Les longues attentes avant une chirurgie élective (non urgente) suscitent le mécontentement des patients car elles retardent les bienfaits escomptés du traitement tandis que la douleur et les handicaps perdurent. Elles résultent d’une interaction complexe entre la demande et l’offre de services de santé, les médecins jouant un rôle essentiel sur les deux plans. La demande de services de santé et de chirurgie élective est déterminée par l’état de santé de la population, l’évolution des technologies médicales (dont la simplification de nombreuses procédures, comme les opérations de la cataracte), les préférences des patients et la part des frais laissés à la charge de ces derniers. Cela étant, les médecins jouent un rôle central dans la décision d’opérer ou non un patient. Du côté de l’offre, la disponibilité de chirurgiens, d’anesthésistes ou d’autres personnels de santé présents dans les équipes chirurgicales ainsi que l’existence des équipements médicaux nécessaires ont une incidence sur les taux d’activité chirurgicale.
L’indicateur utilisé ici porte sur le temps qui s’écoule entre le moment où un spécialiste ajoute un patient à la liste d’attente en vue d’une intervention et le moment où celle-ci a lieu. Les graphiques présentent les temps d’attente moyens et médians. Comme certains patients attendent très longtemps, le temps d’attente médian est systématiquement et considérablement inférieur au temps d’attente moyen, et constitue peut‑être par conséquent une mesure plus fiable de la tendance centrale de l’indicateur. L’écart substantiel entre les deux mesures, surtout dans des pays comme le Chili, l’Estonie et la Pologne, met en lumière l’existence de groupes de patients problématiques qui attendent nettement plus longtemps que d’autres avant leur opération.
En 2017, le temps d’attente médian pour une opération de la cataracte était inférieur à 50 jours en Italie, en Hongrie, au Danemark et en Suède (Graphique 5.16). Les pays où il est le plus long sont l’Estonie et la Pologne, avec 7 mois environ pour l’une et plus d’un an pour l’autre. Si l’on regarde l’évolution sur les dix dernières années, on constate que les temps d’attente se sont allongés dans certains pays, comme le Canada et le Portugal dernièrement, qu’ils ont diminué en Espagne et sont restés relativement stables en Nouvelle-Zélande.
Le temps d’attente médian pour une arthroplastie de la hanche était inférieur à 50 jours au Danemark et en Italie (Graphique 5.17). Il était particulièrement long au contraire, huit mois sinon plus, en Estonie, en Pologne et au Chili. Sur les cinq dernières années, un recul a pu être observé dans quelques pays, comme la Finlande, la Hongrie et le Danemark, contre un net allongement en Estonie.
Les temps d’attente pour une arthroplastie du genou suivent des tendances similaires à celles de l’arthroplastie de la hanche, mais avec une moyenne plus élevée. L’Estonie, la Pologne et le Chili affichent, là encore, et de loin, les délais les plus longs (Graphique 5.18). Le temps d’attente médian dans l’échantillon de pays de l’OCDE est de 114 jours, excédant de plus de 30 jours celui d’une opération de la cataracte et de 20 jours celui d’une arthroplastie de la hanche. En Australie, l’attente médiane a légèrement augmenté au fil du temps pour atteindre 200 jours tandis qu’elle n’a pratiquement pas varié au Portugal depuis 2007. En Hongrie et au Danemark, les délais se sont raccourcis au cours des dix dernières années.
Les garanties de délais sont devenues les mesures les plus fréquemment utilisées pour réduire le temps d’attente dans plusieurs pays, mais elles ne sont efficaces que dans la mesure où elles sont correctement appliquées (Siciliani, Borowitz et Moran, 2013[1]).
Depuis la fin des années 2000, le Danemark a opté pour le plafonnement des délais, conjugué au libre choix de l’établissement de soins, pour réduire le temps d’attente des patients. Le temps d’attente garanti a été abaissé de deux mois à un mois en 2007, et les Danois se sont vu accorder en parallèle la possibilité de choisir eux‑mêmes l’établissement qui les prendra en charge. Dans le cadre de ce dispositif, si l’hôpital prévoit qu’il ne pourra pas respecter le délai garanti, le patient peut se tourner vers un autre établissement public ou privé. Si les soins sont prodigués en dehors de la région où vit le patient, celle-ci en prendra le coût à sa charge.
En Hongrie également, les temps d’attente avant une intervention chirurgicale non urgente sont orientés à la baisse depuis plusieurs années pour de nombreux types d’actes. Des objectifs spécifiques ont été définis de manière à faire passer le temps d’attente en-deçà de 60 jours dans le cas d’interventions de petite chirurgie et en-deçà de 180 jours s’il s’agit de chirurgie lourde et ce, pour tous les patients. Pour ce faire, le gouvernement a pris des dispositions législatives et réglementaires relatives à la gestion des listes d’attente, introduit un système de liste d’attente en ligne d’envergure national permettant de connaître la situation en temps réel, mobilisé des moyens financiers supplémentaires pour réduire l’attente dans certaines régions ou certains établissements hospitaliers et encouragé une redistribution des patients depuis les établissements où l’attente est la plus longue vers ceux où elle est moindre.