La prescription est une composante clé de la prise en charge des personnes âgées. Le vieillissement et la multimorbidité exigent souvent des patients plus âgés qu'ils prennent de nombreux médicaments (polymédication) pendant de longues périodes. Cette polymédication est dans de nombreux cas justifiée par la gestion de différents troubles, mais la polymédication inadaptée augmente le risque d'événements iatrogènes médicamenteux (EIM), d'erreurs médicamenteuses et d'effets nocifs entraînant des chutes et des épisodes de confusion et de délire. Diverses initiatives visant à améliorer la sécurité médicamenteuse et à prévenir les effets nocifs impliquent des examens réguliers des médicaments et une meilleure coordination entre les réseaux de médecins et de pharmaciens tout au long du parcours de soins du patient. Chaque année les EIM sont à l'origine de 8.6 millions d'hospitalisations non prévues en Europe (Mair et al., 2017[1]). La polymédication est l’un des trois principaux domaines d'action du troisième Défi mondial pour la sécurité des patients (OMS, 2019[2]).
Dans une sélection de 14 pays pour lesquels la couverture des données est plus large, les taux de polymédication parmi les personnes âgées varient de 1 à 11, la Turquie déclarant les taux les plus faibles, et le Luxembourg les plus élevés. Dans les pays disposant de données qui concernent uniquement les soins de santé primaires, les taux de polymédication varient de 1 à 3 – la Finlande affiche le taux le plus faible, et la Corée le plus élevé (Graphique 11.11). Ces fortes variations s'expliquent en partie par la mise en œuvre d'initiatives ciblant la polymédication dans certains pays, notamment des mesures ciblées sur le remboursement et la prescription. Les pays dans l'incapacité de dissocier les soins de santé primaires et les soins de longue durée dans les données sur les prescriptions affichent des moyennes plus élevées et des écarts plus importants pour les taux de polymédication que les pays disposant de données uniquement sur les soins de santé primaires.
Les opioïdes sont souvent utilisés pour soulager la douleur (voir les indicateurs « Consommation d’opioïdes » dans le chapitre 4 et « Sécurité des soins primaires – les prescriptions » dans le chapitre 6) et sont associés à des taux élevés d'admissions aux urgences provoquées par des EIM chez les adultes plus âgés (Lown Institute, 2019[3]). Le graphique 11.12 indique que dans tous les pays, à l’exception du Canada, ce sont les personnes âgées qui consomment le plus d'opioïdes. Dans les pays de l'OCDE, les personnes âgées en consomment en moyenne 1.5 fois plus que les 50‑69 ans, et près de cinq fois plus que les 18‑49 ans. C'est au Luxembourg que la consommation d’opioïdes chez les personnes âgées est la plus élevée, et en Turquie qu'elle est la plus faible. Ces variations s'expliquent en partie par des différences dans les pratiques cliniques en matière de gestion de la douleur, ainsi que par des disparités au regard de la réglementation, des cadres juridiques relatifs aux opioïdes, des politiques de prescription et des directives thérapeutiques.
Malgré le risque d’effets secondaires indésirables comme la fatigue, les vertiges et la confusion, les benzodiazépines sont souvent prescrites aux personnes âgées pour lutter contre l’angoisse et les troubles du sommeil. La consommation à long terme de benzodiazépines peut conduire à des effets indésirables (chutes, accidents de la route et surdosage), ainsi qu’à la tolérance, la dépendance et l’augmentation de la dose. Outre la période d’utilisation, le type de benzodiazépine prescrit est problématique, notamment les types à longue durée d’action qui ne sont pas recommandés pour les personnes âgées parce qu’ils prennent plus de temps à être éliminés par le corps (OCDE, 2017[4]). La campagne « Choosing Wisely » a fait des prescriptions inappropriées de benzodiazépines une priorité afin d'améliorer l'usage rationnel des médicaments chez les personnes âgées (2019[5]).
On observe une baisse de la consommation de benzodiazépines entre 2012 et 2017 en moyenne dans la zone OCDE (Graphique 11.13). La baisse la plus importante de consommation chronique a eu lieu en Islande et en Finlande, tandis que la Corée et la Norvège ont enregistré la plus forte contraction de la consommation de benzodiazépines à longue durée d'action. Les politiques de remboursement et de prescription des benzodiazépines, ainsi que les différences dans la prévalence des maladies et les directives de traitement, peuvent expliquer les fortes variations observées.