Les services de soins primaires sont le principal point d’entrée dans le système de santé. Les indicateurs sur l’utilisation de ces services constituent donc un baromètre critique de l’accessibilité, les données par revenu illustrant le degré des inégalités d’accès.
En ce qui concerne l’accès à un médecin, en moyenne, un peu moins de 80 % des personnes âgées de 15 ans ou plus ont indiqué avoir consulté au cours des 12 derniers mois, si l’on retient la probabilité ajustée en fonction des besoins (Graphique 5.5). Il convient de noter ici que les besoins sont modélisés et non mesurés directement (voir la partie « Définition et comparabilité » pour plus de détails). D’autre part, la probabilité de consulter un médecin peut être relativement plus faible dans quelques pays parce que la population y a davantage recours à d’autres professionnels de santé, par exemple aux infirmiers praticiens. En tout état de cause, les différences d’un pays à l’autre sont importantes : ajustée en fonction des besoins, la probabilité de consulter un médecin va en effet d’environ 65 % en Suède et aux États-Unis à 89 % en France.
Les inégalités socioéconomiques dans l’accès à un médecin sont évidentes dans presque tous les pays de l’OCDE. Hormis au Danemark et en République slovaque, les personnes les plus aisées consulteront plus facilement un médecin que les personnes du quintile de revenu inférieur, pour un niveau de besoin comparable. Ces inégalités en faveur des hauts revenus sont particulièrement prononcées en Finlande et aux États-Unis (avec un écart de plus de 15 points de pourcentage) mais pratiquement inexistantes au Royaume-Uni, en Irlande et aux Pays-Bas. Elles sont nettement plus marquées en ce qui concerne la consultation de spécialistes qu’en ce qui concerne celle de médecins généralistes (OCDE, 2019[1]).
Pour ce qui est des soins dentaires, seulement 63 % des personnes âgées de 15 ans ou plus ont déclaré avoir consulté un dentiste au cours des douze derniers mois, en moyenne, dans 27 pays de l’OCDE (Graphique 5.6). Cette situation s’explique en partie par la conception des prestations d’assurance : dans de nombreux pays de l’OCDE, les régimes publics prennent beaucoup moins bien en charge les soins dentaires que les soins hospitaliers ou les consultations médicales (voir l’indicateur « Étendue de la couverture de santé »). Globalement, l’accès aux soins dentaires est compris entre 41 % de personnes qui consultent un dentiste aux États‑Unis et 93 % en Irlande. Les disparités socioéconomiques sont importantes : on observe en moyenne, pour les consultations, un écart de près de 20 points de pourcentage entre les catégories à revenu élevé et celles à revenu faible (respectivement 72 % et 54 %). Les inégalités sont le plus marquées au Canada, au Portugal et aux États-Unis (plus de 30 points de pourcentage), mais presque inexistantes en Irlande.
Les examens de dépistage du cancer sont également plus rares chez les personnes les moins aisées et ce, malgré le fait que la plupart des pays de l’OCDE proposent des programmes de dépistage gratuits. Par exemple, en moyenne, 79 % des femmes appartenant à la catégorie des hauts revenus ont subi un frottis cervical (test de Papanicolaou) pour le dépistage du cancer du col de l’utérus, contre 65 % de celles appartenant au quintile de revenu le plus faible (Graphique 5.7). Les personnes les plus fortunées bénéficient également d’un meilleur accès au dépistage du cancer du sein et du cancer colorectal, bien que les inégalités soient moins marquées que pour le cancer du col de l’utérus. Le taux de dépistage de ce dernier est particulièrement faible chez les personnes se situant au bas de l’échelle des revenus en Suède et en Norvège (plus de 30 points de pourcentage d’écart entre les quintiles de revenu), mais relativement uniforme en Irlande, au Chili et en Islande. Dans l’ensemble, le taux de dépistage du cancer du col de l’utérus va d’un peu moins de 50 % aux Pays-Bas, à plus de 85 % en République tchèque et en Autriche. Les dépistages concernent les femmes âgées de 20 à 69 ans, et sont effectués tous les trois ans. Il convient de signaler que certains pays (les Pays-Bas, par exemple) ont fait le choix de dépistages plus espacés et pour une tranche d’âge plus restreinte. Il s’ensuit que les taux de dépistage peuvent être plus faibles, sans que les résultats soient nécessairement plus mauvais. Les pays proposant des programmes nationaux de dépistage systématique offrent un accès plus uniforme que les pays où le dépistage se fait de manière plus ponctuelle (Palencia, 2010[2]).
Ces difficultés d’accès aux services de santé, en particulier pour les plus démunis, se posent alors même que la plupart des pays de l’OCDE ont mis en place une couverture universelle ou quasi universelle pour un ensemble de services de base (voir l’indicateur « Population bénéficiant d’une couverture de santé »). Cette situation s’explique en partie par la participation substantielle des patients aux frais, l’exclusion de certains services des ensembles de prestations prises en charge, ou le rationnement implicite des services. L’absence de culture sanitaire suffisante, les stratégies de communication imparfaites et la mauvaise qualité des soins y contribuent également.