Les opioïdes sont des analgésiques narcotiques qui sont devenus le traitement de référence de la douleur modérée à intense dans de nombreux pays développés. Dans le même temps, leur utilisation illicite à des fins non médicales a créé des marchés mondiaux illégaux sur lesquels ils sont commercialisés en nombre croissant. Le Canada et les États-Unis ont connu ces dernières années une crise des opioïdes, alimentée par la consommation grandissante de produits synthétiques comme le fentanyl et le carfentanil. L’usage problématique des opioïdes se répand également en Australie et dans certains pays européens, sous l’effet d’une hausse des taux de prescription (voir l’indicateur « Sécurité des soins primaires – les prescriptions » au chapitre 6) et du développement d’un marché illégal dynamique de médicaments (OCDE, 2019[1]).
Si l’accès aux opioïdes sur ordonnance est insuffisant dans de nombreux pays à faible revenu et à revenu intermédiaire, il en va tout autrement dans les pays de l’OCDE, où la disponibilité de ces analgésiques n’a cessé de croître. Dans l’OCDE, ce sont les États-Unis qui affichent la disponibilité par habitant la plus élevée, suivis de l’Allemagne et du Canada, les taux les plus faibles étant observés au Mexique, au Chili et en Colombie. C’est au cours des années 2000 que la disponibilité des opioïdes analgésiques a enregistré la plus forte progression : 59 % en moyenne entre 2002‑04 et 2005‑07, et près de 110 % sur l’ensemble de la décennie. Plus récemment, entre 2011‑13 et 2014‑16, son taux de croissance a diminué pour atteindre en moyenne 5.4 %. En termes absolus, les plus fortes hausses de la disponibilité par personne ont été observées en Israël, au Royaume-Uni et en Allemagne, les baisses les plus prononcées aux États-Unis, au Danemark et au Luxembourg (Graphique 4.6).
Les décès liés aux opioïdes sont un indicateur clé qui rend compte des conséquences de l’usage problématique de ces produits, qu’il s’agisse de médicaments légaux délivrés sur ordonnance ou de substances illicites (comme l’héroïne). En 2016, on en a recensé en moyenne 26 par million d’habitants dans les 25 pays de l’OCDE pour lesquels on dispose de données (Graphique 4.7). La fréquence est néanmoins cinq fois plus élevée aux États-Unis (131), suivis de près par le Canada (120). Le nombre de décès a augmenté d’environ 20 % depuis 2011, tout particulièrement aux États‑Unis, en Suède, au Canada, en Angleterre et au Pays de Galles, et en Lituanie. Aux États-Unis, près de 400 000 personnes sont mortes d’une surdose d’opioïdes entre 1999 and 2017 ; la crise des opioïdes a contribué au premier recul de l’espérance de vie observé en plus d’un demi-siècle.
Les pays mettent en œuvre plusieurs stratégies pour lutter contre l’usage problématique des opioïdes, et font appel à des stratégies globales qui mobilisent différents secteurs : services de santé, services sociaux, services de répression, systèmes de données et recherche. Les autorités se sont efforcées d’améliorer les pratiques de prescription d’opioïdes moyennant des directives cliniques fondées sur des données probantes, des formations, la surveillance des prescriptions d’opioïdes, et la réglementation des relations commerciales et financières avec les fabricants. Du matériel pédagogique et des interventions de sensibilisation ont été mis au point à l’intention des patients et du grand public. La couverture des traitements médicamenteux de longue durée a été élargie pour les patients souffrant d’un trouble lié aux opioïdes, en association avec des services spécialisés dans les maladies infectieuses et des interventions psychosociales. De nombreux pays ont également mis en œuvre des mesures de réduction des risques – antidotes aux surdoses, programmes de distribution de seringues et d’aiguilles, et salles de consommation sous supervision médicale. Des programmes de recherche visant à stimuler l’innovation en matière de prise en charge de la douleur et de traitement des troubles liés aux opioïdes ont par ailleurs été lancés (OCDE, 2019[1]).