement de primes en février.
Source : calculs de l’OCDE à partir des données fournies par CaixaBank Research, CaixaBank Inequality Tracker (2020[65]), https://inequality-tracker.caixabankresearch.com/.
La hausse beaucoup plus modérée des inégalités de revenu après transferts témoigne de l’efficacité relative des transferts publics – allocations chômage et aides apportées dans le cadre du dispositif national de maintien dans l’emploi (ERTE) – à protéger les plus vulnérables. Les inégalités après transferts, qui se sont d’abord accentuées en mars 2020, ont commencé à se résorber pour revenir à un niveau proche de celui observé l’année précédente dès avril 2020 et sont restées relativement stables depuis.
Ces schémas - avant et après transferts - diffèrent toutefois sensiblement entre certaines catégories de la population. Chez les plus jeunes cohortes (entre 16 et 29 ans), la hausse de l’indice de Gini avant transferts a été particulièrement brutale en avril 2020, atteignant un niveau supérieur de 45 % à celui enregistré en avril 2019 (Graphique 1.30). Chez les plus âgées (50‑64 ans), sa progression a été plus modérée. Cette situation tient peut-être à la prépondérance relative de la marge extensive dans la réduction des heures travaillées des jeunes au début de la crise.
Par ailleurs, bien que les transferts publics atténuent en partie la forte augmentation de l’indice de Gini chez les jeunes, les inégalités post-transferts demeurent substantielles par rapport aux niveaux observés en 2019. En effet, si les transferts publics ont apparemment assez bien réussi à protéger les adultes d’âge très actif et les seniors vulnérables, il semblerait que de nombreux jeunes parmi les plus fragiles n’en aient pas bénéficié. Cela tient probablement en partie à leur concentration relative dans les emplois précaires, qui a une double incidence : en général, ils bénéficient proportionnellement moins des dispositifs de maintien dans l’emploi et des réductions du temps de travail (Graphique 1.21), et ils sont moins souvent admissibles aux allocations de chômage (voir OCDE (2020[5] ; 2020[42])).
Graphique 1.30. Les transferts n’ont pas suffi à absorber les inégalités chez les jeunes
Copier le lien de Graphique 1.30. Les transferts n’ont pas suffi à absorber les inégalités chez les jeunesAugmentation, en pourcentage, des coefficients de Gini intragroupes avant et après transferts par rapport à février 2020

Note : pour garantir que les salaires ou transferts concernent une personne seulement, l’échantillon se limite aux comptes à titulaire unique ou à ceux sur lesquels les salaires provenant d’un seul employeur sont versés. Les prestations publiques versées par la sécurité sociale comprennent les sommes relevant des dispositifs de maintien dans l’emploi (connus sous le nom d’ERTE en Espagne). Les chiffres présentés sont les variations en pourcentage des coefficients de Gini à partir de février 2020, calculés après prise en compte des variations en glissement annuel. La catégorie des seniors est constituée des personnes âgées de 50 à 64 ans, celle des adultes des personnes de 30 à 49 ans, et celle des jeunes de la tranche des 16‑29 ans.
Source : calculs de l’OCDE à partir des données fournies par CaixaBank Research et Aspachs et al. (2020[60]), « Real-Time Inequality and the Welfare State in Motion: Evidence from COVID‑19 in Spain », Aspachs et al. (2020[66]), « Tracking inequality in real-time: impact of the activity rebound », et CaixaBank Inequality Tracker (2020[65]), https://inequality-tracker.caixabankresearch.com/.
1.4. Regard prospectif : éléments relatifs à l’influence de la pandémie sur les mégatendances en cours et sur l’évolution de la reprise
Copier le lien de 1.4. Regard prospectif : éléments relatifs à l’influence de la pandémie sur les mégatendances en cours et sur l’évolution de la repriseMalgré les efforts déployés pour atténuer les épreuves de la crise, les effets de la pandémie sur l’économie et l’emploi devraient se prolonger bien au-delà du court terme, et se faire ressentir à moyen et long termes.
Cette section conclut le chapitre par un examen des éléments disponibles concernant l’accélération des évolutions structurelles amorcées de longue date et leurs répercussions sur le monde du travail. En particulier, de nombreuses entreprises assujetties à des directives sanitaires rigoureuses et confrontées à l’incertitude ont sans doute accéléré leur programme de numérisation et d’automatisation des processus de production, ce qui peut avoir une « double incidence » sur les travailleurs vulnérables qui ont perdu leur emploi pendant la pandémie et risquent, du fait de cette accélération, de ne pas les retrouver par la suite.
1.4.1. La crise du COVID‑19 a-t-elle touché les salariés qui étaient déjà exposés à un risque élevé de perte d’emploi dans un avenir proche ?
Avant que la pandémie ne frappe l’ensemble de la planète, les évolutions technologiques, l’automatisation, la numérisation, ainsi que l’arrivée de l’intelligence artificielle et l’utilisation des données massives comptaient déjà parmi les mégatendances qui reconfigurent les sociétés et le monde du travail (voir par exemple OCDE (2019[67])).
Malgré les craintes initiales d’un chômage technologique massif, des données récentes concernant l’incidence de l’automatisation sur les marchés du travail indiquent une orientation à la hausse des taux d’emploi, sauf pendant la crise financière mondiale. S’il n’existe pas de preuve manifeste d’un effet défavorable de l’automatisation sur l’emploi au niveau global, celui que la mutation technologique (numérisation et automatisation comprises) pourrait avoir sur certaines catégories, comme les travailleurs peu qualifiés et ceux qui sont dépourvus de compétences numériques, suscite encore de fortes inquiétudes. Il ressort en effet d’autres données (Georgieff et Milanez, 2021[68]) que dans les professions qui étaient les plus menacées par l’automatisation en 2012, le taux d’emploi a connu une progression inférieure à la moyenne, voire un léger recul, au cours de la période qui a suivi, jusqu’en 2019. Le risque que la transformation technologique ne creuse les inégalités est accentué par le fait que de nombreux travailleurs exerçant des métiers fortement menacés d’automatisation sont généralement des salariés peu qualifiés ou âgés qui sont moins enclins à suivre des programmes de formation continue et de reconversion (OCDE, 2020[69] ; 2021[70]).
Même après la crise du COVID‑19, le rythme d’adoption des technologies ne devrait pas fléchir, et pourrait même s’intensifier (Forum économique mondial, 2020[71])). Par ailleurs, d’autres mégatendances, comme le vieillissement démographique et le changement climatique, devraient continuer d’exercer une influence déterminante sur l’évolution de l’emploi, stimulant la demande de personnel dans le secteur de la santé ou dans les secteurs associés à l’économie verte, ce qui pourrait également favoriser l’adoption de nouvelles technologies. Pour anticiper ces changements, certains pays ont établi des projections de l’emploi (voir l’Encadré 1.7 et l’Annexe 1.D) qui prennent en considération les effets prévus de ces mégatendances à court et long termes.
La plupart des projections disponibles ont été élaborées avant la pandémie; elles tiennent donc compte des facteurs structurels qui déterminent la croissance et le repli de l’emploi, mais pas du rebond (ou de la nouvelle baisse) que celui-ci devrait connaître dans différentes professions au lendemain de la crise, alors que l’activité économique redémarre progressivement et que des pans de plus en plus importants de la population sont vaccinés.
Elles permettent cependant d’étudier la question cruciale de savoir si les emplois qui étaient déjà menacés de suppression avant la crise du COVID‑19 en raison des mégatendances ont été particulièrement atteints par la contraction due à la pandémie, entraînant ainsi un double effet négatif sur des travailleurs déjà fragilisés.
Encadré 1.7. Projections de l’emploi à long terme en Australie, au Canada, aux États‑Unis et au Royaume-Uni
Copier le lien de Encadré 1.7. Projections de l’emploi à long terme en Australie, au Canada, aux États‑Unis et au Royaume-UniIl est difficile de prévoir les évolutions futures de l’emploi. Certains pays ont établi des projections spéciales dans le but d’anticiper les mutations à venir des marchés du travail (0). La plupart des projections disponibles au niveau des pays et des professions prévoient une croissance substantielle de l’emploi dans les secteurs des TIC et de la santé. En Australie, par exemple, l’emploi dans les métiers d’ingénieur support informatique, ingénieur d’essai et autres spécialistes en sciences techniques devrait progresser d’environ 30 % d’ici à 2024, et de 26 % pour les spécialistes des réseaux d’ordinateurs. Il devrait aussi augmenter dans les professions du secteur de la santé à moyen et long termes. Les projections établies avant la pandémie anticipent une hausse substantielle de l’emploi pour les médecins spécialistes (+31 % au Canada à l’horizon 2028), les infirmiers praticiens (+52 % aux États-Unis d’ici à 2029) et le personnel soignant (+5 % au Royaume-Uni d’ici à 2024). Comme le prévoyaient des études antérieures (OCDE, 2017[72] ; 2021[73]), il devrait sensiblement diminuer dans plusieurs professions répétitives et peu qualifiées à court terme, et cette baisse devrait s’accentuer à long terme. Dans l’OCDE par exemple, il devrait fléchir de 30 % au cours des quatre prochaines années en Australie, et de 12 % au Royaume-Uni d’ici à 2024 (secrétariat et professions assimilées). Le nombre d’emplois d’opérateurs sur clavier numérique, de dactylographes et d’opérateurs de traitement de texte devrait aussi décliner de 20 % au Canada d’ici à 2028, et de 36 % aux États-Unis d’ici à 2029. La présente section se fonde sur les projections nationales de l’emploi disponibles en Australie, au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni pour analyser la corrélation entre l’évolution des offres d’emploi publiées en ligne pendant la crise du COVID‑19 et les prévisions de l’emploi produites avant la pandémie. D’autres projections font état d’évolutions globales similaires, mais n’ont pas été utilisées ici car leur ventilation au niveau des professions ne permet pas d’établir une correspondance suffisamment précise avec les informations détaillées contenues dans les descriptions de postes en ligne sur lesquelles s’appuie cette analyse.
Source : http://occupations.esdc.gc.ca/sppc-cops/content.jsp?cid=occupationdatasearch&lang=en, https://www.gov.uk/government/publications/uk-labour-market-projections-2014-to-2024, https://www.bls.gov/mlr/2020/article/projections-overview-and-highlights-2019-29.htm, https://lmip.gov.au/default.aspx?LMIP/GainInsights/EmploymentProjections, consulté le 25 février 2021.
Il ressort par exemple de données récentes que l’adoption des technologies numériques pendant la pandémie a permis de sauvegarder l’emploi de millions de salariés qui ont pu effectuer leurs tâches à distance, grâce au travail à domicile (voir OCDE (2020[5] ; 2021[73]) et le chapitre 5). Néanmoins, si de nombreux employeurs et salariés ont pu surmonter la crise grâce à ces technologies, d’autres n’ont pas été en mesure de le faire, entre autres raisons parce qu’ils ne disposaient pas des compétences voulues ou des infrastructures technologiques nécessaires sur leur lieu de travail.
Il se confirme que les salariés vulnérables, notamment ceux dont l’emploi est plus menacé par l’automatisation et la numérisation, ont pu être particulièrement fragilisés pendant la crise du COVID‑19, leur emploi ayant été plus durement frappé que celui d’autres salariés. À terme, ils pourraient connaître une reprise beaucoup moins vigoureuse, car bon nombre des emplois et des tâches qu’ils assumaient avant la pandémie risquent d’être automatisés dans l’intervalle. Selon la Commission on Workers and Technology du Royaume-Uni34, par exemple, 61 % environ des salariés ayant fait l’objet de mesures de chômage partiel au premier semestre de 2020 dans ce pays travaillaient dans des secteurs où l’automatisation va très probablement entraîner des pertes d’emplois. De même, un rapport récent de la Royal Academy of Science (Wallace-Stephens et Morgante, 2020[74]) signale une corrélation positive et significative entre la probabilité d’automatisation et l’adoption des dispositifs de maintien dans l’emploi au Royaume-Uni, ce qui peut être considéré comme un indicateur approximatif de la contraction de l’activité dans différentes professions (voir également la section 1.3 et le chapitre 2).
Pour analyser le lien entre l’incidence de la pandémie du COVID‑19 sur l’emploi et la vulnérabilité des travailleurs aux mégatendances, les Graphiques 1.32, 1.33, 1.34 et 1.35 associent des informations relatives à l’évolution des offres d’emplois publiées en ligne pendant la crise et des projections nationales de l’emploi qui tiennent compte de l’effet que ces mégatendances devraient avoir sur les marchés du travail de demain.
Les résultats indiquent qu’en moyenne, dans les pays pour lesquels on dispose de renseignements, bon nombre des emplois dont le déclin était prévu du fait des mutations structurelles déjà engagées avant la pandémie sont aussi ceux qui ont le plus souffert de la crise actuelle, et pour lesquels le nombre d’offres publiées en ligne pendant la pandémie a le plus diminué. En Australie, par exemple, les offres d’emploi pour des postes de secrétaires et d’assistants personnels ont respectivement chuté de 28 % et 37 % en 2020 par rapport à 2019. Avant la pandémie, une baisse de 30 % et 9 % de l’emploi dans ces professions était déjà prévue à l’horizon 2024 en raison des évolutions structurelles, dont l’adoption des technologies.
De même, au Canada, les offres d’emplois en ligne pour les opérateurs sur clavier numérique ou les commis de banque, d’assurance et d’autres services financiers ont respectivement reculé de 39 % et 31 % par rapport à la même période de 2019. Les projections établies avant la pandémie prévoyaient déjà un repli de 20 % et 14 % de ces emplois à l’horizon 2028 (par rapport à 2019). Les résultats sont similaires, sur le plan qualitatif, pour les États-Unis, où les métiers d’agent de voyage, d’opérateur de traitement de texte et de dactylographe, dont le déclin substantiel était prévu au cours de la prochaine décennie, ont aussi vu le nombre d’offres d’emplois en ligne accuser l’une des baisses les plus prononcées pendant la pandémie. Les chiffres pour le Royaume-Uni montrent une corrélation particulièrement étroite et statistiquement significative entre le recul projeté de l’emploi et la chute du nombre d’offres pendant celle-ci35. Des professions comme le secrétariat et métiers assimilés ou les conducteurs de processus, d’installations et de machines, pour lesquelles on prévoyait déjà un repli de plus de 15 % et 7 %, respectivement, à l’horizon 2024, comptent aussi parmi celles que la pandémie a durement atteintes, le nombre d’offres d’emplois en ligne diminuant respectivement de 32 % et 14 % en 2020 par rapport à l’année précédente.
Les résultats ci-dessus montrent également que les professions qui ont relativement bien résisté à la crise sont aussi celles pour lesquelles on prévoyait, avant la pandémie, la plus forte croissance pour les années à venir. Comme on pouvait s’y attendre, les professions pour lesquelles le nombre d’offres en ligne a le plus augmenté durant la pandémie relèvent en grande partie du secteur de la santé : soignants pour personnes âgées et handicapées (Australie, +35 %) ; infirmiers auxiliaires autorisés (Canada, +39 %) ; agents sanitaires de proximité (États-Unis, +91 %) ; professionnels de santé (Royaume-Uni, +25%).
Si l’augmentation soudaine de la demande de personnel dans ce secteur tient sans doute essentiellement aux pressions extrêmes qui se sont exercées sur les systèmes nationaux de santé, il convient de noter qu’une progression nettement supérieure à 10 % de ces professions était déjà anticipée avant le choc du COVID‑19. Outre les métiers de la santé, un autre domaine dans lequel l’emploi devrait sensiblement augmenter et dans lequel la demande a été vigoureuse pendant la crise est celui de l’économie verte ; c’est par exemple le cas du métier d’installateur de panneaux photovoltaïques (États-Unis, +91 %).
Ces constats laissent supposer l’existence d’une corrélation entre la vulnérabilité de certains salariés aux mégatendances et l’intensité avec laquelle la crise les a frappés (ainsi que leurs emplois) en 2020.
Ils font aussi apparaître une forte hétérogénéité selon les professions, les données disponibles ne permettant pas toujours de dégager des tendances claires. Les analyses de régression (voir l’Annexe 1.C) indiquent cependant que la corrélation entre l’incidence du COVID‑19 sur les emplois et les évolutions prévues de l’emploi sous l’effet des mégatendances demeure significative lorsque l’on tient compte des effets catégoriels invariables dans le temps.
Si la prudence s’impose dans l’interprétation des résultats présentés ici (car il est peut-être encore trop tôt pour affirmer que la crise a accéléré les mégatendances à l’œuvre), il y a plusieurs raisons de penser que les marchés du travail risquent de ne pas retrouver leur fonctionnement habituel après la pandémie, et que celle-ci va plutôt susciter une réorganisation approfondie du travail en accélérant l’adoption des nouvelles technologies, en accentuant l’importance de certains métiers (dans le secteur de la santé notamment) et en intensifiant le risque que les salariés qui étaient déjà particulièrement vulnérables auparavant ne perdent leur emploi.
Graphique 1.31. Australie : corrélation entre la croissance du nombre d’offres d’emplois en ligne pendant la pandémie et les projections à moyen-long terme de l’emploi, par profession
Copier le lien de Graphique 1.31. Australie : corrélation entre la croissance du nombre d’offres d’emplois en ligne pendant la pandémie et les projections à moyen-long terme de l’emploi, par profession
Note : les valeurs en ordonnée représentent l’augmentation du nombre d’offres d’emplois en ligne recueillies entre janvier et décembre 2019, et entre janvier et décembre 2020. Les valeurs en abscisse représentant la croissance projetée de l’emploi par profession. L’horizon de projection est 2019‑24. Chaque point représente une profession au niveau 4 chiffres telle que définie dans l’Australian and New Zealand Standard Classification of Occupations (ANZSCO). Les valeurs aberrantes fournissant peu d’informations (moins de 200 offres en ligne par mois au cours de la période) ont été écartées.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur les données de Burning Glass Technologies et du portail Australia Labour Market Information (LMIP).
Graphique 1.32. Canada : corrélation entre la croissance du nombre d’offres d’emplois en ligne pendant la pandémie et les projections à moyen-long terme de l’emploi, par profession
Copier le lien de Graphique 1.32. Canada : corrélation entre la croissance du nombre d’offres d’emplois en ligne pendant la pandémie et les projections à moyen-long terme de l’emploi, par profession
Note : les valeurs en ordonnées représentent l’augmentation du nombre d’offres d’emplois en ligne recueillies entre janvier et décembre 2019, et entre janvier et décembre 2020. L’horizon de projection est 2019‑28. Chaque point représente une profession au niveau à 4 chiffres telle que définie dans la Classification nationale des professions (CNP) du Canada. Les valeurs aberrantes fournissant peu d’informations (moins de 200 offres en ligne par mois au cours de la période) ont été écartées.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur les données de Burning Glass Technologies et du Système de projection des professions au Canada (SPPC).
Graphique 1.33. États-Unis : corrélation entre la croissance du nombre d’offres d’emplois en ligne pendant la pandémie et les projections à moyen-long terme de l’emploi, par profession
Copier le lien de Graphique 1.33. États-Unis : corrélation entre la croissance du nombre d’offres d’emplois en ligne pendant la pandémie et les projections à moyen-long terme de l’emploi, par profession
Note : les valeurs en ordonnée représentent l’augmentation du nombre d’offres d’emplois en ligne recueillies entre janvier et décembre 2019, et entre janvier et décembre 2020. L’horizon de projection est 2019‑29. Chaque point représente une profession au niveau à 6 chiffres telle que définie dans la Standard Occupational Classification (SOC) des États-Unis. Les valeurs aberrantes fournissant peu d’informations (moins de 200 offres en ligne par mois au cours de la période) ont été écartées.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur les données de Burning Glass Technologies et les projections de l’emploi du Bureau of Labor Statistics (BLS) des États-Unis.
Graphique 1.34. Royaume-Uni : corrélation entre la croissance du nombre d’offres d’emplois en ligne pendant la pandémie et les projections à moyen-long terme de l’emploi, par profession
Copier le lien de Graphique 1.34. Royaume-Uni : corrélation entre la croissance du nombre d’offres d’emplois en ligne pendant la pandémie et les projections à moyen-long terme de l’emploi, par profession
Note : les valeurs en ordonnée représentent l’augmentation du nombre d’offres d’emplois en ligne recueillies entre janvier et décembre 2019, et entre janvier et décembre 2020. Les valeurs en abscisse représentant la croissance projetée de l’emploi par profession. L’horizon de projection est 2020‑24. L’évolution du nombre d’offres d’emplois en ligne est calculée pour les professions au niveau à deux chiffres de la Standard Occupational Classification du Royaume-Uni (UK SOC) afin de pouvoir procéder à des comparaisons avec les prévisions de l’emploi.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur les données de Burning Glass Technologies et les évolutions et projections de l’emploi Working Futures de la UKCES.
L’incertitude entourant le moment où le travail humain « manuel » sera à nouveau pleinement disponible va vraisemblablement inciter les entreprises à mettre en œuvre leurs programmes d’automatisation plus tôt que prévu. Une enquête récemment menée par le Forum économique mondial auprès des gros employeurs (Forum économique mondial, 2020[71]) indique qu’outre l’informatique en nuage, les données massives et le commerce électronique, ceux-ci manifestent un intérêt croissant pour le chiffrement, les robots non humanoïdes et l’intelligence artificielle - signe que l’investissement dans la numérisation des processus et le déploiement des techniques d’automatisation va sans doute augmenter.
Aux États-Unis, pareillement, de nouveaux travaux du Bureau of Labor Statistics (Ice, Rieley et Rinde, 2021[75]) laissent entrevoir des changements profonds et définitifs des comportements des consommateurs et des entreprises. Le recours croissant au télétravail, même lorsque la crise sanitaire sera terminée, devrait avoir des retombées directes et indirectes sur les travailleurs, les entreprises et l’économie dans la mesure où il influera sur les besoins en matière d’espace de bureau, sur les choix en matière de construction non résidentielle, sur la demande de services de restauration et d’hébergement et sur l’implantation des commerces de détail, et déterminera les besoins en personnel spécialisé dans les technologies de l’information et en informatique, dans le domaine de la sécurité informatique notamment. L’amélioration de la prévention, de la maîtrise et du traitement des maladies infectieuses réclamée par la population devrait aussi entraîner une augmentation du financement de la recherche scientifique et médicale et un renforcement approfondi du secteur de la santé, au-delà des mesures déjà prévues.
Si ces évolutions se confirment, les salariés des métiers qui ont été durement frappés pendant la pandémie risquent d’éprouver plus de difficultés que d’autres à retrouver leur emploi antérieur (à supposer qu’ils l’aient perdu durant la crise) en raison des licenciements dans leur secteur d’activité (dont le redressement complet sera sans doute lent), mais aussi parce que les entreprises pourraient mettre la période à profit pour accélérer les mega-tendancess préexistantes (automatisation, numérisation et accroissement de la demande de spécialistes dans les secteurs de la santé et de l’économie verte), restructurant ainsi profondément leurs modes de production et le rapport entre travail humain et nouvelles technologies.
1.4.2. Parcours de reconversion au lendemain de la crise du COVID‑19
Il est extrêmement difficile de prévoir les évolutions à court terme, d’autant que de nombreux facteurs inextricablement liés devraient influer sur la trajectoire de la reprise. Compte tenu de la rapidité actuelle (voire de l’accélération) du déploiement des technologies, on peut raisonnablement supposer que bon nombre des salariés qui retrouveront l’emploi qu’ils occupaient avant la pandémie verront les tâches qu’ils sont censés exécuter se transformer en profondeur. Les plus vulnérables, en revanche, risquent de ne même pas pouvoir retrouver des fonctions similaires à celles qu’ils exerçaient auparavant et devront envisager une reconversion du fait que certains de leurs emplois sont voués à disparaître.
Quoi qu’il en soit, dans les deux cas, tous les travailleurs devront à terme suivre une formation et se requalifier: certains devront actualiser leurs compétences pour effectuer de nouvelles tâches, d’autres devront se reconvertir et chercher un nouvel emploi dans le cadre d’une réorientation professionnelle. Des parcours de formation continue ciblés et adaptés seront donc indispensables pour leur permettre de s’orienter dans ce paysage incertain et déstabilisant et limiter les risques d’inadéquation des compétences et de sous-qualification persistantes chez les travailleurs les plus vulnérables.
Pendant la pandémie, plusieurs pays ont mis sur pied de courts programmes de formation pour satisfaire à la demande pressante de travailleurs de première ligne et de personnel de santé. Dans de nombreux cas, ces programmes étaient destinés au personnel médical et de santé qui avait besoin d’acquérir des connaissances spécifiques pour faire face au virus (OCDE, 2020[76]). Dans d’autres, leurs bénéficiaires étaient des travailleurs qui avaient perdu leur emploi en raison de la pandémie et dont les compétences étaient jugées utiles pour assurer des fonctions dans les services essentiels en forte demande (voir Encadré 1.8).
Encadré 1.8. Remédier aux pénuries de compétences face à la pandémie
Copier le lien de Encadré 1.8. Remédier aux pénuries de compétences face à la pandémieAu plus fort de la pandémie, bon nombre des programmes de reconversion mis en place par les pays avaient pour objectif de pallier d’urgence les déficits de compétences apparus notamment dans le secteur de la santé ou dans les métiers connexes. En ciblant des travailleurs déjà munis de certaines compétences utiles, il était possible d’organiser des formations courtes et de réagir plus efficacement à la crise. Dans ce contexte, l’université Sophiahemmet et la compagnie aérienne SAS, en Suède, ont proposé une formation médicale de courte durée au personnel du secteur aérien qui avait été licencié. Les deux entités étaient en effet conscientes de ce que les équipages travaillent généralement dans un climat de tension élevée et que bon nombre de leurs compétences pouvaient s’avérer utiles pendant l’état d’urgence sanitaire, notamment dans le cadre des premiers secours, de la sécurité, de la communication avec les patients et des soins aux personnes atteintes de la maladie. Un projet similaire a été lancé aux États-Unis et au Royaume-Uni, où de jeunes adultes déjà formés aux premiers secours ont suivi une brève formation (une à deux semaines) aux fonctions d’agent sanitaire de proximité, à l’application des mesures de prévention et de contrôle, comme l’organisation de la distanciation physique et des stations d’hygiène des mains, au dépistage des cas de Covid et à la coordination des tests.
Au Japon, l’Industrial Stabilization Center of Japan (ISCJ) a soutenu les secteurs de l’aéronautique et du transport aérien en encourageant le détachement temporaire du personnel dans d’autres secteurs. De même, l’un des affiliés à la Confédération syndicale japonaise (UA ZENSEN) a mis au point un dispositif d’appariement entre les syndicats affiliés au niveau des entreprises dans le but de détacher les salariés victimes de réductions d’effectifs dans les restaurants ou supermarchés qui connaissaient des pénuries de personnel. Pour appuyer ce projet, le gouvernement a augmenté ses subventions aux entreprises d’origine et d’accueil des salariés à compter de février 2021.
Source : OCDE (2020[76]), « Skill measures to mobilise the workforce during the COVID‑19 crisis » https://dx.doi.org/10.1787/afd33a65-en, et informations communiquées par la Commission syndicale consultative auprès de l'OCDE (TUAC).
Par la suite, malgré l’incertitude entourant le profil de la reprise et son déroulement, les pays devraient déployer davantage d’efforts pour anticiper les éventuelles retombées de la pandémie, à moyen et long termes, sur un large éventail de métiers et pour prêter assistance aux salariés qui risquent de perdre leur emploi et peinent à retrouver un poste dans leur profession (voir Encadré 1.9).
Encadré 1.9. Reconversion et réorientation professionnelle au temps du COVID‑19 : utiliser les données massives et les projections de l’emploi pour orienter les décisions individuelles
Copier le lien de Encadré 1.9. Reconversion et réorientation professionnelle au temps du COVID‑19 : utiliser les données massives et les projections de l’emploi pour orienter les décisions individuellesLes choix professionnels sont d’ordinaire très délicats et peuvent encore gagner en complexité lorsque l’avenir des marchés du travail est particulièrement incertain. Les prévisions de l’emploi, conjuguées à des informations détaillées (offres de postes en ligne) sur la conjoncture du marché du travail, peuvent aider les individus à appréhender les possibilités qui s’offrent à eux et à prendre leurs décisions en toute connaissance de cause. Pour illustrer la façon dont ces sources d’informations peuvent être exploitées, le Graphique 1.35 analyse deux professions (agents de voyage et spécialistes des ressources humaines) exigeant un niveau très similaire de compétences dans certaines tâches d’administration et de gestion ou en technologies de l’information, comme la gestion des bases de données (voir la note au Graphique 1.36). Le graphique illustre la dynamique des offres d’emplois publiées en ligne aux États-Unis pour ces deux professions jusqu’à décembre 2020 et l’évolution prévue de l’emploi dans ces deux domaines (jusqu’à 2029).Il montre que, durant la pandémie, entre janvier et décembre 2020, le volume d’offres en ligne a accusé un repli marqué dans les deux cas. Si les deux métiers ont beaucoup souffert de la pandémie, les projections de l’emploi les concernant diffèrent sensiblement : l’emploi des spécialistes en ressources humaines devrait progresser de 7 %, mais celui des agents de voyages devrait fortement diminuer, de 49 %, d’ici à 2029.
Compte tenu des évolutions passées et futures, les autorités devraient envisager d’investir des moyens substantiels dans l’offre de programmes de reconversion ciblés aux travailleurs dont les métiers i) ont été durement frappés durant la pandémie et ii) devraient encore décliner à l’avenir, de manière à ce qu’ils puissent se réorienter vers des professions présentant des perspectives plus favorables à long terme. Autrement dit, la reconversion et l’amélioration des compétences doivent apporter un appui efficace aux travailleurs qui renoncent à un métier en déclin pour un autre qui, à plus long terme, devrait prospérer (de celui d’agent de voyage, par exemple, à celui de spécialiste en ressources humaines). Outre les projections de l’emploi, l’intérêt d’un changement professionnel (sur le plan de la rémunération, des prestations, etc.) doit également être pris en considération dans la mesure où il peut constituer un frein important à la mobilité (voir OCDE (2021[73])).
Graphique 1.35. Agents de voyage et spécialistes en ressources humaines : évolution des offres d’emplois pendant la pandémie du COVID‑19 et projections jusqu’à 2029
Copier le lien de Graphique 1.35. Agents de voyage et spécialistes en ressources humaines : évolution des offres d’emplois pendant la pandémie du COVID‑19 et projections jusqu’à 2029États-Unis, offre d’emplois en ligne (janvier-décembre 2020) et projections de l’emploi jusqu’à 2029

Source : calculs de l’OCDE fondés sur les données de Burning Glass Technologies et les projections de l’emploi du Bureau of Labor Statistics (BLS) des États-Unis.
L’analyse des offres d’emplois en ligne peut aider à recenser les similarités de compétences entre professions et à définir des parcours de reconversion détaillés pour certains changements de carrière. Le Graphique 1.36, par exemple, applique des modèles de traitement du langage naturel à l’analyse du texte de millions d’offres d’emplois pour identifier les compétences qu’un agent de voyage devrait dans l’ensemble renforcer pour accéder à un emploi de spécialiste en ressources humaines (voir OCDE (2021[73]) pour une description de la méthodologie). Figurent parmi elles la connaissance du « secteur de l’emploi et des services » et celle des « systèmes de gestion des ressources humaines ». L’analyse montre également que les compétences techniques et spécialisées comme l’aptitude à effectuer des « déductions fiscales » ou à superviser les procédures de « recrutement » sont déterminantes pour la transition à un emploi de spécialiste en ressources humaines. De même, la maîtrise de certains logiciels comme « SAP Fieldglass » ou la plateforme d’analyse des données « Looker » comptent parmi les compétences numériques auxquelles la reconversion à un métier plus sûr devrait donner priorité. Les deux professions, bien qu’elles fassent appel à plusieurs compétences communes, diffèrent aussi en ce qui concerne le niveau d’études généralement exigé (diplôme du cycle secondaire dans le cas des agents de voyage, licence dans celui des spécialistes en ressources humaines) ; il se pourrait donc que le changement de carrière requière l’obtention d’un nouveau diplôme.
Graphique 1.36. Parcours de reconversion du métier d’agent de voyage à celui de spécialiste en ressources humaines
Copier le lien de Graphique 1.36. Parcours de reconversion du métier d’agent de voyage à celui de spécialiste en ressources humaines
Note : le graphique indique les principales compétences qu’un agent de voyage devrait (globalement) acquérir pour accéder à un emploi de spécialiste en ressources humaines. Les compétences sont classées par ordre d’utilité pour la profession visée (spécialiste en ressources humaines). L’utilité de chaque compétence (axe de gauche) est calculée en appliquant des algorithmes de traitement du langage naturel à l’analyse d’environ 69 millions d’offres d’emplois recueillies aux États-Unis entre 2016 et 2018. En particulier, des informations textuelles sur les qualifications demandées et la composition en compétences de la profession sont converties en vecteurs mathématiques qui servent ensuite à évaluer l’utilité de chaque compétence pour la profession et la similarité des compétences entre les professions (niveau à six chiffres de la SOC - Standard Occupational Classification des États-Unis) mesurées à la distance du cosinus entre le vecteur de terme (compétence) et les vecteurs de profession.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur les données de Burning Glass Technologies.
Les services publics d’emploi (SPE) de certains pays ont mis en œuvre des programmes de cette nature. En Irlande, par exemple, le ministère de l’Emploi et de la Protection sociale a créé un site pour mettre en relation les salariés qui ont perdu leur travail suite aux récentes fermetures d’entreprises et les secteurs confrontés à des pénuries immédiates de personnel - santé, commerce de détail, sciences de la vie, infrastructure et technologies de l’information, service après-vente, etc. En France, Pôle Emploi a inauguré une plateforme électronique pour faciliter le recrutement dans les secteurs qui ont actuellement besoin d’accroître leur main d'œuvre, notamment l'agriculture, l’agroalimentaire, la santé, les transports et les télécommunications. En Lituanie, le SPE a également établi un partenariat avec un prestataire de formation en ligne ouverte à tous (FLOT), Coursera, pour dispenser des formations gratuites aux chômeurs pendant l’été et l’automne 2020. Le projet a déjà mobilisé des milliers d’adultes sans emploi qui ont participé à des formations en ligne. Le SPE de Bruxelles a également organisé une campagne dynamique sur son site web, où il fait appel à son bulletin d’information pour annoncer les offres de formation (en compétences numériques de base et en langue essentiellement) et encourager les adultes à les suivre. Le gouvernement italien a aussi créé un site réunissant plusieurs formations de courte durée susceptibles d’aider les cadres et les employés à acquérir les compétences et qualifications qui leur permettront de télétravailler de manière plus efficace.
Plusieurs gouvernements ont par ailleurs forgé des partenariats avec des établissements d’enseignement pour assurer rapidement la prestation de formations en ligne pendant la pandémie. La France, par exemple, a proposé des formations EFP gratuites en ligne pendant trois mois, l’offre couvrant le programme d’étude de base des établissements d’enseignement professionnel et les principales formations pour l’obtention de diplômes professionnels. La Corée a lancé une plateforme de formation virtuelle qui permet aux prestataires de mettre en ligne le contenu de leur formation ; aux Pays-Bas, les formations EFP en présentiel en petits groupes ont été organisées pour les étudiants qui ne disposaient de ressources numériques suffisantes (OCDE, 2020[77]). Des mesures similaires devraient également être encouragées dans d’autres pays pour fournir aux travailleurs licenciés les compétences nécessaires pour rester en activité et occuper des emplois de qualité pendant la phase de reprise et à plus long terme.
1.5. Conclusions
Copier le lien de 1.5. ConclusionsAprès avoir accusé une hausse sensible au début de la pandémie, le chômage recule maintenant dans de nombreux pays même si, selon les projections, il devrait se maintenir dans la plupart d’entre eux à un taux supérieur à celui observé avant la crise. Cependant, dans le contexte de la pandémie (et des politiques de l’emploi qui l’ont accompagnée), le chômage ne donne qu’une image partielle de la situation. Dans les premières phases de la crise, nombreux sont ceux qui se sont retirés du marché du travail en raison des restrictions qui bridaient la recherche d’emploi et de l’accroissement des responsabilités domestiques. En parallèle, les salariés qui ont conservé leur emploi ont vu leur temps de travail réduit, souvent dans le cadre de dispositifs de maintien dans l’emploi. Au deuxième trimestre de 2020, les réductions du temps de travail de ces salariés ont compté pour 80 % environ de la baisse des heures travaillées.
Si bon nombre des salariés qui ont été mis à pied temporairement ou dont le temps de travail a été réduit, parfois à zéro heures, ont rapidement repris le travail au cours de l’année écoulée, d’autres peinent à rebondir. Bien des jeunes ont perdu leur emploi pendant la crise, ou ont échoué à en trouver un à leur entrée dans la vie active. La chute du nombre d’heures travaillées dans la tranche des 15‑24 ans a été près de deux fois plus importante que celle des salariés d’âge très actif et seniors, et les heures perdues du fait de la hausse du chômage le sont sans doute plus durablement. D’autres catégories vulnérables - comme les salariés peu qualifiés et ceux qui occupent des emplois peu rémunérés - ont aussi été plus profondément touchées. À mesure que la reprise progressera, au cours des mois et années à venir, ces effets inégaux, si rien n’est fait pour y remédier, risquent de se traduire par un accroissement durable des inégalités.
À l’heure d’aborder la relance, des mesures de soutien soigneusement programmées s’imposent pour favoriser le retour au travail. Tout en assouplissant les restrictions, les pays doivent commencer à encourager la recherche active d’emploi, et assurer le retour à la vie active de ceux dont l’éloignement du marché du travail s’est accentué au cours de l’année écoulée. La reprise de la recherche d’emploi devra peut-être s’accompagner de mesures d’appui à la création de postes, comme des subventions ciblées et soigneusement programmées ; les demandeurs d’emploi, pour leur part, auront sans doute besoin d’assistance et de parcours de formation intelligemment conçus afin d’exploiter les compétences qu’ils possèdent déjà et de les orienter vers de nouveaux débouchés.
Les jeunes auront besoin d’une attention particulière. Les ravages du COVID‑19 ont particulièrement éprouvé la population senior. En réponse, les pays de l’OCDE ont mis en œuvre des mesures importantes et variées pour maîtriser le virus et protéger les personnes vulnérables. Or, ces mesures ont eu des retombées disproportionnées sur les conditions de vie et les perspectives d’emploi des jeunes. Les pays de l’OCDE doivent maintenant, dans le même objectif, mettre au point un train de mesures visant à protéger ces jeunes travailleurs de manière à leur permettre de prendre pied sur le marché du travail, à prévenir les effets dommageables sur leur début de carrière, et à les préparer aux débouchés futurs.
La question de savoir qui a supporté l’essentiel du fardeau de la crise du COVID‑19 reste en grande partie à déterminer, et on ignore encore quelle forme la reprise va revêtir. Ce chapitre a fait un premier tentative de cerner l’incidence de la pandémie sur certaines catégories de la population. De nouvelles données permettent toutefois de penser que son effet a également varié selon le statut racial, ethnique et migratoire. Par ailleurs, une analyse détaillée des retombées de la crise sur les inégalités et les conditions de vie sur l’ensemble de la distribution des revenus s’impose. De nombreux pays de l’OCDE ne disposent pas encore de microdonnées actualisées suffisantes pour que l’on puisse procéder à une étude approfondie de ces disparités. Les analyses qui exploiteront ces données lorsqu’elles seront disponibles pourront apporter des éclairages importants sur la façon dont ces groupes ont vécu la crise et ont bénéficié des mesures de protection adoptées pour amortir son impact sur les marchés du travail de l’OCDE.
Les nombreuses mesures en matière d’emploi mises en œuvre au cours de l’année écoulée ont eu de profondes répercussions. Elles ont protégé les moyens de subsistance de nombreux ménages et paré à une généralisation de la précarité. Elles ont cependant été instaurées dans l’urgence, en riposte aux failles structurelles révélées par la crise, et n’ont pas profité à tous dans la même mesure. À l’heure où les pays de l’OCDE abordent la reprise, ils doivent s’employer en priorité à remédier globalement et durablement à ces défauts structurels.
À terme, bon nombre des travailleurs les plus fragilisés par la pandémie risquent de peiner à retrouver un emploi dans leur profession, en raison de leur déficit de compétences et du fait que les entreprises restructurent de fond en comble leurs modes de production et le rapport entre travail humain et nouvelles technologies. Un soutien ciblé, sous forme de formation continue et de reconversion, doit être apporté aux plus vulnérables pour assurer une reprise inclusive qui ne néglige personne.
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Annexe 1.A. Décomposition des heures travaillées
Copier le lien de Annexe 1.A. Décomposition des heures travailléesSoit t désignant le temps, e les travailleurs salariés en emploi, j les travailleurs sans emploi (inactifs et chômeurs), o les salariés travaillant zéro heures, H le nombre total d’heures travaillées, N le nombre de personnes et h(=H/N) le nombre d’heures par salarié en emploi.
La variation du nombre d’heures travaillées entre t et t+1 peut être décomposée en deux éléments : la contribution des heures par travailleur salarié en emploi (marge intensive) et le nombre de travailleurs salariés en emploi (marge extensive) comme suit :
En tenant compte du fait que , où désigne la population concernée, l’expression ci-dessus peut se décomposer comme suit :
Autrement dit, la variation des heures peut être décomposée en plusieurs éléments : la contribution à la variation du nombre moyen d’heures travaillées des salariés en emploi, la variation nette du taux de salariés travaillant 0 heures et la variation nette du taux de travailleurs sans emploi (inactifs et chômeurs), net des variations démographiques.
Annexe 1.B. Autres données, par pays
Copier le lien de Annexe 1.B. Autres données, par paysGraphique d’annexe 1.B.1. Difficultés financières des ménages déclarant une perte d’emploi depuis le début de la pandémie
Copier le lien de Graphique d’annexe 1.B.1. Difficultés financières des ménages déclarant une perte d’emploi depuis le début de la pandémiePourcentage de répondants signalant chacune des difficultés financières suivantes depuis le début de la pandémie de COVID‑19, 2020

Note : moyenne de l’OCDE, voir Annexe 1.B pour les données par pays. Les répondants pouvaient sélectionner toutes les réponses pertinentes. Les pourcentages représentent la part des personnes qui en ont choisi au moins une. « Perte d’emploi au sein du ménage » renvoie aux répondants qui déclarent avoir (eux-mêmes ou un membre du ménage) perdu leur emploi ou avoir été licenciés par leur employeur et (ou) avoir perdu leur emploi indépendant ou leur propre entreprise, depuis le début de la pandémie de COVID‑19. Les ménages « qui n’ont perdu aucun emploi » peuvent avoir souffert d’autres formes de perturbation de l’emploi. OCDE, moyenne des pays présentés.
Source : OCDE (2021[28]), « Risks that matter 2020: The long reach of COVID‑19 », https://doi.org/10.1787/44932654-en.
Graphique d’annexe 1.B.2. Décomposition des heures par catégorie professionnelle, par pays, 2e trimestre
Copier le lien de Graphique d’annexe 1.B.2. Décomposition des heures par catégorie professionnelle, par pays, 2e trimestreVariation en %, en glissement annuel, 2020

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Les pays sont classés par ordre croissant de la variation du nombre total d’heures au 2e trimestre de 2020 (Graphique 1.10). Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays. OCDE : moyenne des pays présentés.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’EFT-UE ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Statistiques de la population active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Graphique d’annexe 1.B.3. Décomposition des heures par catégorie professionnelle, par pays, 3e trimestre
Copier le lien de Graphique d’annexe 1.B.3. Décomposition des heures par catégorie professionnelle, par pays, 3e trimestreVariation en %, en glissement annuel, 2020

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Les pays sont classés par ordre croissant de la variation du nombre total d’heures au 2e trimestre de 2020 (Graphique 1.10). Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’EFT-UE ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Statistiques de la population active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Graphique d’annexe 1.B.4. Décomposition des heures par catégorie professionnelle, par pays, 4e trimestre
Copier le lien de Graphique d’annexe 1.B.4. Décomposition des heures par catégorie professionnelle, par pays, 4e trimestreVariation en %, en glissement annuel, 2020

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Les pays sont classés par ordre croissant de la variation du nombre total d’heures au deuxième trimestre de 2020 (Graphique 1.10). Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au 2e trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays. OCDE correspond à la moyenne non pondérée des pays présentés.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’EFT-UE ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Statistiques de la population active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; Bureau de la statistique du Japon (Enquête sur la population active) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Graphique d’annexe 1.B.5. Décomposition des heures par niveau d’études
Copier le lien de Graphique d’annexe 1.B.5. Décomposition des heures par niveau d’étudesVariation en %, en glissement annuel, 2020

Note : le graphique rend compte de la contribution de chaque catégorie à la variation du nombre total d’heures. Les pays sont classés par ordre croissant de la variation du nombre total d’heures au 2e trimestre de 2020 (Graphique 1.10). Les comparaisons des séries chronologiques concernant le Mexique doivent être abordées avec prudence : au deuxième trimestre 2020, l’enquête nationale sur les professions et l’emploi (ENOE) a été suspendue et remplacée par des entretiens téléphoniques (ETOE) en raison des restrictions nationales dues à la pandémie alors en vigueur dans le pays. OCDE correspond à la moyenne des pays présentés.
Source : calculs de l’OCDE fondés sur l’EFT-UE ; Office for National Statistics du Royaume-Uni (Labour Force Survey) ; Statistiques Canada (Enquête sur la population active) ; Institut national de statistiques du Chili (Encuesta Nacional de Empleo) ; Institut national de statistiques et de géographie du Mexique (ENOE et ETOE) ; et Current Population Survey des États-Unis.
Annexe 1.C. Analyse de régression complémentaire du lien entre le COVID‑19 et les prévisions d’emploi
Copier le lien de Annexe 1.C. Analyse de régression complémentaire du lien entre le COVID‑19 et les prévisions d’emploiLes corrélations présentées aux Graphiques 1.32, 1.33, 1.34 et 1.35 permettent de penser qu’il existe une association entre l’ampleur du choc exercé par la crise du COVID‑19 sur certaines professions en 2020 et les prévisions d’emploi (en raison des mégatendances) dans ces métiers. Il apparaît que les professions qui ont particulièrement souffert pendant la pandémie sont aussi celles pour lesquelles un déclin prononcé était déjà prévu. Les résultats fondés sur cette corrélation mettent néanmoins en avant une hétérogénéité substantielle d’une profession à l’autre. Les raisons à cette hétérogénéité sont parfois multiples. Pendant la pandémie, par exemple, certains métiers (et secteurs) ont pu être démesurément frappés par les confinements imposés tandis que d’autres ont pu prospérer sous l’effet de la hausse subite de la demande, raisons qui ont peu à voir avec l’effet des mégatendances sur l’emploi. Pour tenir partiellement compte de cette hétérogénéité au niveau des professions, l’analyse de régression présentée au Tableau d’annexe 1.C.1 estime le lien entre l’augmentation des offres d’emploi en ligne et celle prévue dans les projections de l’emploi, en prenant pour variables de contrôle des variables indicatrices de la profession (au niveau à deux chiffres) dans des régressions MCO séparées. Dans le cas des États-Unis, d’autres variables de contrôle au niveau des professions sont également disponibles, de sorte que les résultats rendent également compte des qualifications professionnelles et de l’hétérogénéité des niveaux d’étude, et de l’expérience et des différences en matière de formation en cours d’emploi dans les différents métiers (voir la note au Tableau d’annexe 1.C.1). Les résultats de la régression MCO confirment dans les grandes lignes que la corrélation entre la croissance ou le recul du nombre d’offres d’emplois en ligne et les évolutions futures de l’emploi demeure statistiquement significative, même après prise en compte de l’hétérogénéité selon les professions et d’autres variables de contrôle, mais étant donné la petite taille de l’échantillon (surtout dans le cas du Canada), la prudence s’impose dans l’interprétation et l’extrapolation de ces résultats.
Tableau d’annexe 1.C.1. Lien entre l’augmentation du nombre d’offres d’emplois en ligne et les projections de l’emploi
Copier le lien de Tableau d’annexe 1.C.1. Lien entre l’augmentation du nombre d’offres d’emplois en ligne et les projections de l’emploi
Variable dépendante : augmentation des offres d’emplois en ligne (2019‑20) |
AUS |
CAN |
USA |
---|---|---|---|
Projections d’emploi (croissance) |
0.006** |
0.355* |
0.003** |
Variables de contrôle |
|||
Qualifications/niveau de formation |
OUI |
NON |
OUI |
Expérience + formation en cours d’emploi |
NON |
NON |
OUI |
Catégorie professionnelle (niveau à deux chiffres) |
OUI |
OUI |
OUI |
Obs. |
154 |
81 |
424 |
R2 |
0.24 |
0.06 |
0.11 |
Note : le tableau présente les résultats de régressions MCO distinctes. La variable dépendante est l’augmentation des offres d’emplois en ligne recueillies entre janvier et décembre 2019 et entre janvier et décembre 2020, par profession. Les variables de contrôle sont propres à chaque pays : qualifications/niveaux de formation : i) Australie : variable indicatrice 1 (très qualifié) à 5 (peu qualifié) (voir l’enquête sur la population active [Labour Force Survey] du Bureau australien de statistiques [Australian Bureau of Statistics] ; ii) États-Unis : niveau de qualification généralement requis pour l’emploi concerné, à savoir diplôme de cycle court, licence, master, ou doctorat, pas de diplôme d’enseignement formel, études universitaires (non diplômantes) ou diplôme du deuxième cycle de l’enseignement secondaire ou équivalent (voir Bureau of Labor Statistics des États-Unis). Expérience et formation en cours d’emploi : expérience professionnelle dans un métier connexe (aucune, moins de 5 ans, plus de 5 ans) et formation en cours d’emploi généralement nécessaire pour atteindre le niveau de compétence requis dans la profession (aucune, stage/internat, apprentissage, formation en cours d’emploi de courte durée, de durée moyenne, de longue durée). Catégorie professionnelle (niveau à deux chiffres) : ce sont des variables indicatrices des professions au niveau à deux chiffres des nomenclatures nationales, à savoir ANZSCO (Australie), CNP (Canada), SOC (États-Unis). *, ** : coefficients significatifs aux niveaux de confiance de 10 % et 5 %.
Source : calculs de l’OCDE basés sur les données de Burning Glass Technologies et du portail Australia Labour Market Information (LMIP), du Système de projection des professions au Canada (SPPC), et des projections d’emploi du Bureau of Labor Statistics (BLS) des États-Unis.
Annexe 1.D. Les projections d’emploi et leurs sources
Copier le lien de Annexe 1.D. Les projections d’emploi et leurs sourcesCe chapitre utilise les projections d’emploi disponibles pour chaque pays. On trouvera ci-dessous les sources des données et certains résultats.
Australie : les projections d’emploi présentées à la section 1.4 se fondent sur les données détaillées de l’enquête sur la population active (Labour Force Survey) du Bureau australien de statistiques (Australian Bureau of Statistics). Elles ont été établies à partir de modèles de séries chronologiques qui synthétisent les informations contenues dans ces séries et les convertissent en prévisions. Elles sont obtenues par l’association d’un modèle de moyenne mobile intégrée autorégressive (ARIMA) et d’un modèle de lissage exponentiel avec amortissement de tendance, certains ajustements étant effectués pour tenir compte des études réalisées par la National Skills Commission et les évolutions sectorielles futures connues.
Canada : les projections présentées à la section 1.4 se fondent sur l’analyse du Système de projection des professions au Canada (SPPC) achevée en 2019, avant le déclenchement de la pandémie du COVID‑19 en 2020. Les projections d’emploi par profession sont d’abord établies au niveau sectoriel, en multipliant l’emploi total projeté dans un secteur donné par la part projetée de l’emploi de la profession dans le secteur. On peut ensuite faire la somme des résultats de tous les secteurs pour produire les projections d’emploi totales pour chaque profession. Les projections d’emploi par secteur sont calculées à partir des perspectives macroéconomiques et sectorielles (projections du PIB et de la productivité notamment) ; les parts projetées de l’emploi des professions dans le secteur sont établies sur la base des tendances historiques et d’autres hypothèses (dont l’écart de production). Les projections ont été élaborées pour 42 catégories sectorielles qui couvrent l’ensemble de l’économie (sur la base du Système de classification des industries de l’Amérique du Nord - SCIAN) et 293 catégories professionnelles qui couvrent l’ensemble de la population active (sur la base de la Classification nationale des professions (CNP).
Royaume-Uni : les projections présentées à la section 1.4 s’appuient sur les travaux de la Commission for Employment and Skills du Royaume-Uni (UKCES) et du Warwick Institute for Employment Research / Cambridge Econometrics. Leurs calculs se fondent sur différentes sources de données et font appel à diverses techniques économétriques et statistiques. Pour des informations détaillées, voir le rapport Working Futures Technical Report (disponible à l’adresse suivante : https://www.gov.uk/government/publications/uk-labour-market-projections-2014-to-2024)
États-Unis : les projections présentées ici se fondent sur la base de données National Employment Matrix produite par le Bureau of Labor Statistics (BLS). La matrice affiche les données relatives à l’emploi et à ses variations pour l’année de référence et l’année de projection. Le BLS établit des projections de l’emploi par profession en analysant la structure des effectifs actuelle et prévue (la répartition des métiers dans un secteur) dans une matrice secteur-profession. Les variations de cette répartition dans chaque secteur sont projetées et appliquées aux projections sectorielles définitives, produisant des projections détaillées des professions par secteur. La matrice fournit des estimations portant sur 790 métiers dans 295 secteurs. La base de données « Occupational Projections Data » affiche des données relatives à l’emploi, à ses variations, aux créations de postes, aux formations, stages et rémunérations de chaque profession contenue dans la National Employment Matrix.
Tableau d’annexe 1.D.1. Professions connaissant l’essor et le déclin les plus rapides, projections à moyen et long termes
Copier le lien de Tableau d’annexe 1.D.1. Professions connaissant l’essor et le déclin les plus rapides, projections à moyen et long termes
Professions connaissant l’essor le plus rapide, pays pour lesquels on dispose de données |
|||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|
Australie |
Variation projetée de l’emploi (2019‑24) |
Canada |
Variation projetée de l’emploi (2019‑28) |
États-Unis |
Variation projetée de l’emploi (2019‑29) |
Royaume-Uni |
Variation projetée de l’emploi (2020‑24) |
Spécialistes en sciences techniques (autres) |
30 % |
Médecins spécialisés |
31 % |
Techniciens de service de parcs éoliens |
61 % |
Professions de soins |
5 % |
Travailleurs sociaux |
29 % |
Omnipraticiens et médecins en médecine familiale |
31 % |
Infirmiers praticiens |
52 % |
Professions intermédiaires de la santé et du travail social |
5 % |
Ingénieurs support informatique et ingénieurs d’essai |
29 % |
Infirmiers autorisés et infirmiers psychiatriques autorisés |
27 % |
Installateurs de panneaux photovoltaïques |
51 % |
Personnel de santé |
5 % |
Spécialistes des activités de bien-être, de loisirs et d’éducation artistique de proximité |
28 % |
Ergothérapeutes et autre personnel en thérapie et en diagnostic |
25 % |
Assistants en ergothérapie |
35 % |
Service à la clientèle |
4 % |
Spécialistes des réseaux d'ordinateurs |
26 % |
Physiothérapeutes |
25 % |
Statisticiens |
35 % |
Administrateurs et dirigeants d’entreprise |
4 % |
Professions connaissant le déclin le plus rapide, pays pour lesquels on dispose de données |
|||||||
Agents de tri de courrier |
‑16 % |
Commis de banque, d’assurance et d’autres services financiers et agents de recouvrement |
‑14 % |
Coupeurs et tailleurs, manuels |
‑30 % |
Métiers de la vente |
‑2 % |
Opérateurs de traitement des bois |
‑18 % |
Adjoints administratifs |
‑14 % |
Réparateurs de montres et d’horloges |
‑32 % |
Métiers du textile, de l’imprimerie et autres métiers qualifiés |
‑2 % |
Assistants et secrétaires personnels |
‑18 % |
Opérateurs de machines et travailleurs de traitement des fibres et des fils textiles, du cuir et des peaux |
‑17 % |
Opérateurs de réacteurs nucléaires |
‑36 % |
Métiers qualifiés de la métallurgie, de l’électricité et de l’électronique |
‑3 % |
Standardistes |
‑19 % |
Commis à la saisie de données et opérateurs d'équipement d'éditique et personnel assimilé |
‑20 % |
Agents de stationnement |
‑36 % |
Conducteurs de processus, d'installations et de machines |
‑5 % |
Secrétaires |
‑30 % |
Conseillers en voyages |
‑20 % |
Opérateurs de traitement de texte et dactylographes |
‑36 % |
Secrétariat et métiers assimilés |
‑12 % |
Source : Australie : projection d’emploi du portail Labour Market Information (LMIP) ; Canada : Classification nationale des professions (CNP) ; États-Unis : projections d’emploi du Bureau of Labor Statistics (BLS) ; Royaume-Uni : évolutions et projections d’emploi Working Futures de la UKCES.
Notes
Copier le lien de Notes← 1. On trouvera une analyse approfondie de l’hétérogénéité des restrictions à la mobilité individuelle dans les pays européens dans Commission européenne (2020[82]).
← 2. Le recul bref et brutal des déplacements constaté en janvier, coïncidant avec la deuxième vague de restrictions, tient en grande partie à la période de vacances observée dans la grande majorité des pays de l’OCDE, et non aux interventions non pharmaceutiques comme les confinements.
← 3. Dans de nombreux autres pays, les mises à pied temporaires sont comptabilisées dans la catégorie « salariés » dans les statistiques de la population active.
← 4. Outre les États-Unis et le Canada, où le taux de chômage a augmenté de 3.2 points au cours de l’année 2020, les exceptions notables sont la Colombie (3.8 points), la Lituanie (3 points), le Chili (2.7 points), l’Islande (2.5 points) et l’Espagne (2.3 points).
← 5. Si la première et la troisième de ces catégories font partie de la population active, les personnes en marge du marché de l’emploi sont généralement classées parmi les inactifs. Eurostat fait également état d’une quatrième catégorie composée des personnes qui cherchent un emploi mais ne sont pas disponibles actuellement. L’analyse qui suit ne distingue pas ces personnes du reste de la population inactive.
← 6. La grande majorité des pays qui avaient suspendu ou modifié les obligations de recherche d’emploi les avaient rétablies à la fin de 2020.
← 7. Dans l’Union européenne, le sous-emploi a représenté la quasi-totalité de la hausse de 8.9 points de la main d’œuvre sous-utilisée observée au deuxième trimestre de 2020, le chômage n’ayant progressé pour sa part que de 0.2 point. Cette utilisation de la marge intensive pour absorber les conséquences de la crise sur le travail a été particulièrement forte en Italie, en France, au Portugal, en Belgique et au Royaume-Uni.
← 8. Les variations en glissement annuel sont utilisées pour rendre compte de la saisonnalité. Néanmoins, comme elles représentent la somme des variations trimestrielles sur quatre trimestres glissants, elles n’appréhendent pas totalement l’ampleur de la baisse lorsque, comme ici, celle-ci se concentre sur le dernier mois. De même, la prudence s’impose lorsque l’on compare les variations d’une année sur l’autre de deux trimestres consécutifs (T2 et T3 par exemple), la seconde comprenant un trimestre supplémentaire de l’année précédente et la première un trimestre supplémentaire de l’année en cours.
← 9. La contribution positive de l’emploi sans heures travaillées à la variation du nombre total d’heures travaillées observée dans divers pays au troisième trimestre de 2020 (notamment l’Italie, la République slovaque, l’Estonie, la République tchèque, l’Australie, le Luxembourg, l’Islande, la Pologne, la Hongrie, les Pays-Bas, la Finlande, le Danemark, la Norvège) tient à ce que le nombre de salariés n’ayant pas du tout travaillé au troisième trimestre 2020 était inférieur à celui du troisième trimestre 2019, ce qui s’explique par le fait que ce chiffre englobe les salariés en congé. Trois phénomènes ont ainsi pu contribuer à ce résultat : i) de nombreux salariés ont été invités à prendre des congés annuels durant les périodes de confinement et à renoncer à leurs vacances en échange ; ils étaient donc en congé au troisième trimestre de 2019, mais au travail durant le troisième trimestre de 2020 ; ii) des salariés en congés au troisième trimestre de 2019 étaient chômeurs au troisième trimestre de 2020 ; iii) enfin, les salariés en congés au troisième trimestre de 2019 et couverts par un dispositif de maintien dans l’emploi sans heures travaillées au troisième trimestre de 2020 n’influent pas sur le nombre d’heures au troisième trimestre parce qu’ils avaient travaillé zéro heures en 2019 et en 2020. Ils influent en revanche sur le nombre d’heures du deuxième trimestre parce qu’ils travaillaient au deuxième trimestre de 2019 et était en emploi mais sans heures de travail au deuxième trimestre de 2020.
← 10. Le Royaume-Uni fait dans ce cas partiellement exception, peut-être parce que jusqu’en juillet 2020, les salariés travaillant à temps partiel (mais pas zéro heure), n’étaient pas admissibles aux dispositifs de maintien de l’emploi - ce qui a pu empêcher le retour au travail à temps partiel de certains salariés ayant travaillé zéro heure au début du trimestre (voir le chapitre 2).
← 11. OCDE, Timely Indicators of Entrepreneurship (https://stats.oecd.org/Index.aspx?QueryId=74180). L’Espagne, où le nombre de faillites est monté en flèche au quatrième trimestre de 2020, est la seule exception.
← 12. On entend généralement par travailleurs en mise à pied temporaire ceux qui s’attendent à retourner chez leur employeur (aux États-Unis, cette réintégration doit intervenir dans les six mois suivant la mise au chômage) ou à qui une date de retour précise a été indiquée. Aux États-Unis si, en raison du coronavirus, une personne n’est pas certaine de pouvoir retourner au travail, les enquêteurs ont reçu pour consigne de cocher la case « oui » plutôt que « ne sait pas ». Cette méthode permet d’intégrer le répondant au nombre des personnes en mise à pied temporaire, et a peut-être eu pour effet de gonfler les chiffres.
← 13. Se fondant sur les données de l’enquête Survey of Income and Program Participation menée aux États‑Unis, Fujita et Moscarini (2017[79]) ont observé que plus de 40 % de tous les salariés en cessation d’emploi sont par la suite revenus chez leur employeur, ce pourcentage augmentant durant les phases de contraction. Ce chiffre dépasse toutefois la part due aux salariés en mise à pied temporaire qui avaient déclaré avoir été mis au chômage pour une durée déterminée et comptaient retrouver leur emploi car 20 % environ de ceux dont le départ était censé être permanent ont également été rappelés par leur ex-employeur.
← 14. Ce chiffre a ensuite diminué, passant à 40.1% en mai 2021 (voir https://www.bls.gov/web/empsit/cpseea34.htm).
← 16. Selon des travaux récents de Ganong et al. (2021[22]) , qui ont recensé les périodes récurrentes de chômage parmi un grand nombre de chômeurs pendant la crise provoquée par le COVID‑19, les données recueillies dans le cadre de l’enquête CPS concernant la durée de leur dernière période de chômage sous-estime probablement la mesure dans laquelle ils ont été victimes de suppressions d’emplois durant la pandémie.
← 17. Ces chiffres sont corrigés de la saisonnalité, voir https://www.bls.gov/news.release/empsit.t12.htm.
← 18. Les données utilisées dans cette section limitent l’analyse à un niveau relativement global qui ne permet pas de désagréger d’importantes tendances hétérogènes, comme celles observées dans le domaine du transport et de l’entreposage. Sont donc examinés dans cette section les principaux aspects des retombées sectorielles et professionnelles à court terme de la crise ; les tendances à plus long terme, à un plus fin niveau de désagrégation, et leurs conséquences sont traitées dans la dernière partie du chapitre.
← 19. Contrairement au deuxième trimestre de 2020, plusieurs sous-secteurs ont été autorisés, moyennant des protocoles sanitaires rigoureux, à reprendre leur activité au troisième trimestre de 2020. La demande de services de transport de passagers est cependant restée faible, et la crise a modifié les prévisions de croissance du secteur à long terme.
← 20. Voir Opportunity Insights Economic Tracker, données disponibles à l’adresse suivante :https://tracktherecovery.org/.
← 21. Si, dans l’OCDE, les autorités ont publié des listes de travailleurs considérés essentiels, ces définitions varient d’un pays et d’un État à l’autre et évoluent au fil du temps. Aux États-Unis, par exemple, 42 États ont publié des arrêtés ou directives à ce sujet, mais 20 seulement suivent la définition établie à l’échelon fédéral (voir CISA), les 22 autres publiant leurs propres listes des professions censées rester en activité.
← 22. L’estimation fondée sur l’EFT-UE 2019 couvre les professions suivantes : spécialistes de la santé ; professions intermédiaires de la santé ; personnel soignant ; spécialistes de l’enseignement ; cuisiniers ; serveurs et barmen ; assistants de fabrication de l’alimentation ; personnel des services de protection et de sécurité ; agents d’accompagnement et assimilés (transports et tourisme) ; techniciens, contrôle de processus industriels ; commerçants et vendeurs ; professions militaires.
← 23. Goos, Manning et Salomons, (2014) utilisent les données du Panel communautaire des ménages (PCM, remplacé depuis par les Statistiques de l’UE sur le revenu et les conditions de vie ou EU-SILC), pour classer chaque profession de la Classification internationale type des professions (CITP) en fonction de leur rémunération européenne moyenne, et les regrouper selon le classement en résultant dans les trois catégories définies, à savoir fortement, moyennement et faiblement rémunératrices. Cette classification a été adoptée dans des publications antérieures de l’OCDE pour définir les professions peu, moyennement et très qualifiées (voir par exemple OCDE (2020[5])). Figurent parmi les professions peu rémunératrices les professions élémentaires de la vente et des services ; les vendeurs et démonstrateurs en magasin ; le personnel des services directs aux particuliers et le personnel des services de protection et de sécurité ; les manœuvres des mines, du bâtiment et des travaux publics, des industries manufacturières et des transports. Les professions fortement rémunératrices comprennent les directeurs, cadres de direction et gérants, les professions intellectuelles et scientifiques et assimilées.
← 24. Les professions fortement, moyennement et faiblement rémunérées étaient désignées sous les noms de professions très, moyennement et peu qualifiées dans la terminologie de l’OCDE (2020[5]).
← 25. Il convient de noter que les données sur lesquelles le Graphique 1.19 est fondé ne permettent pas de distinguer les personnes actuellement en formation à temps complet. De ce fait, certaines de ces évolutions (celles concernant le chômage notamment) tiennent peut-être aux étudiants qui ont perdu leur emploi. Cet effet devrait toutefois être limité parmi les salariés peu qualifiés, qui ont sans doute quitté le système d’enseignement depuis longtemps à un âge où peu de salariés associent travail et études (sauf dans le cas de personnes d’âge mûr reprenant des études secondaires).
← 26. Cette divergence est particulièrement notable dans certains pays, notamment la Slovénie, la République slovaque, le Chili, le Portugal, la Grèce, l'Irlande, la Finlande, les Pays-Bas, la Belgique, la Suède et le Royaume-Uni. On remarquera qu’en Slovénie, en République slovaque, au Portugal, en Irlande, aux Pays-Bas, en Belgique, en Suède et au Royaume-Uni, le chômage des personnes très qualifiées n’a pas enregistré de hausse, en glissement annuel, pendant l’année 2020. Dans le même temps, le taux de chômage des personnes peu qualifiées n’a cessé de progresser en République slovaque, en Grèce et en Irlande.
← 27. Il se peut que ces évolutions soient aussi partiellement influencées par les étudiants, selon que ceux-ci ont perdu des emplois d’été temporaires, à temps partiel, ou n’en ont pas trouvé.
← 28. Il s’agit sans doute là d’une sous-estimation de l’incidence réelle de la crise sur le taux d’embauche ; en effet, en prenant pour indicateur des embauches les entrées en fonction au cours des trois mois antérieurs, on risque de prendre également en compte les recrutements effectués au cours du trimestre précédent.
← 29. Les fortes hausses enregistrées au Canada au deuxième trimestre ont été en grande partie dues à la fermeture des écoles (voir les notes du Graphique 1.24). Aux États-Unis, le nombre important de jeunes sans emploi et sortis du système éducatif et la proportion plus élevée de ces jeunes au chômage tient probablement à l’intégration des mises à pied temporaires aux chiffres du chômage.
← 30. Van den Berge (2018[78]) constate que les étudiants qui obtiennent leur diplôme en phase de contraction économique subissent un préjudice plus important que les diplômés d’une formation professionnelle. Néanmoins, grâce à leur mobilité professionnelle, ils remédient plus rapidement à ce décalage, qui perdure chez les seconds.
← 31. Se fondant sur l’étude longitudinale Understanding Society conduite au Royaume-Uni, Bell, Codreanu et Machin (2020[80])) ont constaté que probabilité de travailler moins de 50 % du temps de travail normal (février 2019) des parents de trois enfants ou plus en juin était supérieure de 5.4 points de pourcentage à celle des salariés sans enfant.
← 32. Alors qu’Alon et al. (2020[81]) relèvent un creusement prononcé (et inédit) des disparités entre les taux de chômage des hommes et des femmes aux États-Unis par suite de la pandémie du COVID‑19, Hupkau et Petrongolo (2020[57]), se fondant sur des données longitudinales, constatent des réductions des heures de travail (et des pertes d’emplois) à peu près identiques pour les deux sexes au Royaume-Uni. Ils observent également que les pertes d’heures et de revenu des femmes ont été légèrement inférieures, que ce soit en tenant compte d’un large éventail de caractéristiques personnelles et professionnelles ou pas.
← 33. La fermeture généralisée des écoles aux États-Unis a aussi pu fortement contribuer à cet écart persistant.
← 35. Il convient de noter que les projections pour les professions au Royaume-Uni ne sont disponibles qu’à un niveau d’agrégation supérieur (deux chiffres de la Standard Occupational Classification britannique), et que la corrélation se fonde en conséquence sur un nombre limité de points communs.